La main tendue de la Chine à l’Europe

mercredi 13 décembre 2017

L’UE ressemble de plus en plus à une Tour de Babel, se cachant avec une arrogance obstinée derrière ses étendards de « liberté », de « démocratie » et de société « ouverte », pendant que le tiers de sa population demeure sous le seuil de pauvreté. Conditionnée à considérer comme ses amis ceux qui la pillent – depuis les places financières de Wall Street et de Londres, et à travers les paradis fiscaux et le shadow banking – elle regarde en chien de faïence ceux qui souhaiteraient coopérer sur les bases d’un développement mutuel. Mais plusieurs pays en sa périphérie, au Sud et à l’Est, n’entendent plus se laisser dicter une politique économique suicidaire, et s’ouvrent de plus en plus aux projets proposés par la Chine. En voici deux exemples, avec la Pologne et la Grèce.

Pologne

La nomination du nouveau Premier ministre polonais, Mateusz Marowiecki, jusqu’alors ministre de l’Économie, laisse présager un changement d’orientation économique, en faveur de davantage d’investissements et d’intervention de l’État, en particulier dans les infrastructures et l’industrie ; ce qui implique un rôle accru de la Chine. Cette réorganisation soudaine du gouvernement polonais intervient d’ailleurs une semaine après le sixième sommet « 16 + 1 » entre la Chine et seize pays d’Europe centrale et orientale à Budapest. La Pologne est déjà le pays d’Europe de l’Est accueillant le plus d’investissements chinois, et le projet de Nouvelle Route de la soie est de plus en plus populaire dans le public et dans les grands médias.

Marowiecki est un fervent opposant aux politiques de privatisations scandaleuses qui ont rongé le pays depuis 30 ans. Il veut mettre un terme aux sorties de capitaux, en reprenant en main les banques qui sont aujourd’hui majoritairement détenues par des intérêts étrangers, afin d’augmenter les fonds disponibles pour les investissements dans les infrastructures ferroviaires et routières, et dans certains secteurs de l’industrie. Pour le camp néolibéral, dont les doctrines de « thérapie de choc » ont dominé l’économie polonaise depuis la chute du Mur en 1989, Marowiecki a toujours représenté une sorte d’ennemi numéro un.

Grèce

Le vice-Premier ministre chinois Ma Kai, accompagné par une large délégation, a été reçu le 7 décembre à Athènes par le Premier ministre Alexis Tsipras. Les deux dirigeants se sont engagés à renforcer leur coopération dans le cadre de l’initiative « La ceinture et la route » (BRI). Ma a souligné le fait que le projet du port du Pirée, réalisé par l’entreprise chinoise Cosco, représentait un très bon exemple de coopération gagnant-gagnant. Il a confirmé le très bon climat dans les relations entre la Grèce et la Chine. Les deux responsables ont discuté de l’accélération du programme d’investissement chinois en mettant l’accent sur les infrastructures, les transports, les télécommunications, le commerce et le secteur financier, et la relance des exportations alimentaires grecques vers la Chine. (source : french.china.org)

Comme le journal suisse Le Temps le rappelle dans une tribune publiée le 11 décembre, le parlementaire grec Costas Douzinas, membre de Syriza, a récemment déclaré : « Alors que les Européens se comportent comme des sangsues médiévales envers la Grèce, les Chinois n’arrêtent pas de nous donner de l’argent ».

Suite à sa rencontre avec Ma Kai, Tsipras s’est rendu à Belgrade pour un sommet entre la Grèce, la Bulgarie, la Roumanie et la Serbie ; pendant ce temps, une délégation du parti Syriza se trouvait en Chine, pour y rencontrer plusieurs responsables du Parti communiste chinois (PCC), dans le cadre du dialogue entre le PCC et les partis politiques du monde, qui se tenait à Beijing.

Remarquons ici que le Politburo du PCC s’est réuni vendredi dernier sous la direction du président Xi Jinping, afin de définir les deux priorités en matière de politique économique : les mesures à prendre pour se prémunir d’une nouvelle crise financière, et le plan de réduction de la pauvreté.

On peut continuer de critiquer et de railler la Chine à tout bout de champ ; elle a bon dos. Cependant, les citoyens européens feraient mieux de se battre pour que leur pays et l’Europe fassent leurs ces deux priorités, s’ils ne veulent pas connaître le même sort que les citoyens de la Tour de Babel.