Helga Zepp-LaRouche, présidente de l’Institut Schiller

Assurer la paix en rendant obsolète l’arme atomique

jeudi 19 décembre 2024, par Christine Bierre

La visioconférence de l’Institut Schiller, qui a réuni des centaines de participants les 7 et 8 décembre, fut l’occasion pour ses orateurs venant d’Afrique du Sud, Allemagne, Chine, Etats-Unis, France, Guyana, Iran, Russie et Slovaquie, d’échanger sur la façon de rétablir la paix et le développement en 2025.

Discours d’ouverture d’Helga Zepp-LaRouche à la visioconférence internationale del’Institut Schiller le 8 et 9 décembre 2024.


Résumé

Nous sommes peut-être à quelques semaines, quelques jours ou quelques heures de la plus grande catastrophe de l’histoire de l’humanité - à savoir son anéantissement potentiel dans une guerre thermonucléaire, a déclaré Mme LaRouche dès le départ, soulignant qu’il existe néanmoins une solution, un moyen d’échapper à ce danger.

Malgré toutes les mises en garde de Poutine, les Occidentaux ont autorisé l’Ukraine à utiliser leurs missiles à moyenne portée pour mener des attaques en profondeur sur le territoire russe, ignorant la mise à jour de la doctrine nucléaire russe fin septembre, qui stipule au point 11 que « l’agression contre la Russie et/ou ses alliés, par tout État non nucléaire avec la participation ou le soutien d’un État nucléaire, sera désormais considérée comme une attaque conjointe ». Ils n’ont pas non plus tenu compte du message sans ménagement envoyé par Poutine, via le lancement de son puissant missile hypersonique Orechnik contre une usine de Dnipro.

Plus grave encore, ils ont confirmé la crainte russe que les Etats-Unis envisagent effectivement d’utiliser l’arme atomique. L’amiral américain Thomas Buchanan du STRATCOM a ainsi déclaré le 20 novembre, au Center for Strategic and International Studies (CSIS) de Washington, que les États-Unis seraient prêts à un échange nucléaire si leur rôle de leadership mondial était remis en cause.

C’est la même mentalité de « Docteur Folamour » qui domine ailleurs en Occident. Kurt Campbell, secrétaire d’État adjoint, a récemment déclaré à des membres du Congrès que la Chine « n’est pas seulement un défi militaire ; c’est un défi généralisé. Il concerne les pays du Sud. Il concerne la technologie. Nous devons intensifier notre jeu dans tous les domaines ».

Face au risque imminent d’une guerre nucléaire, n’est-il pas urgent, a-t-elle demandé, de convenir d’une nouvelle architecture de sécurité et de développement mondiale, s’appuyant sur les principes de la paix de Westphalie de 1648, selon lesquels tout ordre de paix doit tenir compte des intérêts d’autrui ?

Rendre les armes nucléaires obsolètes, rétablir le développement

Au début des années 80, son défunt mari Lyndon LaRouche avait élaboré un plan de paix qui, au niveau militaire, appelait à un déploiement conjoint, par les Russes et les Américains, d’un bouclier de défense anti-missiles utilisant des armes à laser. L’idée était que ces armes à laser, frappant à la vitesse de la lumière, pourraient ainsi rendre les armes nucléaires obsolètes.

Sur le plan économique, LaRouche proposa en même temps que ces technologies très avancées des énergies dirigées soient massivement mises en œuvre dans l’économie civile soviétique et occidentale, afin de provoquer une onde de choc de productivité industrielle favorisant la coopération économique et donc la paix.

Mme LaRouche fait aujourd’hui le parallèle entre cette approche et le développement du missile Orechnik. Dans une déclaration du 10 novembre, Poutine a été explicite : « Un nombre suffisant de ces systèmes d’armement modernes nous met en position de pouvoir éliminer pratiquement le besoin d’employer des armes nucléaires. »

L’Orechnik est un missile balistique hypersonique à portée intermédiaire (3000 km), doté de six têtes autoguidées, contenant chacune six charges, nucléaires ou conventionnelles. Pouvant atteindre des vitesses jusqu’à Mach 11, toutes les capitales européennes sont à sa portée, sans qu’aucun système ne puisse l’arrêter.

