Les écrits de Lyndon LaRouche

L’histoire actuelle vue comme une tragédie - la conception stratégique de la Russie et l’Iran

mardi 3 avril 2007, par Lyndon LaRouche

De même que l’incompétence obstinée, affichée par presque tous les économistes du monde, reflète leur adhésion à des méthodes mécanistes et statistiques cartésiennes, contrairement aux principes riemanniens de la dynamique, un problème similaire imprègne souvent les considérations diplomatiques et stratégiques de la plupart des nations du monde. L’incapacité de certains cercles iraniens influents à comprendre l’irritation du président russe Vladimir Poutine est un exemple de ce problème, en matière stratégique. On commet couramment le même type d’erreur de méthode dans la prévision économique.

Les observateurs ont remarqué une certaine tension dans les relations entre la Russie et l’Iran, en raison du rejet par Téhéran de la riposte flexible proposée par Moscou, face à la manière dont les Anglo-Américains utilisent le prétendu programme nucléaire militaire des Iraniens comme prétexte pour intensifier et étendre la guerre asymétrique sur le théâtre de l’Asie du Sud-Ouest.

Il y a deux points que le président Poutine semble avoir saisis, malheureusement ignorés des cercles influents en Iran et ailleurs. L’Iran n’est pas le seul à connaître ce problème de méthode, la « pensée stratégique » en Europe occidentale et centrale et chez la plupart des cercles dirigeants aux Etats-Unis reflète le même type d’erreur.

Pour le redire encore une fois : l’erreur marginale qu’expriment les points de vue de certaines factions iraniennes à cet égard fait partie d’une mosaïque de suppositions erronées tout aussi dangereuses de la part de représentants de nombreuses nations. Ceci inclut effectivement les cas de certaines parodies relativement simplistes de « pensée stratégique » en vigueur parmi d’importants cercles politiques professionnels, par exemple au sein du Congrès américain et chez les principaux candidats présidentiels, aux Etats-Unis.

Premier point auquel je fais référence : un commandant prudent doit toujours comprendre qui est le véritable ennemi. C’est souvent celui qui est rusé et déguisé en allié.

Ainsi, Bismarck eut raison de mener une guerre défensive contre l’agression de cette marionnette de la monarchie britannique qu’était Napoléon III, mais il eut tout aussi raison de s’opposer au Kaiser lorsqu’il refusa de mettre fin à la guerre après la défaite de Napoléon. A cause de cette erreur, une France enragée allait jouer le rôle de marionnette britannique lors des Première et Deuxième Guerres mondiales contre l’Eurasie continentale. De même, la dupe Guillaume II ainsi qu’un autre neveu d’Edouard VII, le tsar Nicolas II, acceptèrent de se faire la guerre, pour le plus grand plaisir d’un Kaiser austro-hongrois décadent. Tout ceci pour servir l’intention de Londres de faire en sorte que la Russie et l’Allemagne se détruisent mutuellement au cours des deux guerres mondiales géopolitiques. En prélude à la calamité de la Première Guerre mondiale, Guillaume II prépara lui-même le terrain de la guerre avec la Russie en limogeant le chancelier Bismarck alors qu’il voulait éviter à l’Allemagne de tomber dans le piège en soutenant les folies des Habsbourg dans les Balkans.

Le second point, c’est qu’un commandant prudent ne permet jamais à son ennemi de le berner en lui laissant gagner du terrain à l’endroit et au moment choisis par l’adversaire à son propre avantage. Ainsi, le seul et véritable ennemi de l’Iran réside à Londres et donc, chez les alliés de l’ancien vice-président américain Al Gore, téléguidés depuis Londres. Le Londres de Tony Blair est également l’ennemi des Etats-Unis et de l’Asie du Sud-Ouest. (...) La faction derrière Tony Blair représente la force qu’il faut vaincre, ou rendre pacifique par des moyens plus doux.

