Greta Thunberg, Extinction Rébellion - La finance verte au secours des marchés

vendredi 9 août 2019, par Karel Vereycken

Saturne dévorant ses enfants, tableau de Goya.

Depuis le premier rapport du Club de Rome, Halte à la Croissance (1972), l’oligarchie financière, notamment face à l’élan d’optimisme généré par l’homme marchant sur la Lune, tente d’imposer la pensée malthusienne car c’est le fondement même de son système économique, géopolitique et financier.

Dès 1973, le mouvement international de l’économiste américain Lyndon LaRouche ainsi que Jacques Cheminade en France, avaient dénoncé le caractère pseudo-scientifique de cette propagande et démontré qu’en réalité, il s’agissait d’un plan visant à imposer un recul démographique, avant tout aux pays de l’hémisphère sud, dont les « élites » du Nord estimaient qu’ils allaient consommer les ressources qui leur étaient réservées.

Ce qui n’était alors qu’une vision théorique fut confirmé par ce que disait en privé Alexandre King, un des fondateurs du Club de Rome, ainsi que par la fameuse note rédigée en décembre 1974 par le secrétaire d’Etat américain Henry Kissinger, le National Security Study Memorandum 200 (NSSM 200).

Si Solidarité & Progrès prône depuis longtemps une écologie humaine et responsable, nous nous montrons sans compromis avec toute forme de malthusianisme d’où qu’il vienne.

Afin de ne pas mettre tout le monde dans le même sac et de pouvoir articuler des réponses, il n’est pas inutile de distinguer, au sein de l’écolo-sphère, plusieurs composantes, par ordre croissant de radicalité et potentiellement de violence, et chacune contribuant à créer un environnement intellectuel dominant :

  • les Verts jettent le doute sur « la croissance » ;
  • les partisans de la « croissance verte » proposent de la réorienter ;
  • les décroissants veulent la ralentir ou la ramener à zéro en vivant sobrement ;
  • les collapsologues (Jared Diamond, Yves Cochet, Fondation Momentum, etc.) élaborent des scénarios consécutifs à l’effondrement sociétal provoqué par l’épuisement des ressources ;
  • les « rebelles » climatiques, résistance « non-violente » mais « disruptive » (perturbatrice), lancent une véritable Croisade des enfants, visant à nous culpabiliser et à nous obliger à des législations permettant le démontage de la société moderne (Greta Thunberg, XR, etc.) ;
  • les éco-guerriers comme Deep Green Resistance (DGR) qui ne croient pas aux idées mais aux rapports de force. Puisqu’il n’y aura jamais de majorité entrant en résistance non-violente, ce n’est que par « l’action directe », organisée de façon paramilitaire, qu’on pourra, nous-mêmes, démanteler la « société industrielle ».

Certes, tous les écolos ne deviendront pas des éco-fascistes. Seule une minorité se radicalisera mais elle aura un effet d’entraînement. Ainsi, on est en droit de s’interroger lorsque l’on apprend que l’auteur de la tuerie d’El Paso, Patrick Crusius, était non seulement un suprématiste blanc se sentant menacé par « le grand remplacement », mais également un écolo-malthusien radical dont le manifeste s’appelait « Une vérité qui dérange », titre du livre d’Al Gore sur le climat. Ce jeune décervelé y déclare :

L’environnement s’empire d’année en année (…) La plupart d’entre vous sont simplement trop têtus pour changer de mode de vie. Le prochain pas logique est donc de réduire le nombre de personnes vivant en Amérique qui consomment des ressources. Si l’on peut se débarrasser d’assez de gens, alors notre mode de vie deviendra plus soutenable.

Comme le démontre d’une façon certes caricaturale ce cas extrême, il est incontestable qu’une fois que le pessimisme malthusien a gagné les esprits, la déshumanisation (pouvant prendre différentes formes) arrive à grand pas.

Car sans une volonté partagée pour mobiliser et créer les moyens d’offrir une vie digne à chaque enfant qui va naître, fatalement une éthique du « canot de sauvetage » ou du « radeau de la Méduse » s’installe. Qui va-t-on jeter par-dessus bord et qui aura droit aux « faibles » ressources ? Les vieux, les malades, les jeunes, les « génétiquement » défaillants ?

