Retraites : arrêtons l’enfumage financier, rétablissons la justice sociale

lundi 9 septembre 2013

Appel à manifester le 10 septembre (carte des manifs) - Notre tract pour la mobilisation contre la réforme des retraites :

Depuis plus de 40 ans, les gouvernements ont laissé le capital financier accaparer les gains de productivité du travail. La réforme Ayrault ne fait que continuer cette soumission. Nous nous battons au contraire pour arrêter cette machine infernale. La retraite n’est pas un coût, c’est un droit. C’est le système imposé par la City, Wall Street et leurs collaborateurs au sein de l’Union européenne et en France qu’il faut changer, pas le régime de retraites.

La « réforme » Ayrault contre la justice sociale

D’abord, la durée de cotisation pour une retraite à taux plein passera de 41 ans et trois trimestres en 2020 à 43 ans en 2035. Pour les jeunes d’aujourd’hui, s’ils rentrent sur le marché du travail après leurs études, à 24 ans, cela signifie 67 ans. Ou davantage, si on continue avec la même logique. Un gouvernement disant faire de la jeunesse sa priorité fait ainsi une réforme anti-jeune ! C’est aussi bafouer les ouvriers, dont l’espérance de vie en bonne santé est de moins de 60 ans !

Ensuite, on augmentera les cotisations salariales et patronales de 0,3 %. Mais là, MM. Moscovici et Ayrault ont promis au MEDEF que la part patronale serait « compensée », sans doute sous forme d’un report scandaleux d’une partie des charges familiales vers la CSG. Tout cela au nom de la « compétitivité », dans une économie qui ne produit pas de biens réels et se désindustrialise au bénéfice d’une société des détenteurs de patrimoine.

Enfin, la revalorisation des pensions, déjà repoussée du 1er janvier au 1er avril par le gouvernement Fillon en 2009, sera maintenant reportée au 1er octobre. Ce n’est pas un simple décalage, comme l’a dit hypocritement M. Ayrault. Le manque à gagner annuel sera de 144 euros pour un retraité touchant une pension de 1200 euros par mois, avec une inflation de 2 %. On imagine ce qui arrivera quand l’inflation se déchaînera dans la prochaine phase de la crise, tout salarié étant amputé du niveau de cette inflation pendant neuf mois !

Oh, le gouvernement prévoit bien des amortisseurs pour que le minimum vieillesse (aujourd’hui inférieur au seuil de pauvreté !) ne soit pas trop affecté : il créera un compte épargne « pénibilité » et concèdera quelques trimestres supplémentaires aux femmes qui ont suspendu leur carrière pour cause de maternité et aux étudiants, qui pourront racheter jusqu’à 4 trimestres. Ce ne sont que des sparadraps pour atténuer les effets du mal, des aumônes de dames patronnesses.

Les trois piliers de l’enfumage

  1. On nous serine que les acquis sociaux ne peuvent être maintenus car le nombre de retraités augmente par rapport à celui des actifs. Ce raisonnement repose sur une conception statique de l’économie et de la société, il est donc faux. La vérité est que la cause première des déficits n’est pas l’allongement relatif de la vie humaine, mais la crise économique : la réduction du taux de croissance et l’augmentation du taux de chômage entraînent mécaniquement une baisse des cotisations. La vérité est que dans une économie en développement réel, la productivité de moins d’actifs peut financer plus de retraités !
  2. On nous dit que « les retraités doivent faire leur part d’effort ». Or une étude récente montre que si les réformes de 1993, 2003 et 2008 avaient été appliquées aux affiliés de la CNAV et de la MSA nés en 1938, ceux-ci auraient déjà vu leur pension réduite de 28 % en moyenne lors de leur liquidation et de 35 % sur l’ensemble de la période de leur retraite. On voit ce que signifie aller plus loin : une austérité criminelle.
  3. On raisonne comme si l’argent des retraités était une charge financière ou une somme accaparée et stérilisée. Or les retraités consomment, épargnent et dans cette société en crise, doivent soutenir leurs enfants. Ils infusent ainsi du pouvoir d’achat supplémentaire dans l’économie. Penser autrement revient à une imbécillité comptable.

Enfin, le déficit du régime n’est pas abyssal, il est du même ordre que le crédit d’impôt compétitivité, pour lequel on a bien trouvé les 20 milliards nécessaires à son financement et sans contrepartie.

La solution : sortir du piège financier

Combattre cette réforme, c’est exiger que les forces financières qui la promeuvent soient mises hors d’état de nuire, afin qu’une économie organisée et de plein emploi puisse servir des retraites dignes à ceux qui ont travaillé toute leur vie. La question des retraites n’est pas une question technique ; elle suppose un changement total d’orientation politique et sociale, de haut en bas.

  1. Cela commence par l’assainissement financier : couper les banques en deux et arrêter la dépendance de l’Etat à l’égard de leurs spéculations. Exactement le contraire de ce qu’a fait Pierre Moscovici avec sa « réforme bancaire » de complaisance.
  2. Lancer une grande politique de crédit public, comme nous en avons eu à la Libération, pour reconstruire. Aujourd’hui le système de l’euro s’y oppose, c’est pourquoi il faut en faire un autre.
  3. C’est en organisant la reprise de l’économie avec ces armes politiques qu’on se donnera les moyens de servir les retraites. Car le chômage diminuant et les salaires augmentant avec la qualification des emplois, il y aura plus de cotisants et donc plus d’argent.
  4. On pourra ainsi, grâce à la productivité retrouvée, à la fois baisser la durée de cotisation, ne laisser aucune retraite en dessous du SMIC et réorganiser de fond en comble le système en fonction de la justice sociale et non de la finance, en abrogeant toutes les mesures de recul social.
  5. On pourra éradiquer la pénibilité plutôt que de la compenser, mettre fin aux inégalités hommes/femmes au travail et réintégrer les jeunes dans le travail, avec de vrais emplois et non des CDD à répétition.

Utopie ? Non, coup d’arrêt à la société des héritiers, du chômage et de la souffrance au travail et retour à un travail humain dans lequel on n’est plus réduit à un centre de profit évalué en termes monétaires, mais considéré comme accomplissant une œuvre pour le salut commun. Notre dette est envers ceux qui ont travaillé et les générations futures, non envers ceux qui nous étranglent pour couvrir leurs paris sur les marchés. Eux nous mènent au désastre social et à la guerre ; nous, nous voulons un avenir et la justice.

Lorsque le sentiment se borne à attendre un futur sur lequel on ne peut rien, le courage s’efface. C’est en nous contaminant par ce pessimisme que le système en place cherche à nous étouffer. Des retraites justes et dignes sont non seulement un droit, mais le levier fondamental pour redonner sens à notre vie.