Communiqués

Face à la mondialisation, la chaise vide

lundi 31 octobre 2005

par Jacques Cheminade, Président de Solidarité et Progrès

La France vient d’essuyer, à Bruxelles et dans les négociations au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), une humiliation inacceptable.

La Commission européenne, dans une première approche, avait proposé d’abaisser les droits de douane prélevés sur les produits agricoles européens de 20 % à 50 %, soit une moyenne de 36 %, et de consentir une réduction de l’ordre de 60 % sur nos subventions directes à l’agriculture. La France avait mis en avant ses doutes sur les modalités de cette offre et Jacques Chirac avait indiqué que Paris pourrait, lors de la conférence ministérielle de Hong-Kong, s’opposer à un accord qui ne respecterait pas la dernière réforme de la politique agricole commune adoptée en juin 2001. La Commission, face à cette menace, semblait décidée à calmer le jeu.

Cependant, le commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson, le vendredi 28 octobre, comme si de rien n’était et contre toute logique de négociation équilibrée, a présenté une nouvelle proposition qui au contraire va plus loin que la précédente, prévoyant une baisse de 35 % à 60 % des droits de douane, soit 46 % en moyenne, et une réduction de 70 % des subventions directes à l’agriculture.

Cette attitude provocatrice et scandaleuse, tant vis à vis des intérêts des producteurs français que des traditions de de l’Union européenne, se situe dans le droit fil d’une politique de dérégulation libérale illustrée par les propos tenus par José Manuel Barroso le 24 octobre 2005 : « Si nous donnons à nos enfants la crainte de la mondialisation, alors nous ne sommes rien. »

Une telle approche, absolument complaisante vis à vis d’un capitalisme financier qui par ailleurs s’auto-détruit et évolue vers un système d’austérité sociale organisée, mérite une réponse sans ambiguïté.

La France, reprenant la politique du général de Gaulle face à de semblables provocations, doit leur opposer la politique de la chaise vide.

Est-il risqué d’être seul ? Non, si ce sont tous les autres qui se trouvent isolés face à la justice. Non car c’est en tous cas moins risqué que d’admettre, ensemble, un hara-kiri de notre production agricole et, bientôt, de notre production industrielle au seul bénéfice des cartels agro-alimentaires et financiers. Surtout, ne pas résister résolument serait pire qu’un crime, une faute, au moment où le système financier existant s’effondre sous le poids de ses propres exigences, de ses contradictions et de l’austérité sociale qu’il impose partout. Au moment, aussi, où l’affaiblissement de l’administration Bush-Cheney prive de protecteurs leurs amis européens.

Ce n’est donc pas ainsi contre l’Europe que nous devons opposer notre veto, mais contre un simulacre qu’on nous vend sous ce nom et que les peuples français et néerlandais ont déjà rejeté.

L’Europe est à reconstruire, contre Amsterdam, contre Maastricht, contre Nice, contre le pacte de stabilité et plus que tout contre la logique destructrice de la Banque centrale européenne, en s’appuyant sur une stratégie industrielle entamée par un groupe pionnier et le recours au crédit productif public pour lancer un plan de grands travaux à l’échelle eurasiatique.

Avoir admis les Barroso et les Mandelson aux postes qu’ils occupent a déjà été une preuve de faiblesse coupable ; au nom du patriotisme économique - un patriotisme de patriotes et de citoyens du monde - il est temps, plus que temps, de donner un coup d’arrêt à une Europe frauduleuse. Avec la perspective d’un Nouveau Bretton Wods, d’un Pont terrestre eurasiatique et d’un vrai protectionnisme, protégeant ce qui mérite de l’être contre les « prince des ténèbres » qui se pavanent sans coeur, sans morale et sans autre projet que leur arrogante soumission.

Pour plus de renseignements : veuillez contacter Christine Bierre : 01 76 69 14 50