Les « Midterms » et la trahison de l’héritage démocrate de Roosevelt

lundi 12 novembre 2018

Contrairement à ce que beaucoup voudraient faire croire, les élections de « Midterm » du 6 novembre sonnent comme une défaite pour le Parti démocrate, et pour l’ensemble du système médiatique (y compris français) qui a inconditionnellement épousé sa cause. La vague bleue tant annoncée, qui devait enfin refermer la parenthèse Trump, n’a pas eu lieu. Pour autant, il ne s’agit que d’une demi victoire pour le président américain, et tout reste à faire pour le pousser à prendre de véritables mesures pour libérer les États-Unis du diktat de Wall Street, sortir de la logique actuelle de guerre commerciale et de guerre tout court et poser les bases d’une coopération internationale.

Les élections de mi-mandat tournent pourtant presque toujours à l’avantage de l’opposition, comme par effet mécanique. Depuis cinquante ans, seuls Clinton en 1998 et Bush en 2002 étaient parvenus à ne pas perdre des élus au Congrès. Certes, les Républicains ont perdu 30 sièges à la Chambre des représentants (députés), et les Démocrates y deviennent majoritaires ; mais ce résultat est à comparer avec la perte de 54 sièges par Clinton aux Midterms de 1994 et de 63 sièges par Obama en 2010. Surtout, les Républicains renforcent leur majorité au Sénat, et sur les onze candidats ayant reçu le soutien actif du président Trump, neuf l’ont emporté.

Les candidats démocrates se sont montrés incapables de s’élever à la hauteur des défis de notre époque, se contentant d’une campagne anti-Trump ou en défense des minorités ethniques ou sexuelles, avec des effets polarisants largement amplifiés et hystérisés par les médias. Cet échec du Parti démocrate n’est que la confirmation de la trahison du parti de Roosevelt, des frères Kennedy et de Martin Luther King, devenu aujourd’hui un repère de néocons plus virulents encore que ceux qui dominaient l’administration Bush. Ses dirigeants, à l’image d’Hillary Clinton qui se moquait en 2016 des « déplorables » lorsqu’elle évoquait les électeurs de Trump, ne font plus corps avec les « hommes et les femmes oubliés » ; et, ayant pleinement adhéré à l’idéologie de la société post-industrielle, ils n’ont opposé aucune résistance à l’intrusion du monde de la finance dans la politique économique et stratégique des États-Unis, et s’en sont même fait les collabos.

Comme le souligne le site Atlantico, « les Démocrates doivent s’encombrer de l’embarrassant bilan de Barack Obama sur la régulation financière où il a manqué à la fois une grande promesse électorale de 2008 mais aussi un momentum historique après la crise financière (…). À titre de comparaison, le plan d’ensemble imaginé par Franklin Delano Roosevelt, avait permis d’enrayer en partie la crise de 1929, mais aussi de prévenir des risques systémiques de la part des établissements bancaires avec notamment la mise en place du Glass-Steagall Act en 1933 ».

De la même manière en France, le Parti socialiste a manqué le coche en 2012-2013 lorsque, trahissant la promesse du Bourget contre « le monde de la finance », Hollande a capitulé face au lobby de la Fédération bancaire française et à leur agent Pierre Moscovici, et mis en œuvre une réforme bancaire n’opérant aucune réelle séparation entre la banque d’affaire et la banque de dépôt – contrairement à ce que Jacques Cheminade avait préconisé lors de ses entrevues avec le conseiller de l’Élysée… un certain Emmanuel Macron.

La déroute des partis censés défendre les intérêts des plus démunis, comme le Parti démocrate américain ou le PS français (et nous pourrions ajouter le SPD allemand, ou encore le Parti démocrate italien, etc), est inéluctable si ces mouvements, leurs dirigeants et leurs bases ne parviennent pas à se libérer de la matrice dans laquelle ils se sont fourvoyés depuis près de 40 ans, qui les a conduits à substituer à la question sociale – c’est-à-dire la bataille pour libérer l’ensemble des classes populaires et ouvrières du besoin matériel – un « social-libéralisme » opportuniste et un « écologisme » hypocrite qui ont fait le jeu des 10 % les plus riches de la population.

Les Démocrates sont désormais dos au mur. Soit ils renouent avec l’héritage de Roosevelt en trouvant quelques domaines où l’intérêt des populations exige une coopération trans-partisane avec Donald Trump, soit ils s’entêtent à lancer une procédure de destitution contre lui – procédure qui n’aurait aucune chance d’aboutir en l’absence d’une majorité démocrate au Sénat. De ce point de vue, il est significatif que le président ait justement proposé aux Démocrates, lors de sa conférence de presse suite aux élections du 6 novembre, de coopérer dans les domaines les moins clivants comme les infrastructures ou la politique commerciale.

Nos amis américains du Comité d’action politique de l’économiste Lyndon LaRouche (LPAC) continuent de mobiliser la population pour pousser les Républicains comme les Démocrates à revenir à leur promesse de rétablir le Glass-Steagall Act ; promesse qui figurait dans les programmes électoraux des deux partis en 2016, et qui est ensuite passée à la trappe, pour le plus grand bonheur de Wall Street.

Tout est possible désormais. De fait, Trump sort renforcé de ces élections. Le spectre de la destitution s’est éloigné, et le parti de la guerre, incrusté dans les partis républicain et démocrate, est dans les cordes. Les 30 novembre et 1er décembre, en marge du G20 à Buenos Aires, le président américain rencontrera Xi Jinping et Vladimir Poutine. L’occasion lui sera donnée d’aller plus loin dans le sens des efforts réalisés à Singapour et à Helsinki pour une détente dans les relations internationales. Un tel contexte est une chance qu’il nous faut saisir pour mettre sur la table les solutions qui nous permettront de nous libérer de la dictature financière – Glass-Steagall et nouveau Bretton Woods – et de réellement nous donner les moyens de résoudre les problèmes vitaux de l’humanité : la crise migratoire, la pauvreté et le sous-développement.