Les éditoriaux de Jacques Cheminade

Quinquennat : non

vendredi 26 mai 2000

Alors que le système monétaire et financier international est à bout, que l’euro subit l’assaut de l’oligarchie anglo-américaine et que des actes de volonté s’imposent, toute la classe politique française se met à danser sur l’air du quiquennat. Cette dérobade face aux défis de l’époque est à la fois risible et dramatique : quand on n’a plus de vision, on joue avec les chiffres, deux fois cinq plutôt que deux fois sept, une fois sept plutôt que deux.

Tout d’abord, de la part de MM. Chirac et Jospin, c’est un aveu d’impuissance : ni l’un ni l’autre , visiblement, ne se sentent de taille à gouverner pendant quatorze ans. Le mentor de l’un, François Mitterrand, a jeté le discrédit sur la présidence par les dérives et le mensonge institutionalisé qui ont accompagné ses deux mandats, et l’autre, M. Chirac lui-même, l’a banalisée en ne tenant pas ses promesses électorales et en provoquant, deux ans après son élection, la défaite de son propre camp.

Ensuite, la réduction de la durée du mandat n’empêche en rien la constitution de dynasties politiques : aux EtatsUnis, les fils du sénateur Gore et du Président Bush s’affrontent sans que la durée - quatre ans renouvelables - de la présidence américaine ait empêché en quoi que ce soit leur sinistre emprise.

Enfin, le vrai problème n’est en rien celui-là. Il est doublement lié au caractère des hommes. D’une part, avec la médiocrité des générations post soixante-huitardes et la complicité des élus, l’image a tué le message. « La question, peut dire cyniquement un Alain Duhamel, est de savoir si, en 2002, le prochain duel présidentiel télévisé aura lieu au Lido ou au Palais omnisports de Bercy. » D’autre part, comme l’indique Jacques Attali, nos élites politiques pratiquent l’inceste administrative, en se sélectionnant sur leur capacité à faire des synthèses neutres et à servir l’Etat, quel qu’en soit le maître. Le résultat est de produire des hommes qui ne savent pas trancher et changer de jeu. Pour en avoir d’autres, la véritable urgence est une vraie démocratisation de l’enseignement, un financement de la vie politique qui ne favorise pas les partis installés et un retour à l’éducation du caractère.