Les interventions de Jacques Cheminade

Notre engagement révolutionnaire

mardi 7 juillet 2009, par Jacques Cheminade


Déclaration de Jacques Cheminade, le dimanche 28 juin, à l’ouverture de l’Assemblée générale de Solidarité et Progrès


Hier, ensemble, nous avons mesuré l’enjeu politique de notre temps, un temps qui met à l’épreuve la part d’humanité que chacun porte en soi.
Aujourd’hui, puisque nous sommes ici, voici venue l’heure de prendre ou de renouveler notre engagement. Contre un système organisé pour servir la caste financière dominant le monde en vue d’asservir et de détruire la vie des peuples. Contre la politique de l’Empire britannique et des mégabanques de la City et de Wall Street, qui opèrent avec une « licence to kill », le droit de tuer ou de réduire au silence ceux qui les contestent.

Notre engagement doit être sans retenue. Car pour convaincre les autres, il faut que nous soyons exemplaires, non pas simplement porteurs d’un engagement, mais le vivant au plus intime de nous-mêmes. Ainsi notre sentiment, en accord avec ce que nous disons, pourra ramener à la raison ces fuyards apeurés que sont nos contemporains.

Par sentiment, je veux dire quelque chose qu’on peut aussi appeler d’un mot qui n’est pas à la mode, la « bonté », la capacité de s’identifier à l’autre, à ses souffrances comme à ses plaisirs, en se rendant soi-même atteignable par et pour autrui. Cette bonté qui est l’envers de la peur est nécessaire pour entreprendre l’aventure d’une relation humaine fondée sur la découverte et l’application de principes, à la frontière de soi-même et d’autrui, pour l’avantage d’autrui, dans l’art, dans la science et dans la politique, sans peur de perdre ou de se perdre.

Face à ce que nous avons décrit hier, nous devons d’abord bâtir une nouvelle Résistance.

Les références au programme du Conseil national de la Résistance du 15 mars 1944, « né de la volonté ardente des Français de refuser la défaite », réapparaissent déjà dans notre histoire, comme dans la déclaration des médecins urgentistes du vendredi 19 juin pour l’hôpital public. Nous devons ainsi reprendre le flambeau de la légitimité, par delà une légalité dévoyée.

Le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, réaffirmé par celle de la Ve République, nous devons à nouveau lui insuffler la vie. Les droits inaliénables et sacrés et les principes qu’il définit sont trahis chaque jour. Par exemple, notre Préambule proclame que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » et qu’elle « garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et loisirs ».

Ces principes ne doivent pas demeurer vains. Car si un pays, comme le fait la France aujourd’hui, trahit ses principes fondateurs, il ne peut plus avoir d’avenir. Il ne sert ni le bien commun, ni le plus grand nombre, ni les générations futures, il sert une caste qui accapare le pouvoir, il sert les Pinault et les Copé, les Arnault et les Pérol, les Johnny et les Montebourg, ceux qui accaparent les moyens de la République et les écrans des médias. Alors que le Fonds de réserve des retraites perd en Bourse une partie de ses ressources, alors que l’on sert les banques en argent frais et en emprunts à 1 % pour reprêter à un taux bien plus élevé aux ménages et aux entreprises, alors que notre droit reprend des logiques datant de l’époque hitlérienne pour ajouter aux peines prononcées contre des délits ou des crimes commis, des mesures de sûreté imposées à des individus peut-être dangereux, mais n’ayant pas passé à l’acte.

Nous sommes une Nation à fondement anti-oligarchique et républicain, comme le sont aussi en principe les Etats-Unis d’Amérique, un fondement qui fait que nous soyons ce que nous sommes. Aujourd’hui, nous avons trahi notre mission historique, notre tâche est donc d’en rétablir le cours.

Le peuple doit remonter sur la scène, comme à la fin de Fidelio, l’opéra que Beethoven a transmis aux générations futures et qu’on joue trop souvent sans le sentiment de sa réalité ni de son actualité, comme si c’était une pièce de musée. Il ne l’est pas.

Il y a urgence dans le monde. La qualité de notre engagement répondra de notre sincérité aux yeux de ceux qui attendent une orientation, une direction, une vision.

Le défi est de donner à cette Résistance que nous avons commencé à bâtir un projet, un projet qui soit à l’échelle de notre pays, de l’Europe et du monde. Nos textes le présentent. Faites-le connaître. Lisez-le en vous mettant en jeu. Prenez les écrits au sérieux en les faisant vivre. Enrichissez-les.

Le défi est de donner à la France sa part dans la politique américaine, décisive pour le monde.

