Coronavirus et laboratoires d’analyse vétérinaires : pourquoi on dépiste si peu en France

vendredi 3 avril 2020, par Johanna Clerc

Confirmant les témoignages qui ont été rapportés ces dernières semaines dans les médias et sur les réseaux sociaux, Le Point a publié le matin du 3 avril un article édifiant : les autorités n’ont toujours pas donné leur feu vert aux laboratoires d’analyses vétérinaires pour dépister le Covid-19. Pourtant, les capacités techniques et la volonté de contribuer à cette « guerre » contre le coronavirus sont bien là chez ces professionnels de la biologie médicale. Résumé.

Dès le 15 mars, 3 jours après l’appel à la mobilisation contre la pandémie de E. Macron, les acteurs de l’analyse vétérinaire ont passé en revue leurs troupes et proposé leur aide à Jérôme Salomon, Directeur de la Santé. Selon leurs estimations, les 75 laboratoires départementaux [1] et leurs 4500 employés en charge du contrôle des eaux, de l’hygiène alimentaire et de la santé animale auraient été en mesure d’analyser 150 000 à 300 000 test PCR par semaine, sous un délai de 15 jours. Autrement dit, au lieu des 20 000 tests quotidiens annoncés hier soir par E. Philippe, ce serait au moins le double qui pourraient être mis en œuvre. Ils seraient également équipés pour analyser en masse les tests sérologiques à venir.

Un blocage réglementaire

Seulement, la réponse obtenue pour le moment de la part du Ministère reste le silence ou un vague « le dossier est à l’étude ». Ce qui bloque ? Une histoire de norme ! Depuis le 30 mai 2013, une loi interdit aux laboratoires de biologie médicale vétérinaire d’analyser le moindre prélèvement provenant d’un corps humain, et inversement. Une règle que le gouvernement n’a toujours pas modifiée, malgré la grande latitude qui lui est donnée par la loi d’urgence sanitaire... Incompréhensible pour Jean-Louis Hunault, président du SIMV [2], cité par Le Point :

C’est absurde. Il n’y a que l’homme pour se considérer comme non-mammifère (...) Un virus est un virus, quel que soit le corps où il se loge. (...) Concrètement, nous en sommes là. Nos tests existent. L’Institut Pasteur doit les homologuer, et nous les rectifierons au besoin. Dès l’homologation reçue, et si le gouvernement donne son feu vert, nous pouvons déclencher la production de tests, disponibles sous 15 jours. Mais tant que nous n’avons pas ce feu vert, nous ne pouvons rien faire…

Or, ces considérations réglementaires n’ont pas empêché les Allemands, les Italiens et les Espagnols de mobiliser, eux, leurs laboratoires vétérinaires, ce qui explique au moins en partie qu’ils soient à même de dépister beaucoup plus massivement le COVID-19.

Des structures vétérinaires précieuses

Le secteur de la biologie vétérinaire a en effet développé une infrastructure puissante pour pouvoir réaliser des dizaines de milliers de tests par jour lors des épisodes d’épizooties (vache folle, grippe aviaire, etc...). Les 75 laboratoires départementaux sont ainsi équipés de machines qui peuvent procéder à des analyses en masse, contrairement aux appareils disponibles dans les CHU et les laboratoires privés, certes très pointus, mais limités à un seul réactif. D’ailleurs, parmi la trentaine de kits déjà utilisés par ces laboratoires publics vétérinaires, certains détectent déjà les coronavirus... Seulement voilà, le temps passe, et les fabricants de réactifs ont déjà commencé à vendre leurs stocks à nos voisins européens, moins sclérosés par cette pensée normative et réductrice qui enferme les responsables administratifs dans une inertie aujourd’hui devenue criminelle.

PASSEZ A L’ACTION !

  • Diffusez notre feuille de route pour REELLEMENT faire la guerre au Covid-19 et exigez auprès de vos élus qu’elle soit appliquée. Elaborée dès le 23 mars, elle inclut la mobilisation immédiate des compétences et des équipements des laboratoires d’analyse vétérinaire, en plus de toutes les mesures qui sont indispensables aux vues des expériences chinoises et coréennes.
  • Contactez-nous pour être rappelé par notre équipe militante et agir avec nous.

[2Syndicat de l’industrie du médicament et du diagnostic vétérinaires