Communiqués

Laissons les couteaux au vestiaire
Suscitons la paix par le développement mutuel

mardi 25 juillet 2006

Déclaration de Jacques Cheminade, candidat à l’élection présidentielle de 2007

Le 26 octobre 1990, j’écrivais dans Nouvelle Solidarité : « Voici le Liban outragé. Faut-il dissimuler notre émotion, cacher notre colère ? Nous le pouvons d’autant moins que la France n’a pas tenu son serment d’amitié. »

Ce que j’écris aujourd’hui engage autant la France et le Liban, mais dans un enjeu qui, cette fois, est à l’échelle de la guerre ou de la paix dans le monde. Puisse la nature du défi nous porter au-delà de nous-mêmes en nous grandissant à la mesure de nos prédécesseurs qui surent tenir leur rang.

Nous sommes aujourd’hui face au risque d’une guerre irrégulière permanente s’étendant à l’échelle du monde. Il serait vain d’en chercher la cause dans la crise régionale qui secoue l’Asie du Sud-Ouest, malgré toute la légitime colère qu’elle soulève en nous. La réalité est que les milieux impérialistes anglo-américains, pour qui le gouvernement israélien n’est qu’un idiot plein de sang et de fureur, enclenchent une stratégie de tension de Bombay à Beyrouth. L’oligarchie financière mondialiste qui les promeut entend rétablir la cartellisation des années trente et substituer à la loi des Etats-nations l’empire de la volonté de puissance. L’écrasement du Liban n’est qu’un exemple donné de cette criminelle volonté qui s’exprime dans les conditions de l’effondrement du système financier et monétaire international.

Aucune solution n’est durable si elle se limite à une région de notre planète. A une menace généralisée contre le droit des gens, leurs conditions d’existence et la paix entre les peuples, seul peut répondre un nouvel ordre économique et monétaire international basé sur le développement et le respect mutuels.

A court terme, il faut laisser les couteaux au vestiaire et arrêter les dégâts.

Au Liban, un cessez-le-feu immédiat inconditionnel et durable doit être imposé à Israël.

Les soldats israéliens prisonniers du Hezbollah doivent être immédiatement libérés, sous les auspices du Comité international de la Croix-rouge et, en contrepartie, Israël doit faire de même avec les soldats du Hezbollah qu’il détient.

Les fermes de Chebaa doivent être rendues sans conditions au Liban, suite à quoi, et seulement suite à quoi, une négociation pourra être entamée visant à intégrer les soldats du Hezbollah dans l’armée libanaise. Enfin, comme le propose Kofi Annan, une conférence internationale serait chargée de délimiter les frontières du Liban avec la Syrie et Israël, où se déploierait une force d’interposition.

Le mémorandum d’entente signé entre les forces patriotiques du général Aoun (CPL) et le Hezbollah constitue, dans cette perspective, un instrument d’approche satisfaisant.

La partition est donc connue ; il reste que chacun des choristes veuille bien la chanter. Pour notre part, nous devons appeler l’attention des autorités américaines, sans complaisance ni agressivité inutile, sur le fait que la seule alternative est la guerre, conjuguant l’invasion du Liban par les blindés israéliens et des frappes américaines contre les installations nucléaires iraniennes, ce qui conduirait fatalement à une crise globale de l’énergie et à la guerre de tous contre tous. Seuls les Cheney et les Rohatyn le souhaitent ; c’est pourquoi il faut éliminer leur influence au sein de l’administration américaine et du Parti démocrate, en soutenant, de part et d’autre de l’Atlantique, ceux qui s’efforcent d’y parvenir.

Plus de trois cents morts civils au Liban est un crime de guerre ; plus de cent morts civils à Gaza et la destruction de tout ce qui fait vivre les vivants, un crime contre l’humanité. Là aussi, on connaît la solution : création d’un Etat palestinien aux côtés d’Israël avec Jérusalem-est pour capitale, retour aux frontières de 1967 moyennant des échanges de territoires, un statut spécial pour les lieux saints et une solution juste au problème des réfugiés qui ne peut passer par un droit au retour généralisé. La déclaration des prisonniers, contresignée par des responsables du Hamas et du Fatah, reconnaissant de fait l’existence de l’Etat hébreu et les frontières de 1967, est un pas précieux dans la bonne direction.

Nous disposons donc, tant entre Israéliens et Palestiniens qu’entre Israéliens et Libanais, des nécessaires instruments de référence.

Reste à engager notre honneur, l’héritage de notre histoire et les moyens de notre sécurité nationale pour redonner au peuple palestinien la justice et le droit au développement, sauver le Liban et tracer la voie d’un nouvel ordre économique et monétaire international, au sein duquel le niveau de vie des humiliés et des offensés pourra s’élever jusqu’aux exigences de la dignité humaine. Sans quoi nous y perdrions notre âme.

Ayons le courage d’affronter le fascisme universel qui nous menace, suivant l’expression même du néo-conservateur américain Michael Ledeen, sans esprit de compromis, aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne comme à l’intérieur de nous-mêmes.