Vous savez qu’apparemment, De Gaulle et Roosevelt ne s’entendaient pas bien. Vous savez peut-être moins que le discours sur l’état de l’Union de Roosevelt, du 11 janvier 1944, qui définit les droits sociaux positifs des Américains au sortir de la Grande dépression et de la guerre, est dans le même esprit que celui de notre Préambule de 1946 et l’a inspiré. Roosevelt prononça ce discours en même temps qu’il demandait aux Nations unies d’éliminer l’impérialisme. Vous savez peut-être moins que dans ce discours, Roosevelt met en garde contre la réapparition des tendances fascistes aux Etats-Unis mêmes, alors que le fascisme avait été vaincu à l’échelle du monde. Vous savez peut-être moins encore que De Gaulle, reçu en 1944 par une grande parade new-yorkaise, se déclarait convaincu que son projet pour l’après-guerre aurait rejoint celui de Roosevelt et qu’il regrettait que certains conseillers pro-britanniques de Roosevelt – et il y avait aussi des conseillers pro-britanniques dans l’entourage de De Gaulle lui-même – aient envenimé leurs relations. Aussi, aujourd’hui, cet esprit de la France résistante et combattante, effaçant ses vices coloniaux et impériaux, doit rejoindre le combat de Lyndon LaRouche aux Etats-Unis pour y rétablir les fondements de la politique de Roosevelt, de Lincoln et d’Hamilton.

Cela doit redéfinir les relations franco-américaines et aussi franco-allemandes, mais pour le faire nous devons être encore plus catégoriques dans le rejet et la désignation de l’ennemi, la City, Wall Street et ce conglomérat de forces impériales et patrimoniales qui reposent sur un monétarisme prédateur et destructeur.

Nous devons devenir plus polémiques vis-à-vis de ce que représente cet ennemi, et plus clairs dans notre défense d’un système de crédit productif public et de développement mutuel, qui est son opposé. Nous devons, pour cela aussi, rendre vivantes les grandes heures de notre histoire, la fondation de l’Etat-nation par Louis XI, l’Edit de Nantes, le Traité de Westphalie, l’Académie des sciences de Colbert et de Leibniz, les Comités d’instruction publique de la Révolution et tout le travail scientifique qu’ils engendrèrent. Nous devons faire revivre, au cœur de notre langue, le grand projet de Rabelais, donner à chacun un instrument pour jouer de sa pensée, et non les pages d’un dictionnaire mort ou d’un code de formules et de règles.

La France peut jouer, à cette heure de notre histoire, un rôle universel, à condition de rejeter les carcans auto-destructeurs de Maastricht, de Nice et de Lisbonne. Ces soi-disant « traités européens » bloquent l’émission de crédit productif public et bafouent la souveraineté nationale en la privant de son instrument, la monnaie, érigée en Dieu absolu par la Banque centrale européenne.

Disons-le clairement : notre gouvernement ne doit plus emprunter auprès des établissements financiers, comme il le fait systématiquement depuis le 3 janvier 1973, avant même Maastricht. Il ne doit plus emprunter, il doit créer son propre argent et le prêter en vue du dessein national et européen, en vue du bien commun et des générations futures, sous le jugement de son peuple. C’est ainsi et ainsi seulement que l’économie incarnera à nouveau les droits inaliénables et les principes qui nous définissent constitutionnellement comme République.

A une heure où l’Europe des banquiers centraux se détruit elle-même, où l’on parle d’en exclure ou d’en licencier les membres les plus faibles, à l’heure où l’Europe de l’euro détruit les salaires, pris comme variable d’ajustement, à une heure où nos citoyens ne s’intéressent plus à ce qu’on leur présente en n’allant pas voter, nous devons leur redonner un sens de la politique vraie, de ce qu’on peut faire, pas en trichant sur les mots, comme les Obama ou les Sarkozy, mais par des actes.

Des actes : peu de femmes et d’hommes en font. Si nous en accomplissons réellement, nous pouvons changer la politique et sauver la vie en éveillant les consciences par l’action face aux périls.
Cela suppose votre imagination, vos contributions créatrices, pas l’attente des initiatives d’un centre ou d’un ordre pyramidal. Nous réussirons, face au défi immense de l’histoire, ou du moins nous aurons une chance de réussir, si nous ne pensons pas comme un spectateur qui analyse mais comme un acteur qui intervient en tentant de faire toujours mieux.

Christine et Odile vont vous faire part, comme dans toute Assemblée générale, de nos actions et de nos finances de la période passée. Si nous les écoutons en spectateurs et en juges, nous allons nous ennuyer et nous tromper nous-mêmes. Si au contraire nous les suivons, vivifiés par ce que nous avons entendu hier, nous serons frustrés de n’avoir pas pu faire davantage, frustrés que le peuple de notre pays n’ait pas eu davantage l’occasion d’entendre le message qui lui revient.
Alors cet après-midi, ensemble, ayant fait le point ce matin, nous pourrons appareiller vers beaucoup plus, à condition que notre cœur et notre raison retrouvent leur unité, comme dans la France Libre, sans chaînes extérieures ou intérieures. Si nous réussissons, nous ouvrirons la voie du salut, ici et dans le monde.

Comme Lyndon LaRouche l’a dit hier dans son intervention sur internet, ce changement révolutionnaire est la seule voie qui puisse donner au monde un avenir. Mais si nous ne sommes pas capables de porter ce changement ou ne voulons pas l’accepter, alors nous ne serons pas dignes de survivre et nous ne survivrons pas, du moins en tant qu’êtres humains dignes de notre histoire.