Dès avril 2009, Yves Cochet, l’ancien ministre de l’Environnement devenu collapsologue aujourd’hui, proposait de réduire fortement les allocations familiales à partir du troisième enfant. Et Jean-Marc Jancovici, cet autre grand écologiste français, n’hésite pas à écrire, dans Socialter, que :

Dans les pays occidentaux, il y a un premier moyen de réguler la population de façon raisonnablement indolore : ne pas mettre en œuvre pour faire survivre les personnes âgées malades, à l’image du système anglais qui ne pratique, par exemple, plus de greffe d’organes pour les personnes de plus de 65 ou 70 ans.

Si comparaison n’est pas raison, l’éco-fascisme d’aujourd’hui n’est pas sans rappeler celui d’hier. Pourtant, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les historiens du nazisme ont bien identifié comment a pu naître la « bête immonde ».

Comment des jeunes innocents et romantiques, membres de ce grand mouvement de retour à la nature que furent les Wandervögel en 1895, en passant par les Jeunesses hitlériennes, ont fini chez les SA et les SS pour y commettre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. Hitler, rappelons-le, ne croyait pas que l’agriculture moderne allait permettre de nourrir son peuple. A la place, il décida d’éliminer ceux qu’il estimait être une disharmonie de la nature et de conquérir, au nom du Lebensraum (espace vital) des pays aux sols fertiles comme l’Ukraine.

Espérons que cet article puisse ouvrir un débat et permettre à certains de se ressaisir.

Extinction Rébellion

Samedi 17 novembre 2018. Alors qu’en France, ce samedi-là, plus de 240 000 Gilets jaunes battent le pavé contre l’envolée du prix des carburants et des conditions de travail indécentes, au Royaume-Uni, 6000 manifestants « climatiques » bloquent cinq ponts de Londres lors de la première « journée de rébellion ». L’opération est organisée par le mouvement « Extinction Rebellion » (XR), qui arbore des pancartes sur lesquelles figure un étrange motif : un sablier (d’ordinateur) représentant l’urgence climatique, enfermé dans un cercle, notre planète.

XR, qui, invoquant Gandhi et Martin Luther King, prône la « désobéissance civique », revendique une vocation internationale et compte déjà, rien qu’au Royaume-Uni, 500 personnes formées à l’action non-violente et prêtes à aller en prison le cas échéant. Le mouvement vise à substituer à des opérations de masse des actions pas forcément massives mais « disruptives », c’est-à-dire perturbatrices et subversives, sans violence contre-productive.

Déjà, le 31 octobre 2018 à Londres, plusieurs centaines de personnes s’étaient regroupées devant le Parlement, à Westminster, pour dénoncer un gouvernement de « criminels du climat ». Une quinzaine de manifestants ont été arrêtés, dont le chroniqueur écologiste du Guardian George Monbiot, la députée verte Caroline Lucas ainsi que Greta Thunberg, la jeune suédoise devenue l’icône hyper médiatisée à la tête des « grèves scolaires » (Fridays4Climate),

Prétendant apporter une caution scientifique à cette nouvelle Croisade des enfants, la publication, une semaine auparavant, le 26 octobre, précisément par le Guardian, d’une lettre au ton inquisiteur, signée, à titre personnel, par 94 universitaires et scientifiques britanniques, en soutien total à XR :

« Pour nous, il est hors de question d’accepter, de la part de ce gouvernement ou d’un autre, le refus de prendre des mesures fermes et urgentes face à la crise écologique qui empire. La science est claire, les faits sont incontestables, et il est pour nous inconcevable que nos enfants et petits-enfants doivent subir de plein fouet les conséquences terrifiantes d’un désastre sans précédent résultant de notre propre comportement. Nous sommes au centre de la sixième extinction de masse, avec à peu près 200 espèces qui disparaissent chaque jour. Les humains ne peuvent plus continuer à violer en toute impunité les lois fondamentales de la nature ou de la science. Si nous persistons à cheminer sur la voie actuelle, l’avenir de nos espèces est incertain. Notre gouvernement est complice dans la négation du principe de précaution et incapable de reconnaître qu’une croissance économique infinie sur une planète aux ressources finies, n’est pas fiable (voir notre vidéo ICI).

