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Obama, le soufflé, ou comment les masses se laissent séduire par un dirigeant charismatique

vendredi 1er août 2008, par Jacques Cheminade

par Helga Zepp-LaRouche,
présidente du parti politique allemand Büso

le 26 juillet 2008,

Tous les cuisiniers savent à quel point il est difficile de sortir un soufflé indemne du four. Si le dosage des ingrédients n’est pas rigoureux, ou si la température n’est pas tout à fait la bonne, il s’effondre et il ne reste plus qu’un petit tas, une masse indéfinie et peu appétissante. Un soufflé, tout gonflé d’air chaud, juste avant qu’il ne retombe : voilà l’image qui m’est venue à l’esprit en écoutant le discours de Barack Obama à Berlin, devant la colonne de la victoire.

Parce que cet homme est tout simplement plat, sans grande substance. Néanmoins, ce que les rédacteurs de son discours, spécialistes en relations publiques, ont introduit dans le texte, entre les bulles de rhétorique, est bien difficile à différencier de la politique du gouvernement Bush-Cheney : lutte contre le terrorisme, pour laquelle l’Europe est priée de s’engager davantage, renforcement des moyens d’intervention de l’UE à l’étranger (mentionnant à ce titre le Soudan, le Zimbabwe et la Birmanie), renforts de troupes de combat allemandes en Afghanistan et aide accrue en Irak. Bref, tout le programme de la politique impériale. Ce qui n’est pas vraiment surprenant après sa dernière conférence internet transatlantique, devant un public britannique, dans laquelle il jura vouloir non seulement améliorer la relation spéciale anglo-américaine, même au-delà des connivences Bush-Blair, mais aussi accorder un plus grand rôle dirigeant à la Grande-Bretagne. En outre, ses déclarations lors d’une conférence de l’AIPAC, selon lesquelles Jérusalem devait devenir la capitale d’Israël, le situent encore plus à droite que le gouvernement israélien, où il retrouve Benjamin Netanyahou.

Le plus inquiétant, cependant, n’est pas le discours d’Obama, qui n’apportait, au fond, rien de nouveau (à part quelques références — occasion oblige — au pont aérien historique de Berlin), mais plutôt la réaction des Allemands, qui ont de toute évidence peu appris des leçons de l’histoire et manifestent toujours une prédilection pour les gigantesques rassemblements propagandistes, que ce soit pour Hitler à Nuremberg, pour Mikhail Gorbatchev lors de sa visite en Allemagne, pour le Dalaï Lama ou pour le soufflé Obama. Que les « fans » se rassemblent en masse dans les rues pour la « love parade », la Coupe du monde ou la popstar Obama, leur comportement suscite bien des craintes.

Car chez Barack Obama, l’apparence et la réalité sont fort éloignées l’une de l’autre, et son prétendu charisme est un produit des médias. A cet égard, cet article paru dans le Spiegel du 19 juillet est instructif : « Le sénateur de l’Illinois ne réalise pas le rêve que ses experts essaient de créer. »

En effet, les équipes de relations publiques s’efforcent, non sans mal, de donner du contenu à l’image qui a été sciemment construite : elles écrivent pour lui de beaux discours rassurants, prévoient toujours la claque, donnent l’impression que l’on assiste à une révolution de la base, mais les gens finissent par se détromper. « Obama se tient là, comme en bois. Ses bras pendent à ses côtés pendant de longues minutes, comme des nouilles humides. (...) C’est le candidat du confort. Il dit plein de bonnes choses. On ne s’arrête guère plus de hocher la tête en singe d’approbation. »

Derrière le spectacle, le vide

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Entre-temps, Howard Dean, le président du Comité national du Parti démocrate, a confié à une société de consultants britannique, WPP, les préparatifs de la Convention d’investiture de Denver, ainsi qu’à sa filiale Dewey Square Group. Depuis lors, les médias internationaux feraient rougir Goebbels dans la manière dont ils présentent Obama comme l’agent charismatique du changement, même s’il n’a pas proposé grand-chose de concret. Remarquez qu’en anglais, le mot changement (change) veut dire aussi « petite monnaie », autrement dit Obama rend des petites pièces pour les milliards qu’il reçoit.

A propos d’argent, les managers du candidat démocrate présumé ont réussi un autre coup médiatique : pour cinq millions de dollars, Barack Obama sera le co-sponsor des rapports de la NBC sur les Jeux olympiques, et ses spots télévisés seront diffusés en intermède. Mais pour quelqu’un qui collecte 52 millions de dollars de contributions électorales en un mois, ce n’est que de la menue monnaie. Il est vrai que, contrairement à ses promesses de campagne, Obama a renoncé depuis un mois à accepter le financement public de sa candidature, ce qui l’aurait obligé à plafonner ses dépenses.

Bien que Hillary Clinton ait obtenu, lors des élections primaires, plus de suffrages universels que tout autre candidat de l’histoire et qu’elle ait remporté les swing states (Etats fortement disputés par les républicains et les démocrates) pour la victoire en novembre, les médias martèlent depuis le début que Barack Obama est en tête. Leur seul et unique objectif était de gonfler Obama au détriment de Hillary, mais cela ne veut pas dire qu’il sera le prochain Président.

Car ce que les masses de ses jeunes admirateurs enthousiastes ne savent pas, c’est que ses partisans les plus engagés se font actuellement remercier sans cérémonie, les dirigeants afro-américains locaux se voient remplacer par des apparatchiks de l’establishment et son entourage le plus proche ne compte plus un seul Noir. Par contre, les organisations partisanes d’une convention ouverte et de l’investiture de Hillary Clinton foisonnent à travers tous les Etats-Unis.

A Berlin, alors que des représentants de l’une de ces organisations (PUMA*) distribuaient des tracts en ce sens, le service d’ordre d’Obama les confisqua, non seulement aux militants, mais à tous les participants qui se présentaient à l’entrée un tract à la main. Autant pour le « changement ».

Pour l’heure, que ce soit à Berlin ou ailleurs, le sénateur de l’Illinois n’a rien dit de l’effondrement du système financier international que nous vivons actuellement, ni de la débâcle écrasante des géants américains du crédit immobilier, Fannie Mae et Freddie Mac, Et même en suivant un entraînement à marche forcée, dispensé par des experts, il est peu probable qu’il ait quoi que ce soit à dire là-dessus dans les semaines à venir. Si les stratèges de campagne de Barack Obama veulent à tout prix éviter une convention ouverte, ce n’est certes pas qu’ils soient assurés de sa victoire.

Les événements des semaines et des mois à venir montreront à coup sûr que son image de nouveau Kennedy ou Martin Luther King est trompeuse. Il s’agit tout au plus d’un soufflé qui retombera dès son premier contact avec le monde extérieur.

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* « Party Unity My Ass » (PUMA), ou « l’unité du Parti, mon c.. »