OTAN : chou blanc et Bérézina

jeudi 10 octobre 2024


Le parti de la guerre, qui attendait avec impatience la réunion du groupe de contact (dit « Ramstein ») sur la défense de l’Ukraine, le 12 octobre en Allemagne, s’est vu couper l’herbe sous le pied lorsque la Maison-Blanche a annoncé que Biden ne s’y rendrait finalement pas. Le président ukrainien Zelensky et ses parrains du complexe militaro-financier espéraient y obtenir enfin l’autorisation américaine de bombarder le territoire russe avec des missiles à longue portée. Chou blanc !

Pendant ce temps, sur le front du Donbass, la situation se transforme de plus en plus en une Bérézina pour les forces ukrainiennes, comme le montre la récente victoire russe dans la ville de Vouhledar.

Nouvelle déconvenue pour le parti de la guerre

La Maison-Blanche a annoncé mardi que le président Joe Biden n’assisterait finalement pas à la réunion du groupe de contact « Ramstein » et annulait également sa visite en Allemagne pour des réunions du 10 au 12 octobre. « Compte tenu de la trajectoire et de la force de l’ouragan Milton, le président Biden reporte son prochain voyage en Allemagne et en Angola afin de superviser les préparatifs et la réponse à cet ouragan, en plus de la réponse en cours aux impacts de l’ouragan Helene dans le sud-est », précise le communiqué de la Maison-Blanche.

Comme nous l’avions affirmé dans notre précédente chronique, le complexe militaro-financier anglo-américain misait gros sur cette réunion de Ramstein pour jeter encore de l’huile sur le feu, suite aux récentes déconvenues. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, rentré bredouille de sa rencontre avec Biden, le 26 septembre, après lui avoir demandé l’autorisation d’utiliser les missiles à longue portée pour frapper en profondeur en territoire russe, prévoyait de présenter dans son discours à Ramstein son fameux « plan pour la victoire », espérant obtenir ainsi le feu vert de ses maîtres anglo-américains. Feu vert qui, répétons-le, signifierait un basculement immédiat dans la Troisième Guerre mondiale.

Quelques heures avant la publication du communiqué de la Maison-Blanche, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a effectivement réitéré la mise en garde de Moscou d’une éventuelle réponse nucléaire si de telles frappes en profondeur étaient déclenchées. Commentant la « prochaine réunion des donateurs d’armes étrangers de Kiev », devant se tenir à Ramstein, Lavrov a expliqué sur la chaîne de télévision russe Channel One que Moscou déclencherait alors un « plan d’urgence ».

Voir sur ce site : commentaires de Ted Postol, professeur émérite du MIT

La stratégie de l’OTAN en Ukraine en pleine Bérézina

Il est fort probable que le président ukrainien ait eu ce mardi une journée difficile puisque, suite à l’annulation de la visite de Biden en Allemagne, son administration a dû annoncer que le second sommet sur la paix, que Kiev avait promis d’organiser en novembre, avait été reporté sine die.

De plus, « les emmerdes volant toujours en escadrilles », comme le disait élégamment un ancien président français, de mauvaises nouvelles parviennent du Donbass à propos des percées russes dans les lignes de front. Il faut dire que la récente victoire russe dans la ville de Vouhledar, à 50 km au sud-ouest de Donetsk, a déclenché une certaine panique en Occident, en raison des conséquences militaires d’une part, mais surtout parce que la réalité de la défaite de l’armée ukrainienne apparaît brutalement, derrière le « village de Potemkine » projeté sur les écrans des médias grand public.

Le site Web Simplicius explique que de nombreux rapports « mettent en évidence une image vraiment macabre de la situation dans les coulisses » : le commandant de la 123e brigade des Forces armées ukrainiennes, censée venir en aide à la 72e, la principale unité tenant la ville, se serait suicidé suite à la mutinerie de ses troupes. Une centaine de soldats de la 123e se sont ainsi rendus dans la ville de Voznessensk, dans l’Oblast de Mykolaïv, pour protester contre leur manque d’entraînement et d’armes. Simplicius donne également une vue d’ensemble de l’effondrement du front du Donbass, illustrant en quelques cartes les avancées russes depuis le 1er juillet.

Cette Bérézina est telle que les médias occidentaux sont désormais obligés de l’admettre. Déjà, le 30 septembre, le magazine britannique The Economist titrait « Pourquoi c’est une période critique pour l’Ukraine », reconnaissant que « l’Ukraine et ses soutiens occidentaux sont en train de perdre la guerre avec la Russie ».

Le 2 octobre, le Washington Post écrivait que « l’Est de l’Ukraine ploie sous l’amélioration de la puissance de feu supérieure des tactiques russes ». Enfin, titrant carrément « Admettre le désastre », le Financial Times du 4 octobre proposait un plan impliquant l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, sans garantie de sécurité de la part de l’Organisation atlantique sur les zones conquises par la Russie. Le quotidien londonien fait référence au modèle de l’Allemagne de l’Ouest, qui avait rejoint l’OTAN en 1956, sous-entendant que le Donbass pourrait obtenir un statut équivalant à celui de la RDA.

Une proposition évidemment inacceptable pour Moscou, puisque la raison d’être du conflit actuel est justement la garantie pour la Russie qu’aucune base avancée de l’OTAN ne s’installe à ses frontières.

Voir sur ce site : entretien avec l’ancien ambassadeur américain Jack Matlock

Rappelons ici que cette guerre, dans laquelle les Ukrainiens se font abattre par milliers comme de la chair à canon, au grand bénéfice des marchands d’armes occidentaux, aurait pu être évitée si, dès le début du conflit, en 2022, on avait empêché les néoconservateurs de l’OTAN de saboter les négociations diplomatiques qui auraient pu garantir à la fois les intérêts nationaux de la Russie et la souveraineté de l’Ukraine, dès lors que celle-ci écartait définitivement toute intention d’adhérer à l’OTAN.

Il est grand temps de remettre à l’ordre du jour ces négociations de paix et de les faire aboutir, comme l’exige l’Institut Schiller d’Helga Zepp-LaRouche, dans le cadre d’une nouvelle architecture de sécurité et de développement mutuel.

Emmanuel Macron, qui reçoit le président Zelensky ce jeudi, devrait faire l’effort de s’y atteler, au lieu de persister dans le fantasme d’une défense européenne sous sa direction pour faire bloc face au reste du monde.