Donald Trump n’a jamais été un intellectuel ou un théoricien. Personnalité atypique, il revendique son aptitude à être totalement imprévisible sur de nombreux sujets.
Animal politique puissant, sa politique se résume à une série de pulsions et d’intuitions visant à imposer, unilatéralement et par la force s’il le faut (sanctions, menaces), ce qu’il croit nécessaire pour sortir l’Amérique de son déclin, vision qui lui a permis de conquérir, plus encore qu’en 2016, le cœur et l’adhésion d’une grande majorité des électeurs.
Parmi ces orientations :
- rupture avec le « mondialisme » en faveur d’un retour à l’Etat-Nation ;
- « déportation en masse » des sans-papiers ;
- taxes de plus de 100 % sur certaines importations afin de relancer une base industrielle ;
- bras de fer avec la Chine, accusée de vouloir « piquer » l’hégémonique américaine ;
- maintien du dollar comme unique monnaie de réserve mondiale ;
- hausse des dépenses militaires, y compris pour les armes nucléaires ;
- fin des « guerres perpétuelles » de l’Empire américain aux quatre coins de la planète grâce à une politique de « paix par la force ».
Si Trump a fait le grand chelem en remportant le vote populaire (2 millions de voix de plus que son adversaire selon les derniers décomptes), les swing states, les grands électeurs, la Chambre et le Sénat, sans mouvement politique ni doctrine propre, sa base et ses proches se résument avant tout à des followers.
Lorsqu’on examine sa future administration, en rupture avec Clinton-Obama et Biden-Harris, tous à la merci d’un complexe militaro-industriel et financier qui conduit le monde à la guerre, l’on constate qu’à part quelques personnalités vraiment compétentes, ses choix se portent sur des « loyalistes » et de grands donateurs à sa campagne.
L’arrivée de Pete Hegseth au ministère de la Défense est une bonne chose pour ceux comme nous qui aspirent à dissoudre l’OTAN, dont il a une piètre opinion. Le Trump-bashing sera en baisse car John Ratcliffe, en charge de la CIA n’a jamais avalé le narratif du Russiagate, thèse absurde faisant de Trump une marionnette à la solde d’une Russie impériale, complotant un hold-up sur la démocratie américaine.
Tulsi Gabbard
La bonne nouvelle, c’est que l’ancienne candidate démocrate et ex-militaire Tulsi Gabbard est pressentie comme directrice du renseignement national (DNI). C’est donc elle qui donnera chaque matin un briefing à Trump, rassemblant les informations distillées par les 18 agences de renseignement (!) que compte le pays.
Durant son mandat à la Chambre des représentants (de 2013 à 2021), elle a souvent croisé le fer avec les néoconservateurs va-t-en-guerre. Son voyage en Syrie, en janvier 2017, et son refus de soutenir la guerre par procuration menée par les Washington contre la Russie, lui ont valu l’ire des néoconservateurs. A Londres, sa nomination laisse craindre une « réduction du partage de renseignements au sein de l’Alliance des Cinq Yeux » (Five Eyes). Le Telegraph cite l’ancien chef du MI6, Sir Richard Dearlove, qui évoque le choix d’un « franc-tireur [sans] aucune expérience du renseignement et de la sécurité ». Pour le néo-conservateur John Bolton, Gabbard est la « pire nomination de l’histoire à un poste ministériel ».
Si, en théorie, cela ouvre la perspective d’une paix rapide en Ukraine, les nominations de Trump pour le Proche-Orient, où il soutient sans réserve Netanyahou et sa clique, laissent craindre le pire. Le pasteur Mike Huckabee, figure emblématique des Évangélistes « sionistes » chrétiens, pressenti comme ambassadeur en Israël, de même qu’Elise Stefanik, future ambassadrice à l’ONU, sont des proches de Miriam Adelson, veuve du roi des casinos de Las Vegas. Elle a été la plus grande contributrice de la campagne de Trump, sur qui elle exerce une grande influence. Pete Hegseth résume ainsi leur doctrine identitaire simpliste : « Le sionisme et l’américanisme sont les lignes de front de la civilisation occidentale et de la liberté dans le monde d’aujourd’hui. » Ses nominations ont été saluées par le cabinet israélien, qui y voit une carte blanche pour sa politique de génocide.
A nous d’accroître une dynamique générale en faveur de la paix, permettant d’écarter au plus vite les plus belliqueux de cette administration, dont certaines politiques sont totalement contraires au mandat donné par le peuple américain.