Sur ces deux points, l’attitude du président Poutine vis-à-vis de la réaction iranienne aux efforts anglo-américains pour étendre la guerre en Asie du Sud-Ouest a été prudente, alors que la réticence de certains Iraniens aux conseils du Président russe constitue une erreur tactique potentiellement néfaste, consistant à ne pas prendre en compte le caractère dynamique de la situation stratégique mondiale dans son ensemble.

Je m’explique, en commençant par un exemple tout à fait pertinent de l’histoire récente.

La guerre de Franklin Roosevelt

L’accession au pouvoir d’Adolf Hitler avait été parrainée et dirigée par la monarchie britannique et ses complices parmi les libéraux anglo-hollandais et la synarchie française, ainsi que par des cercles financiers américains favorables à Mussolini et à Hitler. Ayant compris cette situation stratégique, le président américain Franklin Roosevelt joua sur différentes complexités en Grande-Bretagne pour amener certains des anciens partisans d’Hitler à rejoindre une alliance de guerre (certes bien difficile) entre lui-même, Churchill, Staline et d’autres. Cette alliance assura la défaite du dessein nazi de conquête mondiale, de façon à mettre en place un système mondial fasciste sous le règne d’Hitler.

Cependant, après la mort prématurée de Roosevelt, le rapport de forces au sein des Etats-Unis changea : on s’éloigna de l’intention affichée par Roosevelt d’extirper tous les vestiges de soumission coloniale impérialiste dans l’après-guerre, au profit du rétablissement du pouvoir impérialiste que le président américain Dwight Eisenhower allait dénoncer sous le vocable de « complexe militaro-industriel ». L’insurrection orchestrée par ce « complexe » allait aboutir à l’abandon, au cours de la période 1967-1972, du système américain de politique économique, reflété dans le système de Bretton Woods à taux de change fixes, puis à la domination du libéralisme anglo-hollandais centré à Londres au cours de la période 1971-1981. Cette dérive mena à la ruine de l’économie agro-industrielle et précipita les Etats-Unis vers une forme de ruine « post-industrielle » ultra-décadente, anti-science et anti-technologie, qu’on appelle « mondialisation ». Voilà l’ennemi global essentiel des Etats-Unis.

Le changement de direction amorcé sous direction britannique à la mort du président Franklin Roosevelt, fut la première étape cruciale que franchirent des factions financières américaines proches de Londres et pro-britanniques, vers un retour à la domination du monde par le système libéral anglo-hollandais de monétarisme impérial. L’intention de cette faction anglophile de l’époque s’exprime aujourd’hui dans un système présenté sous forme d’une « mondialisation » sans Etats-nations, illustré par la « fraude du réchauffement climatique » ultra-malthusienne propagée par Al Gore.

Ainsi, la tendance que reflète aujourd’hui la vieille affinité entre Al Gore et le prince Charles, a poussé l’économie mondiale à un point de rupture sur les plans monétaro-financier et de l’économie physique. Les formes de gouvernement national souverain doivent donc engager une lutte à mort contre la conjugaison de l’effondrement financier mondial et de l’effondrement économique, dus à la propagation des effets de cette « mondialisation » néo-malthusienne, vouée à devenir un impérialisme mondial. Pour que l’Etat-nation souverain continue à exister en tant qu’institution, il est impératif de revenir à une politique économique et technologique intégrant le progrès scientifique, partout dans le monde.

Implicitement, le président russe Poutine l’a compris. En témoigne la référence répétée de son gouvernement au modèle de Franklin Roosevelt. Les pires ennemis de la civilisation sont incarnés par les forces défendant l’idéologie exprimée sous sa forme extrême par Albert Gore, le laquais du prince Philip. Voilà l’ennemi à vaincre.

Maintenant, pour assurer la défaite de Gore et Cie., on doit regagner les Etats-Unis à la cause d’un retour au type de politique incarné par l’ancien président Roosevelt. Pourvu que cette condition soit remplie, afin de sauver la civilisation au cours des générations à venir, il faut bâtir immédiatement une coalition de forces autour d’accords conclus entre quatre nations piliers, prévoyant le retour à l’intention de Roosevelt pour le monde de l’après-guerre : un système de coopération entre Etats-nations respectivement souverains, unis sous un seul système de taux de change fixes, de style américain, pour promouvoir le développement de l’ensemble de la planète.