Ainsi, « lorsqu’un gouvernement renonce expressément à sa responsabilité de protéger ses citoyens de dommages et de garantir un avenir aux générations à naître, il a failli dans sa mission d’intendant. Le « contrat social » est ainsi rompu et il n’est plus seulement de notre droit mais de notre devoir d’outrepasser l’inaction du gouvernement et son manquement à son devoir, et de se rebeller pour défendre la vie elle-même. »

Greta Thunberg, dont la stratégie de communication vise avant tout à exploiter la peur et à semer le désespoir, ne dit rien d’autre lorsqu’elle déclare : « Les faits n’ont plus d’importance aujourd’hui, les politiques n’écoutent plus les scientifiques, alors pourquoi devrais-je apprendre ? (…) Puisque les adultes se fichent de notre futur, eh bien, moi aussi. »

Trois mesures phares pour XR :

  • le gouvernement doit déclarer un état d’urgence climatique et travailler avec « d’autres institutions » pour réaliser des changements ;
  • l’Etat doit adopter des politiques juridiquement contraignantes, visant à ramener à zéro les émissions de carbone d’ici 2025 ;
  • une assemblée citoyenne doit être constituée, dotée d’un droit de regard sur les changements à faire pour atteindre cet objectif.

Ainsi, en mai 2019, à la suite d’une longue série d’actions perturbatrices de XR, et à la demande des travaillistes et de Jeremy Corbin, le Parlement britannique vote l’état d’urgence climatique, rapidement suivi par l’Irlande, la ville de Paris et l’Assemblée nationale française, qui adopte le 27 juin l’article phare du projet de loi énergie et climat portant sur les objectifs de la politique énergétique du pays, en décrétant « l’urgence écologique et climatique ». Parmi les objectifs fixés, l’article 1er du projet de loi prévoit d’atteindre « la neutralité carbone » à l’horizon 2050. Pour ce faire, la France devra diviser ses émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à six par rapport à 1990. Le texte prévoit une baisse de 40 % de la consommation d’énergies fossiles d’ici 2030, contre 30 % jusqu’à présent.

A qui profite le crime ?

Tout cela peut vous paraître une belle histoire de citoyens et de scientifiques courageux rompant le silence. Vraiment ?

Le croire, c’est d’abord mal connaître les capacités perverses dont dispose l’oligarchie financière, dont le centre reste à Londres, pour formater les esprits et orienter l’opinion en faveur de ses choix.

Rappelons que pour le « pacifiste » britannique Bertrand Russell, la psychologie des foules est un instrument majeur en politique. « Son importance a nettement augmenté suite à l’arrivée des méthodes modernes de propagande », écrit-il dans son livre L’impact de la science sur la société (1952).

La plus importante est ce que nous appelons ‘l’éducation’. La religion y joue un rôle, dont l’importance décline. Par contre, celui de la presse, du cinéma et de la radio augmente. Ce qui est essentiel dans la psychologie des foules, c’est l’art de la persuasion. Si vous comparez un discours d’Hitler avec un discours, disons, d’Edmund Burke, on constate les progrès qui ont pu se faire depuis le XVIIIe siècle. Ce qui arrivait avant, c’est que les gens avaient lu des livres affirmant que l’homme était un animal rationnel et qu’ils fondaient leur jugement sur cette hypothèse (…) On peut espérer qu’à un moment donné, n’importe qui pourra persuader n’importe qui d’autre de n’importe quoi, pourvu qu’il puisse toucher le patient très jeune et que l’Etat lui fournisse l’argent et l’équipement.

Croire le conte de fées de Greta, c’est aussi refuser de faire face à l’effondrement en cours du système financier international et de l’économie physique qui en dépend, ainsi qu’aux secousses politiques qu’il engendrera fatalement. Un vrai système totalitaire n’a-t-il pas intérêt à avoir la mainmise sur toute rébellion ou révolution qui pourrait perturber sa survie ?

Nul besoin d’avoir travaillé au Quai des Orfèvres pour se rendre compte qu’aussi bien Greta Thunberg que XR ont été fabriqués de toutes pièces, pour bénéficier ensuite de couvertures de presse gigantesque et de généreux financements... en provenance des branches les plus pourries du système qu’ils dénoncent.

Greta Thunberg, la fille légitime d’Al Gore ?

