Les Editoriaux de Jacques Cheminade

Fin de partie

lundi 6 juin 2011, par Jacques Cheminade


Les éditoriaux de Jacques Cheminade sont publiés tous les quinze jours dans le journal Nouvelle Solidarité, sur www.solidariteetprogres.org ainsi que sur son site de campagne www.cheminade2012.fr.


La désintégration du système financier international est désormais certaine. Le monde de l’argent, découplé de l’économie réelle, est devenu incapable d’assurer un avenir.

La seule solution possible est de remettre l’émission de crédit au service du travail humain et de produire plus par habitant et par unité de surface. Séparer les banques d’affaires et les banques de dépôt et de crédit, un Glass-Steagall global, est la condition nécessaire pour y parvenir, en se dégageant de l’emprise des spéculateurs pour incorporer plus de pouvoir innovateur dans l’économie. Or au lieu de cela, les gouvernements américain et européens creusent la tombe de leurs peuples en renflouant les mégabanques, en imposant partout des mesures d’austérité destructrices et en promouvant des formes d’énergie « vertes », c’est-à-dire moins denses et donc incapables d’alimenter un tissu industriel.

Aujourd’hui, les régulateurs et les gouvernements se sont laissé déposséder. Les quatre grands marchés de capitaux de la planète sont ainsi devenus des bateaux ivres dérivant dans le brouillard. Le premier, celui des contrats à terme, ou dérivés, représente plus de 600 000 milliards de dollars, soit plus de dix fois le produit intérieur brut mondial (PIB) et plus de vingt-cinq fois la production de biens physiques. Là, 90 % des transactions sont opaques. Sur le second, celui des obligations, 99 % des échanges sont opaques. Pour les devises, 4000 milliards de dollars de transactions quotidiennes se réalisent de gré à gré, c’est-à-dire sans contrôle public, représentant en quinze jours ouvrables plus que le PIB mondial. Sur le quatrième, le marché des actions, la part opaque est de 40 % en Europe et de 70 % aux Etats-Unis. Les plateformes de marché « alternatives », installées à Londres et boostées par la directive européenne des marchés d’intermédiaires financiers (MIF), « tiennent » le reste du monde comme une armée de pirates opérant dans l’ombre. Quand nous parlons de l’Empire britannique, ou Empire financier de la City, c’est précisément ce cancer que nous dénonçons, et que l’oligarchie dominante et ses complices ne m’ont pas pardonné d’avoir dénoncé en 1995.

Les agences Standard and Poor’s et Moody’s ont revu à la baisse leur perspective de notation de la dette américaine. En mai, les créations d’emplois sont trois fois moins importantes que prévu et en ce mois-ci, l’émission de fausse monnaie (quantitative easing) doit ou bien s’arrêter ou bien continuer, l’un ou l’autre choix étant désastreux au sein du système, l’un arrêtant la perfusion et l’autre provoquant l’hyperinflation.

En Europe, la zone euro annonce un second plan de sauvetage vis-à-vis de la Grèce, mais ce plan aide en fait les banques créditrices du pays en détruisant son secteur public, son système social et son appareil de production. On vend le patrimoine du pays, on saigne le peuple et on appelle cela de l’aide. Moody’s a abaissé la note grecque de trois crans à Caa1, ce qui signifie la quasi-certitude d’un défaut. Or celui-ci, par effet domino, entraînerait l’ensemble du système de l’euro. La Banque centrale européenne a « pris en pension » 2010 milliards d’euros d’effets pourris, et elle n’aura de choix que de faire faillite ou de recourir à une émission de monnaie sans limites.

C’est ce mort vivant qu’on nous présente comme notre avenir. L’appel de Jean-Claude Trichet à la création d’un ministère des Finances de l’Union européenne sonne comme un Requiem. La nomination de Christine Lagarde à la tête du FMI pour remplacer DSK est un remake : elle s’est toujours opposée à la procédure Glass-Steagall.

Alors, que faire ? Prendre la clef du Glass-Steagall et ouvrir la porte pour sortir du système.