Brèves

Santé : L’Allemagne ne veut plus revivre le cauchemar nazi

lundi 3 janvier 2011, par Helga Zepp-LaRouche

Voici le texte de l’appel lancé le 30 décembre par Helga-Zepp LaRouche face à l’abdication des médecins allemands et l’austérité criminelle menée outre-atlantique par la Présidence Obama.

Lorsqu’on découvrit en 1945 toute l’ampleur des crimes nazis, le sentiment d’horreur qui gagna le monde entier et l’Allemagne elle-même s’exprima dans ces paroles qui portent aussi le poids d’une obligation sacrée : « L’euthanasie, plus jamais ! »

Or nous voici, soixante-cinq ans plus tard, confrontés à un possible retour de cette politique, où l’on passerait d’une pratique de rationnement de soins plutôt clandestine à une pratique ouvertement régulée, visant certaines catégories de patients déjà privés depuis longtemps des soins adéquats, et qui verraient leur situation se dégrader encore davantage.

En Allemagne, les dernières déclarations du président de l’Ordre des médecins, le professeur Joerg Dietrich Hoppe, représentent à cet égard une véritable rupture de la digue qui avait empêché ces idées de se répandre à nouveau et pourraient bien nous entraîner une fois de plus dans cette direction. Un changement de mentalité au sein du corps médical est en train de mener à un changement de déontologie concernant le suicide assisté. Si cela aboutit, il deviendra impossible de défendre l’idée que le suicide assisté est hors la loi car contraire à toute éthique médicale.

Cette déclaration du Professeur Hoppe a été faite à peine quelques jours avant que le Dr Donald Berwick, le directeur du Centre des services Medicare et Medicaid aux Etats-Unis, nommé par le Président Obama, n’introduise une nouvelle régulation qui entrera en vigueur dès le 1er janvier 2011, accordant des incitations financières aux médecins qui, sous prétexte d’une planification de fin de vie, réussiront à persuader autant de patients que possible de renoncer à des soins essentiels à leur survie. Or, c’est précisément cette mesure qui avait été rejetée par le Sénat américain lors des débats sur la réforme de la santé présentée par Obama, après que Lyndon LaRouche eut fait remarquer que cette politique était tout à fait dans la tradition de la politique « Tiergarten 4 » décrétée par Adolf Hitler en 1939. Cette politique qui refait surface, déguisée en nouvelle régulation – contournant ainsi le Congrès – créera, dans le contexte des politiques d’austérité brutale qui sont imposées actuellement et en combinaison avec l’IPAB, la Commission indépendante de conseil sur les financements de la santé (surnommée par beaucoup, aux Etats-Unis, les « tribunaux de la mort »), une mécanique mortelle qui subordonne la valeur de la vie humaine à son simple coût financier.

Or, si le Professeur Hoppe est parfaitement conscient du caractère inhumain des politiques de soins qui sont appliquées en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, et de leur lien avec les plans géants de renflouement bancaire, il sait aussi que dorénavant, les gouvernements ont décidé d’en reporter le coût sur le niveau de vie de la population. On peut deviner à quelles pressions il a été soumis…

Rappelons que lors du 33e Congrès de l’Association allemande de médecine, en mai 2009, Hoppe avait ouvert la conférence par un discours pathétique, où il demandait l’ouverture d’un débat public sur le rationnement des soins déjà secrètement pratiqué en Allemagne, exigeant qu’une décision soit prise : soit l’on accroît le financement des politiques de santé par les fonds d’assurance appropriés, soit l’on accepte en toute transparence et publiquement le rationnement préconisé par les « experts » comme une solution envisageable.

Quelque temps avant, le 66e Congrès annuel de l’Association allemande des juristes avait, pour sa part, adopté la position que « l’aide à mourir » apportée par un médecin à son patient était non seulement permissible légalement, mais même une forme tout à fait éthique de traitement en fin de vie.
A cette époque, Hoppe était monté au créneau en déclarant que ceci était en conflit profond avec l’esprit et le sens du devoir du médecin :  « On doit le dire clairement : le suicide assisté n’est pas une tâche pour les médecins et, chers collègues, nous espérons qu’il ne le sera jamais ! »

Ensuite, en août 2010, l’Institut Allensbacher publia les résultats d’une enquête selon laquelle un tiers des médecins interrogés se prononçaient en faveur de l’assistance au suicide par leur profession.