A noter que certains écologistes parmi les plus radicaux, comme Nicolas Casaux, de Deep Green Resistance (DGR), groupe dont nous condamnons avec force l’intention de démanteler la société industrielle par l’action directe clandestine (voir plus loin), ne sont pas dupes. Casaux, sur son site, analyse XR :

Nombreux sont ceux qui ont lu un article ou vu une vidéo au sujet de la jeune suédoise Greta Thunberg. Rares sont ceux qui ont entendu parler de We Don’t Have Time, la startup suédoise ayant orchestré son succès médiatique. En effet, les premières photos de Greta Thunberg qui ont circulé sur internet ont été prises par Marten Thorslund, responsable marketing et développement durable de We Don’t Have Time.

Selon ses propres termes, We Don’t Have Time est un mouvement et une startup de la tech qui compte utiliser le pouvoir des réseaux sociaux pour responsabiliser les dirigeants et les entreprises vis-à-vis du changement climatique. Startup qui compte Greta Thunberg parmi ses deux « conseillères spéciales jeunesse ».

Ingmar Rentzhog, un des principaux fondateurs de l’entreprise We Don’t Have Time, est aussi le fondateur de l’entreprise suédoise de conseil en communication Laika, spécialisée dans le conseil d’entreprises financières ; Laika a récemment été rachetée par la plateforme de crowdfunding suédoise FundedByMe (une entreprise qui possède des bureaux en Malaisie et à Singapour), qui a alors recruté Rentzhog dans son conseil d’administration. Ingmar Rentzhog est aussi membre du think tank Global Utmaning (Défi mondial, en français) depuis le 24 mai 2018.

En outre, il a été formé par l’ONG de l’ex vice-président états-unien Al Gore, The Climate Reality Project.

Organisation qui

a pour but de former des individus souhaitant contribuer à la sensibilisation générale sur le sujet du réchauffement climatique, en fournissant les outils, le réseautage et les compétences de communication oratoires nécessaires afin de captiver un public et par conséquent, parvenir à introduire des actions concrètes de changements comportementaux.

Al Gore, qui est un modèle particulièrement important pour la jeune Greta Thunberg qui, d’ailleurs, ne sort pas de nulle part. (…) We Don’t Have Time a publié, le 25 janvier, une Déclaration sur la neutralité carbone nordique dans laquelle figurent tous les avatars du capitalisme et de l’industrialisme verts, y compris « l’économie circulaire », le « biomimétisme », les « technologies à zéro émission », les énergies dites « vertes » ou « renouvelables », la « finance verte », les « contrats verts », la création « d’incitatifs » afin que « le secteur privé » agisse vis-à-vis du changement climatique, les « biocombustibles et carburants renouvelables », la « foresterie soutenable », les « technologies de Capture et Stockage du Carbone (CCS) », de « Capture et Utilisation du Carbone (CUS) », de « Capture du Carbone et de Minéralisation (CCM) », de « bioénergies avec CCS », etc.

La mère de Greta est signataire, aux côtés d’Ingmar Rentzog, d’un plaidoyer en faveur d’une transition écologique « attractive, profitable et rapide » vers « une économie à faible émission de carbone » : « Bien que la plupart des changements requis soient à la fois possibles et profitables, de vigoureuses campagnes politiques sont essentielles pour ajuster les prix, les taxes et les régulations de manière à ce que la transition vers une société soutenable soit attractive, profitable et rapide. »

Ils rejoignent ainsi parfaitement la position d’Al Gore, exprimée, par exemple, dans une tribune publiée dans le Financial Times du 27 juillet 2014, coécrite avec David Blood, ancien dirigeant de Goldman Sachs :

Ces temps-ci sont cruciaux pour les investisseurs. C’est au cours des dix prochaines années que nous devons accélérer urgemment la transition vers une économie à faible émission de carbone. Nous pensons que le capitalisme court le risque de s’écrouler. En conséquence, le commerce, qui a été assez timide par le passé en ce qui concerne la mécanique de l’investissement dans la soutenabilité, s’apprête à augmenter sa visibilité. Nous devons y aller à fond. Nous allons devenir plus agressifs parce que nous n’avons pas le choix.

Bail-out vert

Pas bête, DGR a bien compris que l’action de XR doit permettre, sous prétexte de « l’urgence climatique », un renflouement « vert » (bail-out) du système financier actuel. Les grandes banques et sociétés multinationales accepteront volontiers de payer des taxes carbones très lourdes sous une condition : qu’elles puissent les régler avec les liquidités que continueront à leur avancer nos banques centrales…

C’est à ce scénario que travaille depuis 2015, avec beaucoup d’énergie, Mark Carney, le gouverneur de la Banque d’Angleterre et président du Financial Stability Board (FSB) mis en selle par le G20.