Avec une énergie cinétique qui se transforme en énergie thermique, il atteint des températures presque solaires de 4000 degrés. Les caractéristiques hypersoniques de cette nouvelle arme signifient, pour Helga Zepp-LaRouche, que leurs concepteurs ont utilisé la physique de l’hydrodynamique dans les ondes de choc, des concepts qui intéressaient beaucoup LaRouche pour leur application tant dans le domaine militaire qu’économique. (Voir son article « Qu’est-ce qu’une onde de choc économique ? », publié en 1982.)

Les conditions de la paix

N’est-ce pas une ironie de l’histoire, demanda Mme LaRouche, qu’aujourd’hui, dans deux domaines existentiels, la défense et l’économie, ce soient les nations qui appliquent le plus les principes mis de l’avant par LaRouche – la Russie et la Chine – qui obtiennent les meilleurs résultats ? Ne serait-il pas temps d’examiner les raisons, épistémologiques et autres, de ce constat ?

A la fin de la Guerre froide, il aurait été tout à fait possible d’instaurer un ordre de paix mondial, basé sur les propositions de LaRouche consistant à investir massivement dans les infrastructures, connues sous le nom de « Triangle productif Paris-Berlin-Vienne » et de « Pont terrestre eurasiatique », vecteurs d’une renaissance industrielle.

Malheureusement, ce sont les thèses de « la fin de l’histoire » de Fukuyama qui ont été adoptées. Le monde transatlantique abandonna les principes sains de l’économie réelle, au profit de l’externalisation vers des marchés du travail bon marché, des chaînes de valeur mondialisées, des introductions en bourse et la maximisation des profits par la spéculation à haut risque sur les marchés dérivés.

La Chine, au contraire, avait déjà commencé à inverser l’orientation anti-scientifique de la Révolution culturelle avec la politique de réforme et d’ouverture de Deng Xiaoping, et elle a fait de nouvelles avancées qualitatives grâce à la théorie économique du président Xi Jinping.

Après avoir sorti de la pauvreté 850 millions de ses citoyens et lancé les Nouvelles Routes de la soie, elle a mis l’accent sur le développement de haute qualité. Aujourd’hui, la Chine est leader dans 37 des 44 technologies, dont la défense, l’espace, la robotique, l’énergie, l’environnement, la biotechnologie, l’intelligence artificielle, l’IA et la technologie quantique.

Depuis 2023, Xi Jinping a proposé le concept de « nouvelles forces productives de qualité », qui devraient être

guidées par de nouvelles théories des forces productives ». D’après ce concept, « les percées technologiques révolutionnaires permettront d’accélérer l’émergence de nouvelles forces productives de qualité, donnant naissance à de nouvelles industries, de nouveaux modèles commerciaux et de nouveaux moteurs de croissance. Tout cela conduira à une explosion d’innovations originales et disruptives dans la science et la technologie.

Il est évident qu’en parlant d’explosion d’« innovation disruptive », le président Xi Jinping est arrivé essentiellement à la même science économique que son défunt mari, Lyndon LaRouche.

Toute sa méthode est basée sur la compréhension que les lois de l’univers physique sont par nature anti-entropiques et que toute avancée qualitative dans la découverte de nouveaux principes physiques universels est nécessairement de nature disruptive, provoquant une augmentation non linéaire des degrés de liberté dans les effets de la nouvelle découverte. Le critère de mesure déterminant si cette découverte peut être utile à la survie à long terme de l’humanité, est qu’elle doit conduire à un accroissement de la densité de population potentielle relative.

Rejetons l’idée que les relations entre les nations sont un jeu à somme nulle, où l’une serait au sommet et l’autre perdrait. Nous sommes des humains, pas des bêtes sauvages !

Pour sortir de cette crise, nous devons convaincre les nations de l’Occident d’abandonner leur arrogance euro-centrique pour coopérer avec les nations du Sud global (qui, avec 85 % de la population humaine, représentent la majorité mondiale), afin de construire un nouvel ordre économique international juste, basé sur les cinq principes de la Coexistence pacifique et la Charte des Nations unies.

Pour cela, nous devons éliminer définitivement de notre pensée tous les axiomes oligarchiques et les remplacer par la philosophie de la Coincidentia Oppositorum, la coïncidence des opposés développée par Nicolas de Cues, qui nous permet d’appréhender l’humanité comme un tout, un « Un supérieur », doté d’une puissance plus grande que celle de ses multiples composants.

La 9e symphonie de Beethoven doit devenir l’étoile qui nous guide. Dans cette œuvre, Beethoven a mis en musique le poème de Friedrich Schiller, « l’Ode à la joie » : « Tous les hommes deviendront frères », car c’est cela, être humain !

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