Les éditoriaux de Jacques Cheminade

Jeunesse et populisme

vendredi 6 septembre 2002

Face à la gravité de la crise, la création d’un mouvement de jeunesse est aujourd’hui nécessaire. Non pour des raisons biologiques, bien entendu, mais parce que la société actuelle n’assurant pas d’avenir aux jeunes, ceux-ci doivent prendre en main leur destin pour changer le monde, pour le remettre en accord avec un principe de justice.

Il s’agit donc d’abord d’une question de responsabilité et d’engagement. La société du spectacle, de la diversion et de la corruption au sein de laquelle nous vivons « provoque » les jeunes à réagir, à intervenir. Nous devons leur en donner les repères et les moyens, à l’échelle de notre pays, de l’Europe et du monde.

Naturellement, ces jeunes se conçoivent comme patriotes et citoyens du monde, ni « mondialistes », ni « chauvins ». Les meilleurs d’entre eux ont un appétit de connaissances pour se transformer et transformer les autres, y compris leurs propres parents. Plus que d’autres, ils sont capables de remettre en cause les postulats et les axiomes sur lesquels repose le système économique et politique dominant, de combattre l’injustice. Ils savent, mieux que personne, comment ils sont manipulés par la sous-culture qui leur est infligée.

Notre mission est d’alimenter chez eux une vision, un dessein collectif, et de les nourrir en idées permettant de relever le défi de l’époque. C’est cette plus haute qualité de vie mentale, de découverte, que les jeunes, dans un monde qui ne leur fournit ni emploi, ni sécurité, ni réelle éducation, sont mieux susceptibles d’assimiler. En un mot, il s’agit d’éveiller en eux l’enthousiasme, ce Dieu intérieur, et de laisser leur libre-arbitre ainsi suscité faire face à la réalité politique.

Cela n’a été réussi par aucun des grands mouvements du XIXème et XXème siècles. Soit parce que les jeunes ont été utilisés pour servir un dogme - révolutionnaire ou pas - préétabli, soit parce qu’au lieu de développer leurs facultés créatrices, on a encouragé hypocritement en eux leur apparence transitoire.

Je suis convaincu que la dérive populiste a été - et demeure - le pire aspect de cet échec. Le « populiste »juge et tranche sans faire l’effort de connaître et de comprendre. Il défend un territoire, un dogme, une ethnie ou un préjugé. Asocial, il a été la chair à canon, au cours de l’histoire européenne et au sein des intégrismes religieux américains, des mouvements fascistes. Le « populiste » n’accepte pas l’idée qu’il puisse y avoir un processus social dans lequel l’homme ne soit pas un ennemi pour l’homme.

Mouvement de jeunesse ne signifie donc pas cherche à créer des « Superman ». Il s’agit, comme Socrate, d’éveiller un pouvoir qui existe à l’intérieur de chacun d’entre nous, le pouvoir de découvrir des principes physiques universels, dans les arts et dans les sciences, et de partager ces découvertes.

A l’opposé du jeunisme populiste, il s’agit de l’éternelle jeunesse des idées.