Invité le 29 septembre 2015, c’est-à-dire à la veille de la COP21 de Paris, pour une prise de parole devant les cadres de l’assureur britannique Lloyds à Londres, Carney estima que, bien que ce ne soit pas aux banques centrales d’imposer des choix politiques, elles doivent être prêtes à toute éventualité.

Mark Carney, le gouverneur de la Banque d’Angleterre, lors de la COP21 à Paris en 2015.

Or, si les gouvernements décident soudainement de bannir le CO2 de leur économie, le monde pourrait connaître « un moment Minsky du climat », c’est-à-dire un retournement brutal des valeurs d’un tiers de l’économie mondiale, soit la partie liée aux hydrocarbures (lignite, charbon, gaz, pétrole, etc.) et l’écosystème qu’elles entretiennent (exploitation minière, pétrochimie, plastique, etc.). Mieux vaut donc prendre les devants et organiser le verdissement de la finance mondiale, afin de limiter les frais et surtout les secousses.

A cet effet, dès janvier 2016, la Banque d’Angleterre, la City et le gouvernement anglais lancent le Green Finance Initiative (GFI), dont JP Morgan, Barclays et Aumundi font évidemment partie.

Sur son site internet, il est dit : « La City of London Corporation, l’entité en charge de gérer le Square Mile de Londres, considère la finance verte comme prudente, profitable et l’un des meilleurs outils disponible dans la course pour éliminer le carbone. »

Sollicitées par Carney, 34 banques centrales collaborent déjà avec elle sur le « verdissement de la finance ». En 2017, elles forment une coalition sous le nom de Network for Greening the Financial System (NGFS).

En avril 2019, avec le système financier mondial sous pression, la Banque d’Angleterre revient à la charge. Manquent à l’appel la Réserve fédérale américaine et la banque centrale du Brésil. Or, sans la Fed, impossible d’organiser le marché secondaire des obligations vertes dont on parle depuis 2008. La Fed sous Trump, pour des raisons dont on peut discuter, bloque le verdissement de la finance mondiale ! Quelle horreur !

Le changement climatique peut provoquer l’effondrement de tout le système, avertit Sarah Breeden, responsable de la supervision internationale à la Banque d’Angleterre, puisque du jour au lendemain, ce sont au moins 20 000 milliards d’actifs qui risquent de partir en fumée.

A un journaliste du journal The Atlantic, qui lui demandait si un tel choc pourrait être déclenché par la décision américaine (peu probable pour l’instant) de taxer le carbone, le professeur Alan Tooze, de l’université Columbia de New York, répondit :

Ce serait une façon. Imaginons maintenant que l’on continue à aller vers une hausse de 3 ou 4 degrés Celsius de réchauffement climatique. Et alors imaginons que se produisent quelques non-linéarités dont les climatologues nous fassent part, et on se retrouve devant un événement du type Fukushima. Que se passera-t-il alors ? Vous verrez des politiciens très nerveux, et pas forcément ceux connus pour leur populisme, qui soudainement décident qu’il faut fermer des pans entiers de notre économie carbonée. Et cela tout de suite. C’est là que se produira un gros choc avec des ajustements soudains.

Provoqué ou pas, certains voient dans ce choc, ce « moment climatique Minsky » qu’ils comparent d’ailleurs avec le krach financier de 2008, une rare occasion pour reprendre la main et obtenir les liquidités bon marché pour faire tourner le manège financier.

XR, un mouvement « thérapeutique » ?

Il n’est pas faux de dire que XR est un mouvement essentiellement thérapeutique c’est-à-dire que le mouvement réunit des gens qui souffrent éco-dépression, éco-anxiété. Il a été démontré qu’ils consultent souvent des psychologues qui leur font croire que la seule manière de surmonter leurs angoisses et phobies est d’aller dans la rue, de prêcher, d’en parler à d’autres.

Pour comprendre ce phénomène, il faut comprendre l’impact de la propagande médiatique sur les adolescents, exposés quotidiennement à des infox hautement anxiogènes : « il n’y a plus d’abeilles », « les ours blancs sont tous morts », « 200 espèces qui disparaissent par jour », « nos enfants vont tous cramer ».

