Agriculture locale contre famine mondiale

mercredi 14 avril 2021, par Tribune Libre

Intervention de Mike Callicrate, éleveur du Colarado, USA, lors de la visioconférence de l’Institut Schiller des 20 et 21 mars 2020 sur le thème : « Deux mois après l’investiture de Biden, le monde à la croisée du chemin. » Pour voir le programme complet et accéder aux liens vers les différents discours, cliquez ICI.

Revenir à une agriculture de proximité

Mike Callicrate,
éleveur du Colorado, USA.

Bonjour, je m’appelle Mike Callicrate. Je vous parle depuis Colorado Springs, dans mon exploitation d’élevage dénommée « Ranch Foods Direct ».

Je voulais parler de la faim et de la pauvreté dans le monde, et discuter un peu du type de système alimentaire qui servira le mieux les intérêts de l’humanité.

A mon sens, cela ne se résorbera pas avec la monoculture hautement concentrée, planifiée de façon centralisée par une poignée de grandes entreprises.

Ce ne sera pas l’exploitation exacerbée des sols, comme dans le cas d’opérations d’extraction minière, car ces opérations n’ont qu’une durée de vie très courte dans le cours de l’existence humaine. Ce n’est pas la technologie qui nous sauvera et nous nourrira dans le futur.

Nous aurons davantage d’individus impliquées dans la production alimentaire. Ils produiront une vraie alimentation, et non des matières à transformer en produits qui, honnêtement, ne sont pas bons pour notre santé.

La question est donc de savoir si l’humanité va prospérer ou périr. Or, depuis la Covid-19, qu’avons-nous, et que devons-nous faire pour aller de l’avant ?

Plus de personnes pourraient mourir de faim que du coronavirus cette année, nous dit l’ONG Oxfam.

Le virus a tué beaucoup de gens, il a bouleversé nos économies, il a montré à quel point nous sommes vulnérables, avec un système alimentaire industriel utilisant des chaînes d’approvisionnement qui s’effondrent dès que survient une épidémie comme celle de la Covid-19.

Alors, qu’est-ce qui répondrait mieux à nos besoins ? Je dirais qu’un système plus décentralisé servirait certainement mieux notre système ; une approche plus locale, régionale, servirait mieux notre système alimentaire et les citoyens du monde entier.

L’appauvrissement et la malnutrition d’une civilisation sont directement corrélés à la consolidation et à l’industrialisation de l’approvisionnement alimentaire. Nous l’avons vu aux États-Unis, avec tous les rayons vides dans les supermarchés pendant l’épidémie de Covid-19. Les ruptures de la chaîne d’approvisionnement, la vulnérabilité.

Nous ne pouvons tout simplement pas revenir à ce système. Les petites usines comme la mienne ont été en mesure de produire quatre fois plus que l’année précédente, parce que nos travailleurs se sont surpassés et ont travaillé plus dur et plus longtemps.

De plus, nous ne manquions pas de bétail pour notre chaîne d’approvisionnement et j’ai pu simplement augmenter l’abattage afin de mettre plus de viande en rayon et prendre soin de nos collectivités – contrairement à tous les grands transformateurs de viande, dont les systèmes ont tous échoué, ainsi que leurs partenaires détaillants et les entreprises de restauration. Ils ont tous échoué à répondre aux besoins de l’humanité pendant cette crise de la Covid-19.

La concentration du pouvoir et de la richesse est la plus grande menace pour toute société libre. Ainsi, tout ce que nous ferons à l’avenir pour nourrir le monde devra, selon moi, impliquer les infrastructures alimentaires locales et régionales.

Ce qui menace un système alimentaire concentré, c’est le local : la nourriture locale et les gens qui se nourrissent à partir de leur propre terroir.

Le modèle que nous avons eu ces 50 dernières années, le modèle industriel, a ravagé nos sols. C’est une véritable opération minière. Il extorque la richesse d’un sol sain, il détruit notre terre pour le bénéfice à court terme de quelques grandes entreprises mondiales. Nous devons nous attaquer aux grandes entreprises mondiales et à leur pouvoir monopolistique sur notre approvisionnement alimentaire.

Tempête de poussière au Colorado.

Regardez la perte de terres, l’érosion provoquée par l’abandon des sols. Franklin Roosevelt a dit qu’une nation qui détruit ses sols se détruit elle-même.

Ci-contre une photo que j’ai prise à partir du ciel le 24 décembre 2013. Ce nuage de poussière faisait 200 miles de long, de Colorado Springs à la frontière du Kansas. Il mesurait 12 500 pieds de haut, plus de 4 miles de diamètre et se déplaçait vers le sud à 50 miles par heure.

Cela vient de l’érosion des sols à l’est du Colorado. Avec elle arrive la perte de notre capacité à nous nourrir. Vu du ciel, la blancheur du sol révèle l’érosion du sol dans l’est du Colorado. C’est une terre qui a été laissée à l’abandon et au vent pendant des générations et des décennies.

Aujourd’hui, il est impossible d’y faire pousser de la nourriture sans engrais chimiques. Seul le retour du cheptel, et du fumier, peuvent guérir cette terre. Mais pour que les bêtes reviennent sur ces terres, il faut déjà que les gens acceptent d’y retournent.

Nous devons donc relocaliser, régionaliser et démembrer les monopoles et les prédateurs sur le marché, afin de permettre aux nouvelles infrastructures de faire le boulot et de répondre à nos besoins. Je pense que la solution à la pauvreté et à la faim consiste à casser les monopoles, tout en construisant une infrastructure alimentaire locale et régionale autour des communes, à partir d’un sol sain.

Quatre livres qui plaident pour le démembrement des grands cartels agro-alimentaires.

Voici quatre livres que, je l’espère, beaucoup d’entre vous liront, et que vous soutiendrez les lois, les politiques qui brisent les monopoles et défendent les entreprises indépendantes. Laisser les gens du monde entier se nourrir à partir de leurs propres terres.

Cela nécessitera des changements politiques majeurs, pour retirer le contrôle de la terre aux grands propriétaires des temps modernes, et redonner aux gens la charge de leur propre infrastructure alimentaire et de leur capacité à se nourrir eux-mêmes.

Voilà le modèle d’agriculture et d’élevage régénérateur Callicrate. Remarquez qu’il s’agit d’un modèle circulaire qui va du sol au sol. Des sols sains font des personnes saines et des communautés saines. Le système actuel fonctionne comme un système d’extraction minière. Nous devons nous en débarrasser et le remplacer par ce système d’agriculture et d’élevage plus régénérateur.

Vous pouvez aller sur le site mycallicrate.com et consulter mon blog pour découvrir nos autres réalisations.

Merci de m’avoir donné l’occasion pour m’exprimer ici.

Merci.