Communiqués

« Ségolène Royal, notre vote nécessaire »

mardi 24 avril 2007

par Jacques Cheminade
« Crois pas c’qu’ils te disent, un autre monde est possible J’lutte pour él’ver celui qui m’écoute »

 Avant l’Album, Axiom

Nous voterons contre Nicolas Sarkozy et donc pour Ségolène Royal. Sans arrière-pensées ni hésitations, car si l’ancien ministre de l’Intérieur venait à occuper le fauteuil présidentiel, la France se soumettrait à la stratégie politique de MM. Blair, Cheney et Bush. Elle deviendrait ainsi un pion sans âme de l’oligarchie financière.

Le pedigree de M. Sarkozy est clair :

  1. Il est l’ami des néo-conservateurs américains dont il a longtemps recherché les faveurs. Il n’a pas hésité, après avoir visité M. Bush, à prendre des positions contraires à celles de son pays et de son propre gouvernement. Il fréquente assidûment le dirigeant de la droite de la droite israélienne, Bibi Netanyahou.
  2. Sa politique économique a toujours été ultra-libérale et sélectivement répressive. Au ministère de l’Economie et des Finances, il a ouvert la Bourse de Paris aux capitaux étrangers et pratiqué l’austérité sociale vis-à-vis des travailleurs. Au ministère de l’Intérieur, il a été dur vis-à-vis de la petite délinquance des plus démunis et laxiste vis-à-vis de la grande délinquance financière.
  3. Sa personnalité n’est pas fiable par rapport aux responsabilités auxquelles il prétend. Refusant toute introspection, rejetant comme absurde le « connais-toi toi même » de Socrate, il pratique une fuite en avant dans l’activisme et la recherche du pouvoir pour le pouvoir.
  4. Il est prêt, pour exercer ce pouvoir, à être un homme de caoutchouc, mêlant Valmy, la France Libre et Jaurès à des compliments aux électeurs du Front national et à des références aux croisades.

Il se prétend le « protecteur » de tous les Français qui ont « peur de l’avenir », alors que, de fait, il a été et demeure le protecteur-protégé des Bouygues, Lagardère et Bolloré, sans parler d’autres plus exotiques. Au sens propre du terme, sa candidature est inadmissible : pour lui, la France n’est pas cette « certaine idée » du général de Gaulle, mais un conglomérat d’intérêts dont il croit pouvoir devenir le maître et dont il est en réalité le serviteur.

Le vote pour Ségolène Royal se justifie donc pleinement pour éviter que Nicolas Sarkozy arrive au pouvoir. Il faut cependant le dire franchement : en ce 23 avril, le vote du premier tour lui offre toutes les chances de l’emporter au second. Une campagne comme celle de Lionel Jospin contre Jacques Chirac en 1995, n’apportant rien entre les deux tours, serait donc un désastre pour nous tous.

Ségolène Royal, qui, dans sa déclaration du 22 avril, a condamné les puissances de l’argent et la loi des marchés financiers, doit proposer une politique plus hardie et plus précise, qui fasse sauter le verrou du contrôle de l’oligarchie. Sans être aventuriste, cette politique doit avoir pour horizon un nouvel ordre économique et monétaire international, un nouveau Bretton Woods et un Pont terrestre eurasiatique « de l’Atlantique à la mer de Chine », vers l’Inde, la Russie et la Chine, une Europe réellement vouée à de grands projets, de grands travaux et des échanges culturels dignes de ce nom et une France, comme elle l’a dit, retrouvant l’élan social de l’après-guerre et en particulier du préambule de la Constitution de 1946. La barre doit être placée haut, car c’est à un retour du fascisme auquel nous devons faire face aujourd’hui, comme pendant la crise des années trente.

En négatif, Ségolène Royal doit organiser le combat contre Bush, Cheney et Blair et les intérêts qui les promeuvent, en prenant sérieusement contact avec ceux qui les combattent aux Etats-Unis.

En positif, elle doit proposer une politique de banque nationale et de crédit productif public pour financer les travaux et les projets nationaux et européens.

Il s’agit d’un changement profond, mais en période de crise, un éléphant qui extrapole mène au désastre. Il nous faut une femme libre, pour surmonter la crise du monde et de notre pays par des initiatives audacieuses rompant avec la règle du jeu, y compris de son propre parti. Si elle le fait, Ségolène Royal, avec son propre instinct et son mauvais caractère - qui est une qualité dans la tempête -, peut l’emporter.

Nous l’espérons. Quant aux électeurs de M. Bayrou, il serait immoral et ridicule que, d’abord attirés par la présence d’une « force nouvelle », ils se rallient ensuite piteusement au candidat de MM. Santini (l’homme des machines à voter douteuses), de Robien et Douste-Blazy. Et qu’ayant voté ou cru voter au premier tour contre une société bloquée, ils donnent leur voix au second tour à celui qui va davantage la verrouiller et l’asservir.

Ce n’est pas dans l’ignorance des dangers qui nous entourent mais en les défiant à leur juste mesure que nous trouverons notre salut. En rétablissant une société belle, non plus livrée à cette ridicule foire aux vanités qu’ont été les débats d’après les résultats du premier tour, mais trouvant des hommes et des femmes capables de dépasser l’éternel conflit entre le naturel et le rationnel, et de mettre leurs émotions les plus intimes et les plus intenses au service de la justice et de la raison.

Tel est l’enjeu du second tour, et c’est pourquoi nous devons écarter du pouvoir la déraison et l’injustice de Nicolas Sarkozy, ce qui est possible pourvu que nous préparions une réelle relève.