La dépression arrive au point où des chirurgiens rapportent que des jeunes demandent à être stérilisés pour ne pas que leurs enfants vivent l’enfer qui vient ! Dès lors, soit vous allez tous les jours dans la rue crier votre désespoir, soit votre réaction est de prendre les armes et de « flinguer les coupables » un par un. Ici, « l’urgence verte » rencontre la « violence régénératrice ».

C’est une énorme escroquerie à laquelle la presse a offert une couverture médiatique royale. Au moment où les financiers veulent fermer nos hôpitaux, nos écoles, réduire nos retraites pour faire fonctionner leur système, tout d’un coup la presse couvre la première manifestation de gentils écologistes faisant de la résistance non violente, pas comme les 240 000 gilets jaunes qui sont de « grosses brutes » et qui étaient au même moment à Paris.

Qui paye les factures ?

Trevor Neilson, le grand mécène de XR

Ceci expliquant cela, il est donc peu surprenant de découvrir, parmi ceux qui financent XR, de riches « philanthropes » américains qui, d’après le quotidien britannique The Independant du 12 juillet 2019, viennent d’injecter un demi-million de livres dans XR et promettent de faire mieux bientôt.

Pour financer les « grèves scolaires » à la Greta et des groupes militants tels que XR, un fonds spécial, le Climate Emergency Fund (CEF), a été créé par trois riches donateurs : Trevor Neilson, Rory Kennedy et Aleison Getty. Si les deux derniers donnent une caution « humaine » à l’opération, c’est surtout le premier qui semble mener la danse :

  • Trevor Neilson, qui a cofondé et préside le Climate Emergency Fund, est un homme d’affaires et investisseur américain qui se dit inspiré par Greta Thunberg et XR. Membre éminent du Council on Foreign Relations (CFR), le cercle de réflexion le plus prestigieux de Wall Street, il a travaillé avec des milliardaires comme Bill Gates et Charles Branson. Désigné Young Leader par le Forum économique mondial de Davos, il a fait partie de la Clinton Global Initiative. Egalement cofondateur et PDG de la plateforme de financement i(x) investments et d’autres sociétés d’investissement, Neilson a un carnet d’adresse impressionnant. Il est notamment le co-fondateur du Global Philantropy Group, un cabinet de conseil en philanthropie, ayant des bureaux à Los Angeles et New York au service de la jet-set. Parmi ses clients : Angelina Jolie, Madonna, Demi Moore, Ashton Kutcher, John Legend, Avril Lavigne, Tegan and Sara, Miley Cyros, Eva Longoria, Cucci, etc. Interrogé par The Guardian à propos du financement de XR, Neilson a expliqué que les trois fondateurs utilisent leurs contacts parmi les méga-riches pour obtenir « cent fois plus » dans les mois à venir. « Il s’agit peut-être de la meilleure occasion pour arrêter la plus grande urgence à laquelle on ait dû faire face dans l’histoire. » ;
  • Rory Kennedy, réalisatrice de films documentaires sur des enjeux sociétaux, elle est la plus jeune des onze enfants de Robert F. Kennedy ;
  • Aileen Getty, la fille ainée du milliardaire du pétrole, John Paul Getty II. Engagée dans le combat contre le HIV, les addictions et en faveur des sans abris, elle a fondé et dirige la Aileen Getty Foundation.

Le site de la Climate Emergency Foundation appelle le simple citoyen à consacrer sa vie à la lutte climatique : « Nous croyons qu’une mobilisation pacifique planétaire à l’échelle de la Seconde Guerre mondiale nous donnera une chance d’éviter les scénarios du pire et de rétablir un climat plus sûr ».

Totalement orienté vers l’action, le site offre trois niveaux de financement : le kit start-up, qui vous permet d’imprimer vos tracts et de vous équiper de mégaphones pour l’action de rue et les manifestations. Le deuxième niveau vous offre des fonds pour créer une organisation permanente et le troisième pour payer des salaires, loyers, bureaux et frais de marketing. Vu sous cet angle, aucun écolo ne pourra refuser !

Le 27 novembre, le site de la BBC a publié un article qui montre que le responsable des finances de XR, un certain Andrew Medhurst, est un ancien responsable des produits dérivés chez HSBC et de la Lloyds. Depuis il s’est mis au vert ! On le voit se faire arrêter par la police londonienne devant les banques qui sont très méchantes pendant que les gens par terre ont une banderole qui annonce que « L’argent ne se mange pas ». Medhurst a su structurer le financement de XR au travers les plateformes alternatives, à travers le bitcoin et les crypto-monnaies.

