G20 et comportementalisme

mardi 14 avril 2009, par Jacques Cheminade

Les éditoriaux de Jacques Cheminade sont publiés tous les quinze jours dans le journal Nouvelle Solidarité, sur www.solidariteetprogres.org ainsi que www.cheminade-le-sursaut.org.


Ce qui s’est passé au G20 est encore pire que ce que nous craignions. Il s’agit d’une poussée vers le fascisme financier que je dénonçais dès 2006-2007.

Les décisions se résument à confirmer qu’on déversera 5000 milliards de dollars sur les marchés et à promettre une relance de 1100 milliards de dollars en complément, avec un triplement des moyens fournis au Fonds monétaire international (750 milliards de dollars), 250 milliards pour revigorer les échanges internationaux et 100 milliards en faveur des banques de développement. En fait, le but est de lutter contre le protectionnisme, de continuer à arroser les établissements financiers et de permettre aux perdants escroqués de rembourser leurs dettes aux gagnants tout en faisant un pas vers une gouvernance mondiale.

Les engagements pris ne constituent qu’une rhétorique vide. Ainsi, dans la liste des paradis fiscaux retenus, les Etats américains tricheurs et la City et ses satellites ne sont pas inclus En bref, on a créé en faveur de la City et de Wall Street un monopole pour spéculer et frauder. L’assouplissement des normes comptables permettra de camoufler les comptes en masquant les pertes.

La photo de famille officielle du sommet, avec la reine d’Angleterre au centre, dans sa robe rose bonbon, encadrée par Gordon Brown, la voix officielle de la City, et Lula, le Brésilien devenu symbole du capitalisme comprador, est révélatrice.

Il est donc d’autant plus choquant que Nicolas Sarkozy, qui a renoncé à l’idée et à la mention du Nouveau Bretton Woods, se félicite d’un « carton plein ».

Ce qui a manqué dans ce sommet est en effet le plus important : pas de banqueroute organisée des titres illégitimes, pas d’interdiction ni même de régulation sérieuse des produits dérivés, des hedge funds et de la titrisation, aucun grand projet international d’équipement de l’homme et de la nature.

L’explication tient aux pressions exercées principalement sur Obama mais aussi sur Sarkozy par les intérêts de l’oligarchie financière, relayés par l’école de l’économie comportementaliste. Celle-ci n’est qu’une version nouvelle d’une conception de l’homme qui le réduit à un animal aux comportements prévisibles. Il peut ainsi être manipulé si l’on crée autour de lui l’environnement approprié, en analysant ses propensions psychologiques et sociologiques. Obama est entouré de jeunes « économistes » de cette école, qui ont leur centre à la Russell Sage Foundation, à l’Alfred P. Sloan Foundation, au MIT et à Harvard. Ils forment la « Behavioral Economics Roundtable » et exercent une influence directe chez leur protecteur, Larry Summers, directeur du National Economic Council et principal conseiller économique d’Obama. Ils représentent les mêmes intérêts qui, pendant les années trente, combattirent Franklin Delano Roosevelt et propagèrent des idées et des activités mussoliniennes aux Etats-Unis. En 1934, Alfred P. Sloan avait parrainé la pro-fasciste American Liberty League.

Le virus a atteint la France avec Jean Tirole, qui combine dans son approche économique théorie des jeux et théorie de l’information avec les acquis de la psychologie comportementaliste. Tirole est un ami d’Olivier Blanchard, le « cerveau de la relance mondiale » et chef économiste du FMI, ainsi que des conseillers de dirigeants socialistes que sont Thomas Piketty et Philippe Aghion. Tous ont passé des années au MIT et y ont enseigné. Leur arrogance n’a d’égal que leur servitude volontaire.