Bien que nous ayons conscience des limites du nouveau président élu et de ses capacités à obtenir une paix durable, cette déclaration est d’une grande importance.
Joe Lauria est rédacteur-en-chef de Consortium News et ancien correspondant aux Nations unies pour le Wall Street Journal, le Boston Globe et d’autres journaux, dont The Montreal Gazette, le London Daily Mail et The Star of Johannesburg. Il a été journaliste d’investigation pour le Sunday Times of London, journaliste financier pour Bloomberg News et a commencé sa carrière professionnelle à 19 ans comme pigiste pour le New York Times.
Il est l’auteur de deux livres, A Political Odyssey, avec le sénateur Mike Gravel, préfacé par Daniel Ellsberg, et How I Lost By Hillary Clinton, préfacé par Julian Assange.
Le nouveau président a déclaré au Time qu’il est « en désaccord total » avec les tirs de missiles américains sur la Russie, des mots qui apaiseront peut-être les tensions nucléaires entre Washington & Moscou
Le président élu Donald Trump a accusé l’administration Biden d’avoir « intensifié cette guerre » en Ukraine et de l’avoir « aggravée » en permettant que des missiles ATACMS américains longue portée soient tirés depuis l’Ukraine jusque dans les profondeurs de la Russie.
Je suis en désaccord absolu avec tout tir de missiles à des centaines de kilomètres à l’intérieur de la Russie, a déclaré Trump au magazine Time dans une interview publiée jeudi. Il a ajouté : ’Pourquoi faisons-nous cela ? Nous ne faisons qu’intensifier cette guerre et l’aggraver. Cela n’aurait pas dû être autorisé. Aujourd’hui, non seulement ils utilisent des missiles, mais aussi d’autres types d’armes. Et je pense que c’est une énorme erreur, une très grave erreur.’
Jeudi dernier, l’ancien inspecteur en désarmement des Nations unies, Scott Ritter, a passé une journée dans le labyrinthe des bureaux du Capitole pour faire pression sur les membres du Congrès et leurs collaborateurs afin d’empêcher les États-Unis d’attaquer la Russie avec des ATACMS. Selon M. Ritter, une telle mesure suffirait à réduire la menace d’un échange nucléaire avec la Russie, risque potentiel si les attaques de missiles se poursuivent. Parmi les mesures préconisées par M. Ritter aux membres républicains du Congrès, citons la transmission d’informations à l’équipe de transition de M. Trump afin que ce dernier déclare immédiatement qu’après son investiture, il ordonnera l’arrêt des tirs de missiles ATACMS vers la Russie. Une telle déclaration de Trump, a soutenu Ritter au Capitole, réduirait les tensions avec Moscou au sujet des ATACMS et permettrait peut-être d’éviter une catastrophe. Les commentaires de Trump au Time correspondaient à ce que Ritter avait à l’esprit.
Trump a déclaré :
Je pense qu’à l’heure actuelle, la chose la plus dangereuse le fait que Zelensky a décidé, avec, j’imagine, l’approbation du président, de commencer à tirer des missiles sur la Russie. C’est une escalade majeure. C’est une décision insensée. Mais j’imagine que certains attendent que je sois là pour agir. Ce serait vraiment très judicieux.
L’inexplicable changement de cap irresponsable de Biden
Il y a tout juste deux mois, en septembre, le président Joe Biden a cédé aux réalistes du Pentagone en s’opposant à ce que les missiles britanniques à longue portée Storm Shadow soient tirés par l’Ukraine en direction de la Russie, de crainte de provoquer une confrontation militaire directe entre l’OTAN et la Russie, avec tout ce que cela implique.
Poutine avait alors mis en garde contre la possibilité que les soldats britanniques présents sur le terrain en Ukraine lancent les missiles britanniques en Russie avec le soutien géostratégique des États-Unis, signifiant ainsi que
les pays de l’OTAN - les États-Unis et les pays européens - sont en guerre contre la Russie. Si tel devait être le cas, nous prendrions les décisions qui s’imposent en réponse aux menaces pesant sur nous, en gardant à l’esprit que la nature du conflit a changé.
Il s’agissait d’un avertissement clair que des cibles britanniques et américaines pourraient être touchées. M. Biden a donc sagement fait marche arrière.
C’était la deuxième fois que Biden se rangeait à l’avis du Pentagone contre les néoconservateurs de son administration pour éviter une guerre directe avec la Russie.
La première fois, c’était en mars 2022, lorsque son secrétaire d’État néoconservateur Antony Blinken était sorti du rang en annonçant que les États-Unis donneraient à la Pologne, membre de l’OTAN, le « feu vert » pour envoyer des avions de combat Mig-29 en Ukraine afin de faire respecter une zone d’exclusion aérienne contre les avions russes.
Les membres du Congrès et les médias ont ensuite fait pression sur Biden pour qu’il approuve cette décision, jusqu’à ce que des têtes froides du ministère de la Défense des États-Unis, le plus grand pourvoyeur de violence de l’histoire, interviennent pour l’en empêcher.
M. Biden s’est finalement aligné sur le Pentagone, et il ne pouvait pas être plus explicite sur les raisons de ce choix. Il s’est opposé à une zone d’exclusion aérienne de l’OTAN au-dessus de l’Ukraine pour lutter contre les avions russes, a-t-il déclaré, parce que :
cela s’appelle la Troisième Guerre mondiale, d’accord ? Soyons clairs, les gars. Nous ne ferons pas la troisième guerre mondiale en Ukraine.
Mais après la défaite de son parti à la Maison-Blanche en novembre, M. Biden est soudain revenu sur ses positions judicieuses et a poussé le Pentagone à prendre le pari que les avertissements de la Russie ne seraient que du bluff et ne déboucheraient pas sur un conflit nucléaire. Alors qu’il n’a pas autorisé les attaques britanniques de missiles à longue portée contre la Russie en septembre, et encore moins les ATACMS américains, il a finalement autorisé les frappes d’ATACMS, risquant ainsi de voir la Russie prendre des mesures concrètes sur des cibles américaines.
Reste à voir si les propos de Trump peuvent rassurer le Kremlin.