Avec le futur parquet européen, serons-nous tous des « Lula » ?

mardi 10 septembre 2019

Chronique stratégique du 10 septembre 2019 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

Saviez-vous qu’à Bruxelles, on nous prépare un « parquet européen » supranational pour fin 2020 ? Cette structure sensée lutter contre la corruption sera dotée de pouvoirs d’enquête hors-norme, court-circuitant les systèmes judiciaires des différents États européens. Un outil parfait pour mener les pires chasses aux sorcières, d’autant plus que Laura Kövesi, la juge roumaine qui devrait en prendre la tête, s’inspire directement des méthodes du FBI.

Suite à la publication d’un article sur le blog indépendant romania2118.org, nous avons décidé de vous apporter notre point de vue sur ce sujet très préoccupant.

Un monstre juridique

Pensé pour la première fois dans le très peu démocratique Traité de Lisbonne de 2009, puis voté en octobre 2017 par 20 membres de l’UE (8 membres l’ayant rejeté, en partie par refus de ce nouveau transfert de souveraineté), le futur parquet européen doit entrer en fonction fin 2020 ; il sera chargé de lutter contre les atteintes aux intérêts financiers de l’Union.

Tandis que certains, à l’image de l’ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, y voient un moyen de concurrencer l’arsenal judiciaire extraterritorial américain, d’autres s’inquiètent de ce « monstre juridique » que l’UE s’apprête à engendrer. Dans un article paru le 19 août, Le Monde explique que le futur procureur « sera doté par la loi organique de pouvoirs hors normes. Côté outils d’enquête, il pourra ordonner des écoutes téléphoniques, une géolocalisation, des captations d’images ou de données de communications, et des perquisitions après autorisation du juge des libertés et de détention ».

Les récentes élections européennes ont ouvert la voie à la Roumaine Laura Codruta Kövesi pour prendre la tête de ce nouveau parquet. Avec la nomination de la française Christine Lagarde à la BCE, Emmanuel Macron a retiré son soutien au candidat français, Jean-François Bohnert. Ce retrait français au profit de la Roumaine a été vendu dans les médias européens comme une faveur faite aux pays de l’Est, en dépit du fait que la Roumanie elle-même ne soutient pas la candidate !

En effet, comme l’écrit Alexandra Bellea sur romania2118.org, « l’ex-procureure générale et ex-cheffe de la Direction nationale anti-corruption (DNA) en Roumanie est devenue une véritable icône dans l’Occident alors qu’à l’Est sa réputation est moins immaculée ».

Kövesi, sous influence du FBI de Robert Mueller

Il faut dire que Laura Kövesi a mené durant des années une chasse aux sorcières qui a fait des ravages dans les milieux politiques et judiciaires roumains, et qui renvoie aux heures sombres de la « Securitate » de l’ère soviétique. Elle a reçu pour cela le patronage du tristement célèbre Robert Mueller, qui dirigeait à l’époque le FBI (ce qui devrait suffire pour doucher les fantasmes de Cazeneuve et consorts).

Rappelons que Mueller, en tant que « procureur spécial », a dirigé pendant deux ans l’enquête sur le prétendu « Russiagate » (l’accusation selon laquelle le Kremlin aurait manipulé les élections présidentielles de 2016 de façon à placer Donald Trump à la Maison-Blanche). Comme on le sait, cette enquête s’est effondrée, mettant en lumière une opération de nature politique – favoriser les opposants démocrates de Trump – et géopolitique – empêcher toute détente américano-russe. Mueller a également joué un rôle de premier plan, lorsqu’il était à la tête du FBI, pour faire obstruction à l’enquête du Congrès américain sur l’implication de l’Arabie Saoudite dans les attentats du 11 septembre 2001. Le New York Post vient justement de publier un article à ce sujet. Enfin, last but not least, Mueller fut dans les années 1980 au cœur du cabinet noir contre l’économiste américain Lyndon LaRouche et son mouvement (Lire notre chronique du 29 septembre 2017, Les trois crimes du procureur très spécial Robert Mueller).

