Editoriaux de Jacques Cheminade

Tragi-comédie

mardi 9 juin 2009, par Jacques Cheminade


Les éditoriaux de Jacques Cheminade sont publiés tous les quinze jours dans le journal Nouvelle Solidarité, sur www.solidariteetprogres.org ainsi que www.cheminade-le-sursaut.org.


A force de ne jamais prendre de hauteur, les candidats aux élections européennes ont enfoncé la campagne dans un marécage. Presque tous ont apporté leur lot de calculs, d’arrière-pensées et d’ambitions auquel les électeurs ont répondu par le désenchantement. Le fait le plus révélateur est qu’en 1979, lors de la première élection au suffrage direct des parlementaires européens, l’abstention en France s’éleva à 39 %. Trente ans après, en 2009, le nombre de votants dépasse à peine ce chiffre, inversion qui manifeste l’échec citoyen non seulement des politiques mais de toute une génération.

Parmi ceux qui ont voté, le succès de la liste Europe Ecologie est la recherche illusoire d’une issue qui ramène au passé, sous prétexte de préoccupation pour notre avenir. La scandaleuse diffusion du film Home, le vendredi précédant le scrutin et moyennant le financement de l’écolo-warrior François-Henri Pinault, aura été un booster, culpabilisant les habitants de la planète et les incitant à rejoindre le refuge vert. Il est à la fois tragique et comique de voir Dany le Rouge muter pour le plus grand bénéfice de Nicolas Sarkozy et de ses amis. Coup triple pour eux : les socialistes s’effondrent, Bayrou mord la poussière et Besancenot reçoit une piqûre de rappel. La droite peut donc prétendre avoir gagné… avec moins de voix que Nicolas Sarkozy tout seul en 2007 et 11,2 % des électeurs inscrits.

Un comble dans ce genre Commedia del Arte aura été la déclaration officielle de François Fillon, se flattant de sa « victoire » et appelant à « l’unité nationale » pour défendre deux priorités : la lutte contre la « récession » et le « défi du réchauffement climatique ». Monstrueux culot : celui qui disait hier la France sans moyens arrose aujourd’hui les établissements financiers tandis qu’à Londres, son seigneur et maître a sacrifié le Nouveau Bretton Woods sur l’autel de ce que Jacques Attali appelle à juste titre « la concentration du droit de faire de la spéculation et de la fraude sur la City et Wall Street ».

Quant à l’hystérie du réchauffement climatique, elle a bon dos. Elle justifie de ne pas financer à long terme la création humaine, labellisée à risque puisque productrice de gaz carbonique. Alors que, paradoxe, le Journal du CNRS publie un article suivant lequel le faible réchauffement constaté ne proviendrait pas du CO2 mais de la baisse des émissions de dioxyde de soufre dans l’atmosphère, c’est-à-dire de la dépollution.

Soyons sérieux une minute, en oubliant l’Europe qu’on veut nous faire et ses 160 listes hors sujet. Le principal danger pour le monde est celui d’une désintégration généralisée. Les opérateurs de la City et de Wall Street, renfloués par les Etats au détriment de leurs peuples, reprennent leurs pratiques prédatrices : il ne se passe pas un mois sans qu’une banque ou une bourse ne crée une « plate-forme alternative », dont le nom anglais de dark pool est plus explicite. La cupidité règne. Les conseillers comportementalistes d’Obama réduisent la vie humaine à un rapport coût-efficacité et prévoient des coupes claires dans les budgets médicaux. Nous entrons dans un monde où le slogan est : « Sauvez les casinos financiers et sacrifiez la production et les hommes s’il le faut. » Ceux qui se taisent face à cela collaborent ou égarent. Ici, nous combattons.