Or aujourd’hui, alors qu’il n’existe plus le moindre doute qu’après le gigantesque plan de renflouement accordé aux banques, les gouvernements des Etats-Unis et d’Europe, de pair avec la Commission européenne, sont déterminés à réduire la dette des Etats grâce à des coupes draconiennes dans les dépenses (notamment de santé), Hoppe veut libéraliser le code de déontologie médicale en ce sens et même en faire le thème de la prochaine rencontre annuelle de l’Association des médecins.

Lors de la précédente rencontre qui s’est tenue à Mayence, au cours d’un entretien avec le Pr Hoppe (publié dans Neue Solidaritaet n° 22 de 2009), l’auteur de ces lignes lui avait posé cette question : « N’y a-t-il pas de danger qu’en cas d’aggravation massive de la crise économique et financière, l’adoption d’une politique de rationnement de soins ou de triage des malades, afin de réduire les dépenses, ne nous amène nécessairement vers l’euthanasie – comme les nazis ? Aux Etats-Unis comme en Angleterre, on discute ouvertement du suicide assisté, et le conseiller d’Obama, Ezekiel Emanuel, a parlé de tout l’argent qu’on pourrait économiser si l’on autorisait les médecins à apporter leur assistance active à la mort. Je trouve cela monstrueux ! »

Hoppe : «  ç a l’est certainement. Je l’ai dit clairement lors de mon discours d’ouverture, l’Association des médecins a endossé cette position et nous écrirons une résolution sur cette question. Je pense que le Congrès fera front sur cette position que nous avons adoptée. Parmi les pays voisins – un au nord, un à l’ouest et un au sud – certains exemples illustrent ce que nous n’avons pas l’intention de faire. »

Le docteur Leo Alexander, l’un des plaignants pour les parties civiles au procès de Nuremberg, où étaient jugés seize nationaux-socialistes tenus pour responsables d’avoir joué un rôle de premier plan dans l’extermination de masse d’êtres humains considérés par le régime hitlérien comme des bouches inutiles, a mis en lumière en 1949, à peine trois ans après le verdict du Tribunal, le cœur des arguments philosophiques ayant conduit à de tels crimes.

Il décrivit l’utilitarisme, une doctrine élaborée par Hegel et Bentham, dont la mise en pratique conduisit à traiter des groupes de plus en plus importants de la population comme du simple bétail et à les tuer, les accusant d’accaparer trop de ressources de la société ou d’être indésirables d’une façon ou d’une autre. Des centaines de milliers de citoyens allemands, sans parler de millions d’autres pays, furent envoyés à la mort sur la base de ce principe. Durant ces dernières décennies, la croyance en cette doctrine utilitariste – très souvent présentée comme du pragmatisme – a relevé la tête aux Etats-Unis et en Europe et joue désormais un rôle central dans la politique de santé. Le Dr Alexander a averti aussi que cette doctrine représente une véritable pente glissante conduisant inexorablement à de graves dérapages : « Quelle que fût l’ampleur des crimes perpétrés par les nazis, il est apparu clairement à tous ceux qui les ont étudiés qu’ils ont commencé par de petites choses. Au début, il ne s’agissait que de subtils changements d’attitude chez les médecins. Cela a commencé par la notion – essentielle à l’euthanasie – qu’il existe quelque chose comme des vies ne méritant pas d’être vécues. Initialement, ce terme ne s’appliquait qu’aux personnes souffrant de maladies incurables et chroniques. Pas à pas, on ajouta à cette catégorie les socialement non productifs, les racialement indésirables et, finalement, tous les non-allemands. Ainsi, il est essentiel de préciser que la nouvelle attitude envers les malades incurables fut le déclencheur infiniment petit d’un changement de mentalité global. C’est donc ce subtil changement d’attitude des médecins qu’il faut examiner à fond. »

