Quand les verts et le climat accouchent du malthusianisme noir

samedi 27 juillet 2019, par Christine Bierre

La « victoire » des Verts aux récentes élections européennes, dopés par le climat, n’est pas tant celle de l’écologie que celle du pessimisme grandissant des Européens quant à la capacité de la politique traditionnelle à transformer le présent désastreux dans lequel ils vivent.

Cette vague verte européenne doit beaucoup cependant à l’opération Greta Thunberg, un pur produit de la manipulation des réseaux sociaux et des médias, utilisant ce triplé gagnant « émotions intenses, bêtise humaine et numérique », lancé à quelques mois des élections européennes.

Quoi de mieux pour rentrer dans la peau des électeurs qu’une autiste Asperger de 16 ans, totalement obsessive et sachant, de par sa maladie, se servir à merveille du langage [1], pour bien remuer la culpabilité chez ces adultes qui « n’ont pas su agir » et « laissent aux enfants une planète sans futur ». Le temps que ça durera, le propre d’une vague étant de retomber !

Faute de vision chez les autres, les adorateurs de Thomas Malthus (1766-1834) [2] et de l’apocalypse ont la porte grande ouverte pour imposer au plus grand nombre, non la volonté de lutter contre les pollutions qui existent ici et là, mais le rejet du progrès, la haine de notre espèce et du désir même de procréer, sans lequel toute espèce est vouée à sa fin.

Nous avons assisté ces derniers temps à la jonction des différents courants qui barbotent dans cette mare : écologistes opposés au progrès, ceux pour qui le travail humain est la cause du changement climatique et malthusiens prônant ouvertement la réduction drastique de la population humaine.

Des mouvements comme les GINKS (Green Inclination, No Kids : engagement vert, pas d’enfants), les André Buéno et autres Laura Noulhat ont tiré la conclusion de ces théories : si c’est l’homme qui est à l’origine de tous ces maux, cessons de nous reproduire !

Margaret Mead, Paul Ehrlich et la bombe de la population

Margaret Mead, une femme qui vous fait perdre la tête.

Pour ceux qui croient que la fin du monde est proche à cause du « dérèglement climatique » et que le coupable est l’homme, sachez que cette théorie a été inventée de toutes pièces il y a 44 ans, aux Etats-Unis, par l’anthropologue Margaret Mead, alors présidente de l’Association américaine pour l’avancement de la science (AAAS), et par les principaux élèves du démographe américain Paul Ehrlich, qui a popularisé les thèses de Thomas Malthus dans son ouvrage La Bombe P (pour « population »).

Parmi eux figure John Holdren, conseiller scientifique de Barack Obama. Cette théorie a été adoptée lors de la conférence « L’atmosphère en danger et dangereuse » des 26-29 octobre 1975 à Research Park Triangle, en Caroline du Nord.

Paul Ehrlich, auteur du best-seller The Population Bomb qui pose la question : réguler la démographie ou se précipiter vers l’extinction ?

A l’époque, on ne parlait pas encore de « réchauffement climatique », car la tendance était plutôt au « refroidissement climatique », mais on cherchait déjà une cause humaine qui permettrait de justifier des politiques hostiles à la croissance démographique.

Mead planta le décor en déclarant que la conférence sur la population de l’ONU, qui s’était tenue à Bucarest en 1974, avait tranché sur cette question épineuse :

La croissance démographique incontrôlée pouvait être fatale à l’environnement (…) et les idées radicales en vogue auparavant, selon lesquelles [la croissance économique et] la contraception suffiraient à réduire suffisamment la population, avaient alors été mises en échec.

La thèse de Mead ?

A moins que les peuples ne commencent à comprendre les conséquences immenses et à long terme de choix qui semblent futiles – tels que creuser un puits, construire une route ou un avion, faire un essai nucléaire ou diffuser des produits chimiques dans l’atmosphère ou dans l’eau – l’ensemble de la planète pourrait être mise en danger.

La communauté internationale avait déjà créé un Droit pour la terre et pour la mer, mais pas encore pour l’atmosphère. Il fallait en établir un, qu’elle entendait définir.

Pour ce faire, elle

demanda à un groupe de spécialistes de l’atmosphère de se réunir ici et de réfléchir à la façon dont les dangers très réels posés à l’espèce humaine et à la vie sur cette planète peuvent être expliqués, de façon crédible et persuasive, avant que la présente Société des nations ne commence à légiférer sur l’atmosphère, ou à rédiger des communiqués sur les impacts internationaux sur l’environnement..

Pour arriver à ses fins, Mead insista pour que les estimations des scientifiques soient vidées de leurs « contradictions scientifiques internes » afin « qu’elles ne troublent pas l’action », et « qu’elles ne puissent être exploitées à des fins politiciennes ».

Elle voulait susciter des « habitudes » fortes chez les gens, aboutissant à

construire un système d’alerte artificiel mais efficace, comparable aux instincts des animaux qui fuient avant l’ouragan, stockent des noix avant un hiver rigoureux ou répondent aux changements climatiques à venir, comme les chenilles en faisant épaissir leur peau.

Mead mit aussi en garde ces scientifiques qui, pour « protéger leur réputation », agiraient comme ceux qui « jouaient de la flûte alors que Rome brûlait ».

