Chine-Afrique : pas de limites à la croissance !

mercredi 29 août 2018

Les 3 et 4 septembre se tiendra à Beijing le grand sommet du FOCAC (Forum pour l’organisation de la coopération sino-africaine), où seront représentées les 54 nations africaines. Et quel contraste d’état d’esprit avec celui que nous connaissons en Europe ! Dans tous ces pays, qui s’engagent dans la construction des Nouvelles Routes de la soie, on réalise que le temps est venu d’en finir avec le colonialisme occidental, et un optimisme se répand partout sur la capacité des hommes à coopérer et à progresser ensemble.

Chez nous, la loi de l’austérité règne partout, et les esprits ont été conditionnés (même ceux qui combattent cette politique) à raisonner dans un monde fini et à penser qu’il n’y aura de toute façon pas assez pour tout le monde.

Et, pendant que les infrastructures continuent de dépérir pour cause de sous-investissements chroniques, créant les conditions des prochaines tragédies du type du viaduc de Gênes, le gouvernement Macron-Philippe – accroché comme une moule au rocher du néolibéralisme – prépare une nouvelle phase de « garrot » social. Ainsi, les prestations familiales, pensions de retraites, aides au logement, etc, ne seront pas réévaluées en fonction de l’inflation, engendrant de fait une perte de pouvoir d’achat pour les personnes et foyers concernés. En même temps, une politique de flicage des chômeurs se met en place : le nombre d’agents chargés du contrôle est passé de 200 à 400 – et devrait bientôt atteindre 800 –, alors que Muriel Pénicaud annonce 4000 suppressions de postes d’accompagnement à Pôle emploi, et que Bercy ferme le service chargé de faire rentrer l’argent des évadés fiscaux !

Dans l’autre monde, cinq ans après le lancement de l’Initiative une ceinture et une route (ICR) par le président chinois Xi Jinping, le bilan parle de lui-même : l’ensemble des grands projets d’infrastructures et de développement mis en route dans ce cadre a engendré 5000 milliards de dollars d’échanges commerciaux – ce qui représente 30 % des 16 000 milliards des échanges annuels dans le monde. En mai dernier, la Chine a signé 103 protocoles de coopération avec 88 pays, régions ou organisations mondiales. Les ports chinois sont désormais connectés à plus de 600 ports dans le monde, et le nombre de trains de fret entre la Chine et l’Union européenne vient de dépasser les 10 000. Les entreprises chinoises ont établi 82 parcs industriels dans les pays de l’ICR, ce qui représente 28,9 % d’investissement, et 24 000 emplois locaux créés. Etc.

Comme l’explique Wang Yiwei, directeur de l’Institut chinois des Affaires internationales à l’Université de Renmin, dans une série d’articles publiés sur le site internet de la télévision chinoise CGTN, l’ICR a créé de nouveaux moyens de communication et de déplacement à travers l’Afrique. Auparavant, les Africains francophones souhaitant se rendre dans un autre pays francophone voisin devait faire une escale à Paris. Désormais, les Africains ne sont plus contraints par les anciens modes issus de l’ère coloniale.

Dans un entretien avec l’agence de presse chinoise Xinhua, le ministre éthiopien des Finances et de la Coopération économique, Admasu Nedebe, explique que les discussions du sommet du FOCAC vont se concentrer sur le renforcement de la coopération entre la Chine et les pays africains, en particulier dans quatre secteurs : « les pays africains ont besoin de transformer leur secteur agricole, de mettre en œuvre un développement industriel vigoureux, d’investir dans leurs infrastructures et d’engager des moyens pour développer la science et la technologie, s’ils veulent réussir un développement économique comme l’a accompli la Chine ». Nedebe souligne que la coopération entre l’Éthiopie et la Chine combine les infrastructures et un partenariat fondé sur la connaissance, avec près de 6000 jeunes Éthiopiens qui ont bénéficié d’une éducation et d’une qualification en Chine.

Même le président du Togo, Faure Essozimna Gnassingbé, dans une interview à CGTN, exprime l’optimisme qui irradie actuellement le continent africain, face à la nouvelle ère de libération et de développement : « Les investissements [chinois] ont aidé le Togo dans sa croissance et dans son développement. Mais vous savez que le développement, c’est un chemin qui ne s’arrête pas. Le progrès n’a pas de limite, pour l’instant. Il y a eu des progrès certes, mais on peut faire mieux (…) Il y a une tentation de la part de certaines puissances de faire des choses seules. Alors que nous, ce qui est la base de la relation entre l’Afrique et la Chine, c’est la concertation, et le souci d’avoir une coopération comme on dit, gagnant-gagnant. La Chine y trouve son intérêt et les Africains également », a-t-il affirmé.

Cette idée qu’il n’y a pas de limites au progrès humain (si ce n’est celles que l’homme s’impose à lui-même) nous fait penser au livre There are no Limits to Growth (« Il n’y a pas de limites à la croissance »), publié en 1983 par Lyndon LaRouche. L’économiste américain y réfutait la thèse lancée quelques années auparavant par le Club de Rome, à travers le rapport Limits to Growth, qui visait, derrière une caution scientifique, à induire un pessimisme parmi les populations européennes et américaines en cassant leur attachement au progrès scientifique et technologique de la période des Trente glorieuses, pour mieux faire passer la pilule de l’austérité et du libéralisme financier.

Aucun décret divin, de mère-Gaïa de la nature ou du père-Zeus des marchés financiers, nous empêche de renouer avec une vraie politique de croissance (à distinguer de la croissance financière actuelle), une politique d’investissements publics, d’aménagement du territoire, d’éducation, de progrès scientifique et culturel et de coopération internationale. Cela ne dépend que de la mise en place d’une séparation bancaire, d’une annulation des dettes illégitimes et de l’établissement d’un nouveau Bretton Woods et surtout... de notre volonté de nous battre pour tout cela.