Entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, qui tient la laisse ?

vendredi 19 octobre 2018

En dépit du silence total de nos médias à ce sujet, une affaire est sur le point, de l’autre côté de l’Atlantique, d’éclater en pleine lumière et de devenir ce qui restera probablement comme le plus grand scandale de l’histoire des États-Unis. Il s’agit du mal nommé « Russiagate », autrement dit la prétendue collusion entre la campagne de Trump et la Russie de Poutine dans les élections de 2016, et qui apparaît chaque jour un peu plus pour ce qu’il est réellement, c’est-à-dire une collusion entre les services de renseignement de l’administration Obama et les services britanniques – d’un côté le FBI, la CIA et le Département de la Justice (DOJ), et de l’autre le MI6 et le GCHQ (équivalent britannique de la NSA).

L’enjeu n’est rien d’autre que la paix mondiale. Car, du fait que les États-Unis parviendront enfin à se libérer de la matrice géopolitique de guerre, incarnée par la « relation spéciale » avec son ancien maître colonial, dépend la capacité de la présidence américaine à replacer les relations avec la Russie et la Chine sur la voie de l’entente et de la coopération, et d’éviter un conflit, y compris nucléaire, que la politique néoconservatrice des deux précédentes administrations américaines a préparé, étape par étape.

Une main pas si invisible

Lors d’une interview diffusée le 15 octobre sur WMAL, en audience la 5e radio de Washington D.C, Joseph diGenova, ancien procureur du disctrict de Washington DC, est revenu sur l’implication des services secrets britanniques dans le montage du Russiagate. Faisant référence aux récentes pressions exercées par les gouvernements britanniques et australiens sur l’administration Trump pour la dissuader de déclassifier les documents du FBI et du DOJ relatifs à cette affaire (lire « Russiagate » : Trump veut tirer la queue du diable britannique), diGenova a estimé que « les Britanniques ont peur, (…) car le MI6 a espionné de façon illégale des citoyens américains, à la demande du FBI et de la CIA de John Brennan [un proche d’Obama, Ndlr] ».

« C’est un grave problème, a-t-il poursuivit. On évoque souvent la surveillance de masse. Mais s’il s’agit de travailler avec des gouvernements étrangers – comprenez ‘de connivence’ – pour espionner un citoyen américain, alors on entre sur un terrain complètement différent. Cela implique une énorme responsabilité pénale de la part des services de renseignement américains, et en particulier de John Brennan. Brennan s’est lui-même rendu à Londres pour consulter le MI6 et le GCHQ ».

Selon diGenova, Donald Trump se trouve actuellement en position de force. Il sait que l’enquête du procureur spécial Robert Mueller sur le Russiagate est au point mort en raison de cette collusion avec les services britanniques et, bien qu’il semble pour l’instant avoir cédé aux pressions du Royaume-Uni et de l’Australie, il peut décider à tout moment de procéder à la déclassification des documents. Ses ennemis le savent parfaitement. Ces documents, comme nous l’avons écrit dans nos précédentes chroniques, démontreront que Stefan Halper, un bi-national américain et britannique et agent sous couverture du FBI et du MI6, a tendu un piège à George Papadopoulos et Carter Page, deux membres subalternes de l’équipe de campagne de Trump, dans le but d’obtenir de façon frauduleuse des mandats d’écoute auprès de la cour FISA. Il sera alors établi que le MI6 et le GCHQ ont effectivement pratiqué un espionnage totalement illégal aux États-Unis. « C’est bien pire que le Watergate ! », s’est exclamé diGenova.

« American money and british brains »

Le fil de l’ingérence par le MI6 et le GCHQ dans les élections américaines pourrait bien dérouler l’énorme pelote de la stratégie britannique de subversion des États-Unis, qui remonte bien au-delà de 2016. Dans l’ensemble de la classe politique américaine, seul Lyndon LaRouche, économiste et homme politique américain, a eu le courage de la dénoncer et de la combattre depuis l’assassinat des frères Kennedy et de Martin Luther King. Pour cela, il a été mis à l’index et pris pour cible par un véritable « cabinet noir » au sein du ministère de la Justice, qui s’est appuyé sur une vaste campagne de calomnies pour lancer contre lui en 1988 une procédure judiciaire digne de l’époque stalinienne. Or, chose notable, l’on retrouve, au cœur de cette opération contre LaRouche, celui qui mène actuellement la croisade contre la présidence Trump, Robert Mueller, et qui était à l’époque adjoint au procureur de Boston (Lire Les trois crimes du procureur très spécial Robert Mueller).

Aujourd’hui, les langues se délient. James George Jatras, ancien diplomate et conseiller de la direction républicaine du Sénat, a publié le 13 octobre une analyse percutante appelant à mettre fin à « la vaste campagne coordonnée, mêlant guerre psychologique et politique, conduite non pas par la Russie mais contre elle, et concoctée par le Royaume-Uni et ses collaborateurs de ’l’État profond’ aux États-Unis ».

Intitulé « Entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, qui tient la laisse ? », l’article est paru dans le Journal of the Strategic Culture Foundation, repris ensuite par Zero Hedge. « En surface, le Royaume-Uni semble n’être qu’un État vassal parmi d’autres, comme l’Allemagne, le Japon ou la Corée du Sud », écrit Jatras. Mais cette perception est erronée, selon lui. À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, rappelle l’ancien diplomate, si l’élite britannique voulut bien admettre que l’Amérique était effectivement devenue la principale puissance économique et militaire mondiale, il n’était pas question pour elle de perdre la main  : « Il est vrai qu’ils ont l’argent, mais c’est nous qui avons les cerveaux », avait murmuré Lord Halifax à l’oreille de John Meynard Keynes, à Washington. Par la suite, des liens très étroits furent tissés entre les services secrets des deux pays, qui s’efforcent aujourd’hui d’envenimer les relations entre les États-Unis et la Russie, contre la volonté exprimée par le président Trump.

Jatras conclut : « Depuis bien trop longtemps, en grande partie pour des raisons d’inertie historique et de corruption des élites, nous avons laissé le gouvernement [britannique] exercer sur notre politique internationale une influence indue qui ne sert pas nos intérêts nationaux ». Désormais, ce même gouvernement, « en employant toutes les ruses ignobles qui lui ont valu le surnom de ’perfide Albion’, cherche à nous entraîner dans une querelle avec le seul pays de la planète en mesure de nous détruire ».

« Il faut que ça cesse. On doit impérativement procéder à une réévaluation complète de notre ’relation spéciale’ avec le Royaume-Uni et faire la lumière sur ses activités au détriment des États-Unis ».

Les élections de mi-mandat, qui se dérouleront le 6 novembre prochain, seront déterminantes selon qu’elles renforceront ou affaibliront la présidence. Un Donald Trump destitué, ou simplement placé sous la menace d’une destitution par un Congrès passé du côté démocrate, mettrait le monde dans la voie d’une escalade tragique entre d’un côté les États-Unis et de l’autre la Russie et la Chine.