Un rapport sur cette conférence sera produit l’année suivante, signé par Mead et son collaborateur William W. Kellog.

En 1976, la même équipe proposa un système d’attribution « à chaque nation, de droits à polluer », semblable en tous points au système en vigueur proposé par Al Gore !

Citant les conclusions du premier jour, le rapport affirme :

En tant qu’espèce, nous essayons de nous maintenir aux dépens d’autres espèces. Il semble qu’il y ait un conflit entre la préservation de la nature et le fait de nourrir une population qui croît rapidement. Notre objectif est-il réellement de nourrir la population, ou bien réalisons-nous que nous ne pouvons pas nourrir le monde à n’importe quel prix ? Cela pose la question du moment où l’on devra choisir entre "la préservation de la nature et le besoin de nourrir la population mondiale".

Kellog y reconnaît toute la difficulté à « modéliser » le changement climatique et le rôle de l’homme, du fait que les phénomènes climatiques ne sont pas linéaires. Mais il évacue tout de suite ses doutes, affirmant que « l’homme a déjà sûrement affecté le climat de vastes régions et potentiellement de la terre entière ».

Il émet aussi l’hypothèse que la demande d’énergie et de nourriture pour une « population importante, et en croissance, puisse réchauffer la terre de façon excessive », avant d’en énumérer les conséquences que l’on ne cesse de répéter ces dernières années : fonte des glaces de l’Arctique et de l’Antarctique, etc. Le CO2 était alors bien placé sur la liste des mécanismes du changement du climat pouvant être attribués à l’homme.

John Holdren est cité également : « Où en sommes-nous par rapport au danger ? », question qu’il balaie du revers de la main comme « ayant peu d’importance, car l’essentiel est d’agir dès maintenant » !

Quid des bébés Mead ?

A droite, le Pr Stephen Schneider, ici avec Al Gore et sa femme.

Qu’est-il advenu des experts du climat invités à cette conférence pour développer un argumentaire imparable à l’attention des gouvernements, avant même l’existence d’un quelconque changement climatique provoqué par l’homme ?

  • Stephen Schneider, grand promoteur des scénarios du refroidissement climatique, joua un rôle de premier plan dans le GIEC (Groupe d’experts intergouvernementaux sur l’évolution du climat). En 1989, il avait déclaré à Discover magazine qu’il fallait « capturer l’imagination du public, en présentant des scénarios effrayants, en faisant des déclarations dramatiques qui évitent toute mention des doutes qu’on pourrait avoir. Chacun d’entre nous doit décider de l’équilibre à garder entre être efficace et être honnête ». Toujours proche d’Ehrlich, il a formé à cette approche des générations entières d’experts climatiques à l’Université très réputée de Stanford, avant de mourir en 2010.
  • John Holdren, un ami d’Ehrlich, en fit de même à l’Université de Harvard et auprès d’Obama, dont il était conseiller. En 2006, il a obtenu que l’AAAS adopte une résolution très radicale sur le changement climatique, reflétant, selon cet organisme, « le consensus scientifique représenté, par exemple, par le GIEC ».
  • Le Dr George Woodwell, lui aussi proche de Holdren, a été membre de l’Académie nationale des sciences. Il se rendit célèbre pour sa propension à tordre le cou à la réalité. Dans un entretien avec le magazine Science en 1967, il accusait le DDT d’avoir pollué chaque acre de terre avec environ 6 kg de produit. Il fut révélé plus tard que ce chiffre ne concernait que le terrain où l’on nettoyait les camions de DDT.

Malthusianisme

Voilà comment on a réussi, par le biais de l’écologie, à ramener les politiques malthusiennes, totalement discréditées, au cœur de l’action politique. Rappelons que Malthus défendait l’idée que la population croît géométriquement, alors que les ressources n’augmenteraient que dans une progression arithmétique.

Preuve que Malthus avait tort, la population mondiale est passée de 1 milliard en 1834, l’année de sa mort, à 7,7 milliards aujourd’hui ! Ceci, grâce aux nouvelles ressources découvertes par l’intelligence humaine, dont les énergies fossiles, mais aussi l’électricité d’origine nucléaire, bien plus dense et efficace [3].

Comme Margaret Mead, Thomas Malthus était prompt à trancher contre l’homme. Voici une de ses célèbres citations :

Un homme qui naît dans un monde déjà occupé, s’il ne peut obtenir des moyens d’existence de ses parents auxquels il peut justement les demander, et si la société ne peut utiliser son travail, cet homme n’a pas le moindre droit à la plus petite portion de nourriture, et en réalité il est de trop sur la terre. Au grand banquet de la nature, il n’y a pas de couvert mis pour lui ; la nature lui commande de s’en aller, et elle ne tarde pas à mettre cet ordre elle-même à exécution.


[1https://www.youtube.com/watch ?v=o1OFzXcOyAI

[2En 1805, le pasteur anglican Thomas Malthus, propagandiste au service de l’Empire britannique engagé dans le génocide du Bengale, fut nommé professeur d’histoire et d’économie politique au collège fondé par la Compagnie des Indes orientales à Haileybury.