La Banque de France nous répond : la planche à billets = inflation

jeudi 31 janvier 2019, par Karel Vereycken

Enfin un grand débat sur la « planche à billets »

Alors qu’il est fort compliqué de pouvoir s’entretenir de viva voce avec des hauts responsables de la Banque de France, il est intéressant de noter qu’elle vient de publier un communiqué en date du 23 janvier 2019 (ci-dessous), visant à dissiper « la rumeur persistante », véhiculée entre autres par les Gilets jaunes, que jusqu’à 1973, l’Etat pouvait, grâce à « la planche à billets » s’autofinancer à faible coût et éviter de s’endetter auprès des banques privées.

Si le communiqué confirme les précisions apportées par Jacques Cheminade à un article du Monde du 13 décembre 2018 consacré au même sujet, Solidarité & Progrès, depuis quarante ans en campagne pour un retour du « crédit productif public », en conteste l’argument de fond.

Car cette « planche à billets », que la BdF voit comme source fatale d’inflation, existe de toute façon. A cette différence près que depuis 1993, elle n’est plus aux mains du peuple, mais aux mains d’une cabale de faux-monnayeurs se goinfrant avec la spéculation folle qu’elle alimente.

Et lorsque l’hyperinflation cantonnée jusqu’ici dans les bulles financières descendra brutalement dans le système financier du quotidien, on assistera à ce que Jacques Attali appela un jour un « Weimar planétaire ».

Pourquoi il faut Re-nationaliser la Banque de France, lire nos pages spéciales.

Communiqué de la Banque de France
23 janvier 2019
Source : BdF

La loi de 1973 sur la Banque de France – La limitation des avances au Trésor

Une rumeur persistante affirme que la loi du 3 janvier 1973 sur la Banque de France aurait interdit les prêts directs de la Banque de France à l’État (« les avances au Trésor »). Faute de pouvoir financer les déficits publics par la Banque de France, le Trésor aurait alors été contraint de recourir aux marchés financiers, aggravant ainsi le coût de la dette publique.

Il est erroné de lier l’abandon des avances au Trésor à la loi de 1973, puisque les prêts directs de la Banque de France à l’État n’ont été interdits en France qu’en 1993. La loi de 1973 n’a pas mis fin aux avances de la Banque de France au Trésor, elle a renforcé leur encadrement. Cet encadrement existait en pratique depuis le 19ème siècle et figurait aussi dans les statuts de la Banque de France en 1936. La loi de 1973 a eu le mérite de rassembler, simplifier et moderniser des pratiques déjà fortement encadrées.

La limitation des avances au Trésor a connu deux exceptions au 20ème siècle, lors des deux guerres mondiales, et cela a conduit à une inflation supérieure à 30 % par an en moyenne. Après les deux guerres, la réduction des avances est devenue une priorité politique pour stabiliser l’inflation et leur montant a été ramené progressivement à un niveau inférieur à 10 % de la dette publique. En 1993, au moment de leur suppression, le montant des avances représentait ainsi à peine 3 % de la dette publique. Par conséquent, les avances de la Banque de France à l’État n’ont jamais été, et ne pourraient jamais être, à la mesure du financement de la dette.

Pourquoi donc cet encadrement très strict et depuis longtemps ? Partout dans les économies avancées existe cette interdiction du financement des États par « la planche à billets ». L’expérience unanime montre que, là où il n’y a pas une très stricte limitation de ces avances au Trésor, il y a un risque d’inflation élevée. Aujourd’hui, l’ensemble des économies avancées, y compris l’Amérique de M. Trump, y compris la Grande-Bretagne dans la perspective du Brexit, ont les mêmes règles du jeu. A l’inverse, historiquement l’Allemagne des années 1920 ou plus récemment certains pays en développement (Zimbabwe ou Ghana) illustrent les grands méfaits du recours à la « planche à billets » pour financer les déficits publics. Cette interdiction est donc liée à la sagesse de la politique monétaire et à la prévention d’une inflation trop élevée qui pénaliserait le pouvoir d’achat.