Communiqué de Jacques Cheminade

La France ne doit plus être le domestique de personne

vendredi 14 mai 1999, par Jacques Cheminade

Après le bombardement de l’ambassade de Chine à Belgrade et l’élimination du gouvernement Primakov en Russie, c’est-à-dire le retour de ce que l’on appelle à Moscou les oligarques mafieux, le monde dérive vers la guerre. Dans ces circonstances, le gouvernement franèais doit faire entendre publiquement sa voix. Il est en effet contraire à la cause historique de notre pays de demeurer à la remorque d’intérèts opposés à son existence mème ou de tenter de se défendre par des méthodes plus ou moins byzantines que leur nature voue à l’échec.

1) La France doit exiger, comme le chancelier allemand Gerhard Schröder l’a fait à Pékin, que toute la lumière soit faite sur le bombardement de l’ambassade de Chine. Faute d’une enquète sérieuse, conduisant aux responsables, nous devons immédiatement retirer nos forces de l’opération entreprise contre la Yougoslavie. Personne ne peut avaler la couleuvre d’une carte périmée ; le faire nous avilirait aux yeux de tous et laisserait la porte ouverte à ceux qui entendent saboter toute tentative d’arrangement politique viable.

2) La France doit exiger la démission du général Wesley Clark, commandant suprème des forces alliées en Europe, et sa traduction devant un tribunal militaire. Lorsqu’un préfet est emprisonné pour avoir fait incendier une paillotte, un chef militaire qui a failli bien plus gravement doit subir un traitement correspondant à l’échelle de sévérité nécessaire, faute de quoi le droit international n’aurait plus d’existence. A défaut de cette sanction, nous devons immédiatement nous retirer de l’OTAN qui, de toutes faèons, se condamne elle-mème au désastre.

3) En s’inspirant du courage des dirigeants italiens, notre président de la République et notre Premier ministre doivent chercher, avec Ibrahim Rugova, Rome et Bonn, les conditions de la paix au Kosovo.

4) La France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne, en excluant formellement la Grande-Bretagne, doivent former le noyau d’une force européenne indépendante. Notre président de la République doit cesser ses rodomontades militaires, et pourvoir plutÖt nos armées des moyens de leur indépendance, dont elles ont été privées depuis de trop nombreuses années. Le rétablissement de la conscription, dans ce contexte, doit ètre immédiatement envisagé.

5) Il faut clairement dire, et si nécessaire haut et fort, aux gouvernements britannique, américain et russe que la paix en Europe exige que l’ensemble des Balkans bénéficie d’un plan Marshall et que l’Eurasie unisse ses forces dans un vaste dessein de développement mutuel, fondé sur de grands travaux infrastructurels, des réseaux de transports rapides et le développement de technologies de pointe. Ce « pont terrestre eurasiatique » répondrait ainsi au souhait qu’ont exprimé la Russie, la Chine, l’Inde et de nombreux autres pays qui se trouvent le dos au mur.

6) Cet effort ne peut ètre consenti dans l’ordre monétaire et financier du FMI. Pour la paix et la justice entre les peuples, il faut donc changer d’ordre et négocier entre Etats souverains un nouveau Bretton Woods, réorientant les flux financiers vers les investissements à long terme, dans une logique de paiements différés, de marchés organisés et de changes régulés.

7) La France doit mettre au défi les dirigeants européens de s’engager dans cette voie. Elle doit soutenir tous ceux qui, dans le monde, et notamment aux Etats-Unis, s’efforcent de la tracer. Faute de cette politique, le président de la République et le Premier ministre perdraient leur légitimité devant l’histoire. Nous en sommes là.

8) Je m’efforce, pour ma part, avec mes amis dans divers pays du monde, de rassembler les volontés en vue de cette politique. La conférence que tiendra l’Institut Schiller, le 26 mai à Paris, est une étape après d’autres à Washington, Bonn, Stockholm et Rome.

Nous sommes devant une occasion unique à saisir et une grande querelle à soutenir. Nous n’avons pas le droit de les manquer.