Silicon Valley Bank (SVB) — En faillite à cause... de sa bonne gestion

vendredi 17 mars 2023, par Karel Vereycken

Sur le site de l’Institut Von Mises, école de pensée économique dont nous combattons l’idéologie anti-étatique excessive, l’économiste David Lacalle offre cependant une analyse décapante du déroulé des événements ayant conduit à la faillite de la Silicon Valley Bank (SVB).

Dans son décryptage, Lacalle démontre ce que l’économiste américain Lyndon LaRouche et Jacques Cheminade en France n’ont cessé de mettre en lumière depuis quarante ans : ce n’est pas la bonne ou mauvaise gestion de telle ou telle banque qui pose le plus grand danger, mais la folie de tout un système qui porte en lui la faillite comme les nuages portent l’orage.

En réalité, la SVB a été très bien gérée. Elle a appliqué scrupuleusement les meilleurs conseils et régulations. C’est précisément pour cela qu’elle n’existe plus et que d’autres tomberont.

Si pour David Lacalle, c’est la surdose de régulation et d’interventionnisme étatique qu’il faut combattre, pour S&P, c’est l’absence d’un vrai Glass-Steagall et d’une vraie banque nationale au service de l’économie réelle qui font gravement défaut, aussi bien aux Etats-Unis qu’ailleurs.

Merci de signer l’appel de l’Institut Schiller dans ce sens.

Extraits :

Comment l’argent facile a tué la Silicon Valley Bank

Par Daniel Lacalle.

Source : Mises Institute
Traduction française : Contrepoints

Extraits :

(...)

La faillite de la Silicon Valley Bank (SVB) est le résultat d’un bank run classique provoqué par un problème de liquidité mais la leçon importante pour tout le monde est que l’énormité des pertes non réalisées et le trou financier dans les comptes de la banque n’auraient pas existé s’il n’y avait pas eu une politique monétaire ultra-accommodante. Permettez-moi d’expliquer pourquoi.

Au 31 décembre 2022, la Silicon Valley Bank disposait d’un total d’actifs d’environ 209 milliards de dollars et d’un total de dépôts d’environ 175,4 milliards de dollars, selon ses comptes publics. Ses principaux actionnaires sont Vanguard Group (11,3 %), BlackRock (8,1 %), StateStreet (5,2 %) et le fonds de pension suédois Alecta (4,5 %).

La croissance et le succès incroyables de SVB n’auraient pas pu se produire sans les taux négatifs, la politique monétaire ultra-accommodante et la bulle technologique qui a éclaté en 2022. En outre, l’épisode de liquidité de la banque n’aurait pas pu se produire sans les incitations réglementaires et monétaires à accumuler de la dette souveraine et des titres adossés à des créances hypothécaires (MBS).

(...) SVB a commis une grave erreur : suivre exactement les incitations créées par la politique monétaire accommodante et la réglementation.

Que s’est-il passé en 2021 ? Un succès massif qui, malheureusement, a aussi été le premier pas vers la disparition. Les dépôts de la banque ont presque doublé avec le boom technologique. Tout le monde voulait une part du nouveau paradigme technologique imparable. Les actifs de la SVB ont également augmenté et presque doublé.

La valeur des actifs de la banque a augmenté. Plus de 40 % étaient des bons du Trésor et des titres adossés à des créances hypothécaires à long terme. (...) La SVB suivait les règles habituelles : des actifs à faible risque pour équilibrer des investissements en capital-risque. Lorsque la Réserve fédérale a relevé les taux d’intérêt, la SVB a dû être choquée.

L’ensemble de ses actifs reposait sur un seul pari : des taux bas et un assouplissement quantitatif pour plus longtemps. Les valorisations des entreprises technologiques ont grimpé en flèche pendant la période de relâchement de la politique monétaire, et la meilleure façon de couvrir ce risque était de miser sur les bons du Trésor et les titres adossés à des créances hypothécaires.

Pourquoi parier sur autre chose ? C’est ce que la Fed achetait par milliards chaque mois. Il s’agissait des actifs les moins risqués selon toutes les réglementations et selon la Fed et tous les économistes traditionnels, l’inflation était purement « transitoire », une anecdote à effet de base. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?

(...) Les hausses de taux ont eu lieu. Et la banque s’est retrouvée avec des pertes massives partout. Adieu, les prix des obligations et des titres adossés à des créances hypothécaires. Adieu, les valorisations technologiques du « nouveau paradigme ».

Et bonjour la panique. Une bonne vieille ruée sur les banques, malgré la forte reprise des actions SVB en janvier. Les pertes non réalisées, évaluées à 15 milliards de dollars, représentaient presque 100 % de la capitalisation boursière de la banque. La déroute.

Comme le dit le directeur de la banque dans le célèbre épisode de South Park : « Aaaaand it’s gone ». La SVB a montré à quelle vitesse le capital d’une banque peut se dissoudre sous nos yeux.

(...) La SVB était l’exemple type de la gestion bancaire dans les règles de l’art. Elle a suivi une politique conservatrice consistant à acquérir les actifs les plus sûrs – les bons du Trésor à long terme – alors que les dépôts augmentaient.

La SVB a fait exactement ce que recommandaient ceux qui ont attribué la crise de 2008 à la « déréglementation ». La SVB était une banque ennuyeuse et conservatrice qui investissait ses dépôts croissants dans des obligations souveraines et des titres adossés à des créances hypothécaires, croyant que l’inflation était transitoire, comme tout le monde le répétait, sauf nous, la minorité de fous.

La SVB n’a fait que suivre point par point la réglementation, les incitations de la politique monétaire et les recommandations des économistes keynésiens. La SVB était l’exemple même de la pensée économique dominante. Et le courant dominant a tué la star de la tech.

(...) Dans le cas de SVB, sa croissance phénoménale en 2021 est une conséquence directe de la politique monétaire démente mise en œuvre en 2020, lorsque les grandes banques centrales ont porté leur bilan à 20 000 milliards de dollars comme si de rien n’était.

La SVB est une victime de l’idée selon laquelle l’impression monétaire n’entraîne pas d’inflation et peut se poursuivre à l’infini. Ils y ont adhéré sans réserve, et aujourd’hui ils ont disparu.

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