Pour le dire plus simplement : du point de vue stratégique, tous les enjeux doivent être définis par rapport aux modes d’action nécessaires pour parvenir à instaurer un nouveau système économique mondial de développement coopératif, gouvernant les relations entre nations et peuples de toute la planète. L’adhésion des Etats-Unis, de la Russie, de la Chine et de l’Inde en tant que principaux partenaires d’un véritable programme de Nations unies est la précondition indispensable pour cela, qu’on ne saurait sacrifier à aucune autre.

La crise économique globale

Certains cercles dirigeants aux Etats-Unis me posent immanquablement une question du genre : « Nous tendons à être d’accord avec votre évaluation stratégique de la situation économique et monétaro-financière mondiale. Cependant, la situation politique n’est pas encore mûre pour le type de réformes que nécessiterait la relance future de l’économie. Ne pourriez-vous pas définir une étape intérimaire plus modeste, qu’on pourrait franchir entre-temps ? »

Les mieux informés d’entre eux savent, en fait, que le système monétaro-financier actuel n’est pas seulement en faillite, mais que son état commence à ressembler à celui de l’Allemagne de Weimar à la fin de 1923. Seul un nouveau système, soutenu par l’or américain, permit à l’époque de sauver (temporairement) l’Allemagne ; seul un changement tout aussi soudain et drastique pourrait aujourd’hui sauver l’économie américaine d’un sort bien pire qu’une dépression économique : un effondrement total généralisé. Le système actuel ne peut plus être réformé, il faut le remplacer par un système qui, suivant les dispositions du Préambule de la Constitution fédérale, fonctionnera sous la protection du redressement judiciaire.

Le souci de mes interlocuteurs, c’est que la machine politique du gouvernement américain n’est « pas prête » à accepter que je dirige la formulation et le lancement d’une telle réforme, bien qu’il n’existe aucune alternative disponible, même du point de vue de l’existence future des Etats-Unis en tant que nation.

L’élément politique nécessaire, dont dépend la réforme américaine, est de faire en sorte que les Etats-Unis, la Russie, la Chine et l’Inde constituent le principal comité de parrains et initiateurs d’une réforme générale, pratiquement instantanée, du système économique mondial. Un accord du type que je sais être possible du point de vue scientifique, entre ces quatre pouvoirs, un accord pour le retour à l’intention de Franklin Roosevelt de bâtir un système vigoureusement anti-colonialiste, tel que celui de Bretton Woods à taux de change fixes, dans l’après-guerre, rallierait immédiatement la majeure partie du potentiel commercial mondial, à une échelle suffisante pour rendre viables des mesures intérimaires d’urgence.
Nous devons reconnaître qu’on ne peut tolérer la folie génocidaire des plans de « mondialisation » proposés par ce fou furieux d’Al Gore. Nous devons reconnaître qu’il faut cesser d’utiliser l’Asie du Sud-Ouest comme champ de bataille pour les desseins anglo-hollandais libéraux visant à provoquer des perturbations stratégiques, et que seul un accord entre les Etats-Unis, la Russie, la Chine et l’Inde permettrait de parvenir à court terme à un tel but.

Ainsi, amener les Etats-Unis à engager des discussions officieuses avec des représentants des quatre puissances indiquées, ainsi qu’avec leurs proches partenaires moins importants, représente à la fois le remède essentiel et urgent à la crise économique globale en cours et une mobilisation de la volonté politique stratégique afin de neutraliser les tentatives d’enflammer le monde à partir de l’Asie du Sud-Ouest.

Nous devons choisir ce terrain historique comme le champ de bataille sur lequel nous allons combattre, et cet enjeu est celui pour lequel nous sommes tout à fait prêts à nous battre jusqu’à la victoire, pour le bien de l’humanité dans son ensemble. Entre-temps, évitons toutes les guerres qui pourraient détourner de cette voie le cours des affaires mondiales.