Dans son article de 1949, qui retrace le cheminement des nazis vers une politique médicale d’extermination de masse, le Dr Alexander relève de nombreux signes avant-coureurs indiquant que les médecins américains étaient également infectés par cette idéologie utilitaire hégélienne, que l’on peut à juste titre désigner comme l’idéologie nazie. Il constate que « les médecins ont préconisé dangereusement l’arrêt de simples techniques de soins. Cette attitude rationnelle, d’essence hégélienne, les amène à établir certaines distinctions dans le traitement des maladies aiguës et chroniques. Les patients qui en sont affectés sont stigmatisés comme des individus qui auront le plus grand mal à retrouver une utilité pour la société. Dans une société de plus en plus utilitariste, on considère ces patients avec condescendance et, péremptoirement, comme des boulets indésirables... »

Le retour de ces idéologies doit susciter la plus grande préoccupation, étant donnée l’ampleur sans précédent de l’effondrement de l’ensemble du système financier, reléguant même au second plan la crise de 1929, et le fait que nous sommes déjà bien avancés sur cette pente glissante.
Il existe une porte de sortie : c’est l’ensemble des mesures défendues depuis un certain temps par Lyndon LaRouche. Cela commence, et c’est incontournable, par l’éviction du Président Obama dont le plan de santé viole la Constitution américaine, en vertu du 25e amendement, section 4. Ceci doit être suivi du rétablissement des principes de la loi Glass-Steagall, permettant de séparer les banques de dépôts des banques d’affaires et d’éliminer les titres toxiques. Enfin, dans la tradition de Franklin Roosevelt et de son New Deal, on doit entreprendre la reconstruction des Etats-Unis avec le programme NAWAPA, et celle de l’Eurasie, de l’Afrique et de l’Amérique latine par des programmes similaires.
Si nous réhabilitons l’économie physique dans son rôle premier, et avec elle l’être humain créateur en tant qu’unique source de richesse pour la société, alors on cessera de perpétuer une vision de l’homme qui nous soumet à la pensée utilitariste ; nous redeviendrons alors capables de concevoir un bon système de santé, comme celui qui exista aux Etats-Unis sous la loi Hill-Burton, et en Allemagne, à l’époque des réformes du système de santé effectuées par Ehrenberg, Geissler, Bluem, Seehofer, Schmid, Lauterbach et Rösler.

Il ne faut rien changer à ce qu’affirmait déjà Christoph-Wilhelm Hufeland, le brillant médecin personnel de Goethe et Schiller, qui disait il y a deux cents ans : « Lorsqu’un malade est tourmenté par des maladies incurables, quand il en vient même à souhaiter sa propre mort, quand porter un enfant provoque la maladie et met en danger la vie de la mère, avec quelle facilité peut s’introduire cette pensée chez les personnes même les mieux inspirées : ne devrait-il pas être permis, et même vu comme notre devoir, de libérer un peu plus vite celui qui souffre de sa charge ou de sacrifier la vie de l’enfant au profit de la mère ?

« Cette pensée peut paraître pleine de bon sens, elle peut sembler soutenue par le cœur, pourtant, elle est fausse, et toute pratique médicale fondée sur elle serait foncièrement erronée et criminelle. Elle annihilerait d’emblée l’essence même du médecin. Il ne doit et ne peut rien faire d’autre que défendre la vie – qu’elle réussisse ou non, qu’elle ait une valeur ou pas, ce n’est pas son problème. Et s’il s’éloigne, ne serait-ce qu’une seule fois, de cette prérogative de sa profession, les conséquences seront incalculables et le médecin deviendra la personne la plus dangereuse de l’Etat ! »

Tous les médecins, tous les autres acteurs de la profession, mais aussi tous les autres citoyens concernés, doivent dire : « Plus jamais l’euthanasie » ; ils sont appelés à garantir que le type de « libéralisation » de la déontologie médicale proposée par le Professeur Hoppe sera rejetée pour ce qu’elle est.