Laura Kövesi a été nommée en 2006 Procureure générale par le très atlantiste président Traian Basescu. Très vite, Robert Mueller la prend sous son aile, l’aidant à importer en Roumanie les méthodes éprouvées du FBI en matière de collaboration entre les services secrets et la Justice. Lors de sa rencontre avec Kövesi et le chef des services secrets roumains (SRI), évoquée par un rapport secret de l’ambassadeur américain à Bucarest fuité par Wikileaks, le chef du FBI proposa de mettre en place de nouveaux outils s’appuyant sur l’infiltration d’agents dans l’appareil juridique, notamment pour monter des dossiers contre des personnes afin de les amener à « coopérer » en échange de la révocation de leur procès. L’objectif étant, comme cela fut évoqué lors de la rencontre, non seulement de combattre le crime organisé et le terrorisme, mais aussi de « contrer l’influence russe ».

Chasse aux sorcières

Le rejet en 2009 par la Cour Constitutionnelle du protocole signé par Kövesi en faveur d’une collaboration entre le SRI et le Parquet, n’a pas empêché la jeune procureure, devenue ensuite cheffe de la DNA, de monter une redoutable machine judiciaire qui lui permis, à l’aide des « dossiers » du SRI, de traquer et de lyncher des centaines de personnalités sur la place publique, à grands renforts des médias.

Entre 2014 et 2018, plus de 3000 magistrats ont été placés sous enquête de la DNA, ainsi que des dizaines de maires, des présidents de département, un vice-premier ministre. Tous furent blanchis par la suite. Faisant fi de la présomption d’innocence, les dossiers montés par le SRI ont servis à provoquer la chute d’un premier ministre, un juge de la Cour constitutionnelle, un vice-président du Conseil supérieur de la magistrature, quatre juges de la Cour suprême, plusieurs juges des instances supérieures, un procureur général, etc.

Les pratiques d’écoutes téléphoniques ont explosé, avec en moyenne 20 000 par an dans le cadre des enquêtes anticorruption, soit dix fois plus que le nombre d’écoutes menées pour des raisons de sécurité nationale, pour un coût de 141 milliards d’euros entre 2005 et 2016. Selon Victoria Stoiciu de la Fondation Friedrich-Ebert, les cours roumaines ont accordé 16 fois plus de mandats d’écoute qu’aux États-Unis.

Kövesi a été révoquée de son poste en 2018 par le ministre de la Justice, après que la Cour Constitutionnelle a jugé que ses équipes avaient violé le principe de séparation des pouvoirs en enquêtant sur une ordonnance gouvernementale visant à changer les lois de la justice. Le 28 mars 2019, elle a été inculpée pour corruption par la justice roumaine. Suite aux pressions de l’UE, la Haute cour de Cassation et de Justice a allégé son contrôle judiciaire, pour lui permettre de sortir du pays et défendre sa candidature pour le futur parquet européen.

La France doit dire « non » !

En France, ainsi que dans l’ensemble des pays de l’UE, un silence complice entoure la nomination de Kövesi. Ceux qui s’étaient indignés face aux révélations d’Edward Snowden sur les écoutes de la NSA sont aux abonnés absents. Jean-Luc Mélenchon, qui vient de se payer un voyage au Brésil pour soutenir Lula contre l’opération « Lava jato », n’a pas dit un mot. Comme l’ensemble de la classe politique française, d’ailleurs.

Mettons cela sur le compte de l’ignorance, et battons-nous pour faire connaître la vérité. Il est encore temps pour la France de dire « non » à la candidature de Kövesi. Elle doit également s’opposer à la mise en place de ce parquet supranational. La justice des États ne doit pas être soumise à une bureaucratie supranationale, d’autant plus si celle-ci est manipulée par les milieux les plus crapuleux de « l’État profond » américain…

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