Revue de livre

Contre l’écologisme — Pour une croissance au service de l’environnement

mercredi 29 mars 2023, par Tribune Libre

Contre l’écologisme - Pour une croissance au service de l’environnement

Bruno Durieux,
Editions de Fallois, 2019, Paris.
18,50 €.

Dans son ouvrage, Bruno Durieux, va à l’encontre de la plupart « d’écologistes » pour qui « la décroissance » est la seule façon de combattre la pollution et les sources de CO2 dans notre planète. Est-il pour autant anti-malthusien ?

par Vincent Crousier.

Bruno Durieux fut conseiller de Raymond Barre, ancien député et ancien ministre de la Santé (1990-1992). Il est aujourd’hui maire de Grignan dans la Drôme.

Dans « Contre l’écologisme » il affirme à juste titre que

les ressources que l’homme peut tirer de la planète pour ses besoins sont illimitées. Professer l’épuisement, c’est en fait fixer une limite à l’intelligence humaine et lui dénier les capacités d’innovation et d’adaptation qui l’ont conduit à son niveau de connaissance et de développement présents.

 
Puis, il conclut :

Seule la croissance économique, condition du développement des nouvelles technologies, permettra de s’adapter au réchauffement et si possible de le maîtriser. On surmontera la crise climatique non par le rationnement et la décroissance mais par l’amélioration de la productivité énergétique […] ce qui implique de restaurer et moderniser le nucléaire.

En fermant un instant les yeux sur le prétexte climatique, le lecteur pourrait se dire qu’il retrouve là les ingrédients du projet de Solidarité & Progrès : il n’y a aucune limite à la créativité humaine ; l’élévation du niveau de vie, rendue possible par l’application sous forme technologique (centrales à neutrons rapides [l’auteur les évoque, NDLR]) des découvertes scientifiques (le nucléaire), rendra possible la justice sociale (salaires élevés, financement de la Sécu…).

Si on suivait le raisonnement de l’auteur, il semblerait qu’il n’y aurait qu’un pas à franchir entre la prise en compte des capacités créatrices humaines illimitées et les écrits d’un Krafft Ericke, ingénieur en propulsion américain, qui disait en novembre 1957 dans la revue Astronautics de l’American Rocket Society :

Le concept de voyage spatial comporte d’énormes répercussions, parce qu’il met l’homme au défi sur pratiquement tous les fronts de son existence physique et spirituelle. L’idée de voyager vers d’autres corps célestes reflète au plus haut degré l’indépendance et l’agilité de l’esprit humain. Elle donne une ultime dignité aux efforts techniques et scientifiques de l’homme. Par dessus tout, elle touche à la philosophie de son existence même.

Que dit l’auteur sur ce terrain ?

Les ressources de la planète sont inépuisables, à une exception près : l’espace que l’homme occupe sur terre ; il n’est pas extensible mais il est gigantesque ; il est très loin d’être saturé.[…]. Quant à la démographie mondiale, là aussi, on constate déjà que des régulations naturelles sont à l’œuvre qui conduiront à la stabilisation puis la baisse de la population du globe avant la fin de ce siècle.

Après avoir pris acte que l’humanité a finalement su traverser les mers, créer de l’acier – ce matériau n’existe pas sur Terre à l’état naturel – découvrir puis maîtriser l’atome, bref, autant de frontières sensées être infranchissables pour les écologistes de jadis, l’auteur décrète soudain que l’homme doit rester dans son berceau : la terre. Il en veut pour preuve des « régulations naturelles », alors qu’on s’aperçoit qu’avec chaque révolution technologique, qui permet à l’homme de produire plus, avec moins d’effort et de matière, la démographie a une tendance naturelle à croître (voir graphique).

Par ailleurs, la hausse ou la baisse de la natalité relèvent aussi de décisions politiques, donc qui n’ont rien à voir avec la nature mais qui sont bel et bien « humaines ».

C’est dommage. Malgré quelques passages prometteurs où il dénonce les écologistes comme les « enfants gâtés de la prospérité » ou bien fait la part belle aux potentiels de la créativité humaine et des découvertes technologiques, l’auteur semble retenu par la manche par un malthusianisme qu’il prend pourtant soin de dénoncer.