Covid-19 : coopération internationale ou pénuries alimentaires ?

vendredi 3 avril 2020, par Karel Vereycken

Avec la moitié de l’humanité en confinement et des millions de personnes en activité réduite ou au chômage, l’impact financier et économique de la pandémie du Covid-19 commence à se produire. Cherchant à revenir à une « situation normale » au lieu de reconnaître qu’elle fut à l’origine de la débâcle, nos dirigeants sont en panne d’idées « out-of-the-box » (hors du cadre).

Dans les faits, faute de fermer les marchés boursiers et spéculatifs, comme le réclament avec force Jacques Cheminade, en France, et Helga Zepp-LaRouche, ceux-ci non seulement s’effondrent, mais se désintègrent. La poursuite de leurs spéculations folles menacent la survie des échanges vitaux pour l’existence physique de l’humanité.

Le 31 mars, dans un rare communiqué commun, les dirigeants des trois organisations multilatérales chargées de l’alimentation, de la santé, et du commerce, FAO, OMS et OMC, ont mis le monde en garde contre un risque de crise alimentaire mondiale.
« Les incertitudes liées à la disponibilité de nourriture peuvent déclencher une vague de restrictions à l’exportation », provoquant elle-même « une pénurie sur le marché mondial », soulignent le chinois Qu Dongyu, qui dirige l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Ethiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur-général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Brésilien Roberto Azevedo, dirigeant de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Réaction en chaîne

Si l’on peut se réjouir qu’une partie des actifs « fictifs » du système spéculatif « s’évapore », c’est bien lui qui tient notre alimentation en otage.

A titre d’exemple, le cas du premier exportateur mondial de blé, la Russie, où la chute du prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux a provoqué une dépréciation du rouble.

Comme le précise le site Terre-Net :

« Au début de la crise provoquée par le coronavirus, le ralentissement de l’économie mondiale a fait émerger des craintes sur une possible baisse la demande en blé dans le monde, et les cours ont d’abord commencé par chuter. Des pays importateurs tels que l’Égypte, l’Arabie Saoudite, l’Algérie, ou encore l’Indonésie, ’produisent du pétrole, qu’ils revendent ensuite pour récupérer des dollars avec lesquels ils achètent du blé.’ Les inquiétudes augmentent sur ’la capacité de ces pays à maintenir leurs achats dans les prochains mois.’ Par manque de dollars, ils pourraient diminuer leurs achats de blé.

Mais depuis plusieurs jours, les cours du blé ont regagné en fermeté. ’Tandis que les Français dévalisent les rayons, les industriels et les meuniers, les grands pays importateurs renforcent leurs achats de précaution pour se constituer eux aussi des réserves’. La logistique tient le coup pour le moment, mais ’il y a des craintes sur un confinement total qui bloquerait l’acheminement des marchandises vers les usines.’ »

Du coup, au niveau mondial, le prix du blé grimpe depuis décembre 2019. Assailli de fortes demandes, notamment de la part de la Syrie, et craignant de manquer pour son marché domestique, le gouvernement russe a annoncé en décembre qu’elle envisageait de plafonner les exportations russes de céréales à 7 millions de tonnes entre avril et juin. Une annonce qui a accéléré la hausse des prix, y compris sur les marchés européens.

Le 23 mars, Valeriia Anikushina, sur le site d’information Russia Beyond rapporte que la semaine précédente, les prix moyens du blé alimentaire en Russie avaient grimpé de 1 000 roubles, atteignant 13 360 roubles (154,80 euros) la tonne, son maximum historique. « Plus encore, le prix du blé russe a par là même dépassé celui de l’or noir russe. Le 19 mars, une tonne de pétrole russe Urals pour le marché méditerranéen (CIF Augusta) coûtait en effet 12 850 roubles (148,90 euros). En même temps, dans la matinée du lundi 23 mars, le prix du pétrole sur la bourse a encore chuté de 8 %, tombant en dessous de 26 dollars le baril, soit 200 dollars la tonne ».

Ce phénomène, hélas, se mondialise. Car, malgré la chute des autres marchés, les prix du blé sur les bourses mondiales, bien qu’ils puissent s’effondrer du jour au lendemain, ont augmenté : à Chicago de 6,7 % au prix de 198 dollars la tonne, à Paris de 6,9 % à 204 dollars.

Si la FAO s’inquiète de la situation, elle n’envisage aucun mécanisme de régulation, tel des formes de marchés organisés ou le plafonnement des prix. Impuissante, et craignant que d’autres pays recourent à un protectionnisme non-altruiste, elle a simplement rappelé que les « restrictions à l’exportation » débouchent souvent sur des famines dans d’autres coins du globe.

A cela s’ajoute qu’avec la fermeture des frontières pour lutter contre la pandémie du Covid-19, les agricultures occidentales se découvrent, en même temps, dépendantes de mains d’œuvres venues d’ailleurs : latino-américains aux Etats-Unis, Maghrébins pour récolter les fraises en Espagne, backpackers européens en Australie, travailleurs agricoles d’Europe de l’Est dans les champs d’asperges en Allemagne...

En France, afin de remplacer les 200 000 bras manquants dans nos champs pour cueillir fruits et légumes en pleine saison des semis, 140 000 personnes en chômage technique (coiffeurs, artisans, employés, etc.), ont déjà répondu présents.

Autre maillon suscitant l’inquiétude, les retards aux frontières pour les containers de marchandises, la baisse des activités portuaires, les grèves de personnels réclamant des protections adéquates, entraînent un « gâchis de produits périssables et une hausse du gaspillage alimentaire ».

Les chefs de la FAO, de l’OMS et de l’OMC soulignent que pour vaincre la pandémie, il est vital de « maintenir les chaînes d’approvisionnement alimentaire ». Craignant des mesures de repli sur soi, et d’un chaos résultant du chacun pour soi, ils soulignent que « C’est dans des périodes comme celles-ci que la coopération internationale est essentielle ».

Des accords de troc

Ainsi, simultanément à la fermeture des bourses, il s’agit, par une séparation stricte des banques, de « sanctuariser » le crédit, l’épargne, les dépôts ainsi que le système de paiement international, quatre éléments essentiels au maintien des échanges commerciaux et la production.

Face à la désintégration des marchés, des accords temporaires de troc conclu entre grandes et moins grandes nations et à long terme, doivent prendre le relais.

Ces accords serviraient de charpente pour faire tenir l’économie réelle, notamment en stabilisant les prix des denrées alimentaires ainsi que ceux de l’énergie et des matières premières.

Coopérer ou disparaître

Pandémie, dette et économie réelle. C’est la réalité elle-même qui fixe l’ordre du jour de la rencontre au sommet entre grandes puissances que Helga Zepp-LaRouche, fondatrice et présidente de l’Institut Schiller, appelle de ses vœux depuis janvier.

Nous vous demandons de signer directement en ligne cet appel.

Enfin, pour faire connaître et surtout promouvoir cette plateforme programmatique, nous vous invitons à vous connecter le 25 et 26 avril sur internet, pour suivre la conférence internationale de l’Institut Schiller qui réunira des personnalités de haut niveau sur cette thématique.

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