Ainsi, Extinction Rebellion, au Royaume-Uni, a réuni en 2018 plus d’un million de livres et déjà plus d’un million en 2019. Le blocage de Londres en octobre 2018 a coûté 1 million à XR et 37 millions à la police de Londres pour gérer l’évènement. Donc c’est le contribuable qui paie. Si vous êtes militants à plein temps, vous pouvez vous rembourser jusqu’à 468 € par semaine, soit l’équivalent d’un SMIC et demi.

Un porte-parole de XR s’est réjoui d’une telle « prise de conscience » des méga-riches : « C’est le signe qu’on arrive à un point de basculement. Jadis, la philanthropie était souvent une affaire d’intérêts personnels, mais maintenant les gens réalisent qu’on est tous dans le même bateau et mettent leur argent en commun pour le bien-être collectif. »

Passer aux actes

Si, officiellement, XR appelle à la non-violence, l’apparition de ce mouvement coïncide avec la publication du manifeste de « Deep Green Resistance » (DGR), écrit en 2018 par l’écrivain américain Derrick Jensen, Keith Lierre et Aric Mbay.

Pratiquant l’« action directe » dès 2011, le mouvement DGR dépasse de loin en radicalité tout ce que nous venons de voir jusqu’ici. Car il rejette explicitement le concept même de « civilisation » – par nature « écocidaire » – et prône le retour à un état primitif de vie sociale, avec une population humaine réduite au niveau où elle était il y a des dizaines de milliers d’années.

La civilisation, d’autant plus la civilisation industrielle, n’est pas et ne sera jamais soutenable, peut-on lire dans le manifeste. Notre mode de vie – la civilisation industrielle – est fondé sur une violence étendue et permanente. Il a besoin de cette violence et s’effondrerait sans elle.

Ainsi, pour DGR, face à la violence inouïe de cette civilisation industrielle, un peu de contre-violence se justifie. Non pas contre des personnes, mais contre les équipements leur permettant de vivre et prospérer. DGR appelle donc ouvertement à des actions de sabotage contre tout ce qui est lié à la civilisation humaine, c’est-à-dire les infrastructures, l’industrie et l’agriculture.

Sur son site, ce mouvement annonce le début de la « Guerre écologique décisive », dont le but, dans la phase IV, est de « démanteler autant que possible l’infrastructure industrielle basée sur les combustibles fossiles » :

« La Guerre écologique décisive (GED) est la stratégie d’un mouvement qui a trop longtemps été sur la défensive. C’est le cri de guerre de personnes qui refusent de perdre une bataille de plus, le dernier ressort d’un mouvement isolé, coopté et las de ne jamais voir la fin des batailles légales et blocus. »

GED tire son modus operandi des stratégies militaires asymétriques classiques que développent les manuels d’entraînement, notamment ceux de l’Académie militaire américaine de WestPoint. Tous les mouvements de libération nationale y ont fait appel.

Comme l’avoue un militant : « On a rencontré d’anciens militaires ayant acquis de l’expérience lors de vrais conflits. Ils nous ont appris à identifier les faiblesses de l’ennemi auquel on fait face. » Avec peu de forces mais la bonne stratégie, DGR espère abattre de grandes puissances.

En France, DGR s’organise autour d’un certain Nicolas Casaux, du collectif Le Partage. Sa page Facebook compte plus de 28 000 abonnés et cette mouvance se greffe de manière opportuniste à quelques luttes existantes (dont, paradoxalement, les Gilets jaunes).

Rejetant explicitement le principe de non-violence de Martin Luther King et Gandhi, décrit comme un « mythe » destiné à tromper les gens, DGR préconise, pour atteindre ses objectifs, une stratégie d’action directe en plusieurs étapes, allant de la formation et l’entraînement des recrues au passage à l’acte en temps réel, avec des opérations de blocage, de perturbation et de sabotage des infrastructures industrielles vitales.

Autant c’est une noble cause de défendre et promouvoir un développement harmonieux de l’homme et de la nature, autant il paraît insensé de s’attaquer à des infrastructures dont dépend la vie de millions de personnes.

L’oligarchie en face n’attend que cette violence-là pour mettre en place la dictature ultime qu’elle nous prépare depuis longtemps. Il faut donc savoir qui l’on entend servir.