Corona-krach : la contagion gagne le système financier

mardi 17 mars 2020, par Christine Bierre

Il faut remonter aux deux conflagrations du XX e siècle, voire même au Moyen Age, pour trouver une situation aussi dangereuse que celle que nous vivons aujourd’hui. Trois phénomènes se conjuguent : un nouveau virus très contagieux qui sème la peur et dont on ne connaît pas encore la force létale ; un système financier international que des spéculations insensées et des algorithmes font tourner à une vitesse folle ; une oligarchie anglo-américaine aux abois, tentée par la guerre nucléaire pour maintenir coûte que coûte son pouvoir.

La situation est, en même temps, propice à des changements pour le meilleur, car c’est lors de telles crises que les hommes peuvent renoncer aux pratiques qui les ont conduits au bord du gouffre.

L’appel de Vladimir Poutine à un Sommet des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU pour traiter de ces problèmes, désormais soutenu par la France, la Chine et les Etats-Unis, fait son chemin. Mais comme notre amie Helga Zepp-LaRouche le souligne dans son appel, seule l’adoption des quatre grands principes économiques de Lyndon LaRouche pourra réellement changer la donne économique et politique dans le monde. Mobilisons-nous pour soutenir ces initiatives !

Mondialisation, chute en fin ?

Outre la menace que constitue ce virus pour notre santé, la principale crise pourrait venir de l’onde de choc propagée par cette épidémie sur une mondialisation brinquebalante et sur un système financier déjà au bord du gouffre, surchauffé par les pratiques spéculatives.

La prise de conscience que la France ne serait pas en mesure de protéger sa population car la production de masques anti-virus a été largement délocalisée en Chine, qui les utilise pour protéger sa propre population, a constitué un brutal réveil contre une mondialisation sauvage qui nous met aujourd’hui à la merci de tous les dangers.

La réaction de Bruno Le Maire, notre ministre de l’Economie et des Finances, reflète parfaitement ce rejet croissant de la mondialisation : « L’épidémie du coronavirus est un ‘game changer’ dans la mondialisation » , a-t-il déclaré à Athènes le 25 février. Elle pose « la nécessité impérative de relocaliser un certain nombre d’activités et d’être plus indépendant sur un certain nombre de chaînes de production ». En ce qui concerne le secteur de la santé et des médicaments, « nous ne pouvons pas continuer à dépendre à 80 % ou 85 % de principes actifs pour les médicaments qui sont produits en Chine ; ce serait irresponsable et déraisonnable ».

Cependant, l’imbrication économique est aujourd’hui telle qu’une dé-mondialisation irréfléchie, visant à retourner au plus vite vers un passé mythique, serait le meilleur moyen d’envoyer l’humanité en enfer. Car si l’on supprime ces chaînes de production transnationales sans les remplacer par des capacités productives opérationnelles dans chacun de nos pays, les faillites et le chômage exploseront à l’échelle internationale. La construction d’une nouvelle communauté de destin partagée entre nations souveraines, qu’il faut entreprendre tout de suite, prendra donc un certain temps.

La « mondialisation heureuse » tourne au cauchemar

Remontons à l’origine de cette crise, dont la cause est non pas l’internationalisation de l’économie (qui a toujours existé et qui est une bonne chose), mais la mondialisation financière. A la mort des accords de Bretton Woods en 1971, les élites transnationales anglo-américaines, rapidement suivies par celles du monde entier, décidèrent d’abandonner le modèle de l’Etat-nation souverain comme cadre naturel à l’émergence de nations prospères bénéficiant d’une autosuffisance économique, pour se lancer dans la construction d’une mondialisation financière fondée sur l’accumulation de profits rapides et mirobolants dans les pays à bas salaires. Au détriment souvent de leurs propres populations et de nos classes moyennes et laborieuses. C’est là qu’ils installèrent les chaînes de production industrielles mondialisées qui alimentent aujourd’hui, dans les pays occidentaux, une économie entièrement tirée par l’achat de produits de consommation aux plus bas coûts.

Les statistiques sont cruelles. La part de la Chine dans la richesse mondiale est passée de 3 % en 2003, au moment du SRAS, à 15 % aujourd’hui. Les secteurs où la France est la plus dépendante de la Chine sont 1) le tourisme, avec 2,5 millions de visiteurs chinois en 2019 ; 2) l’industrie du luxe, avec LVMH, dont le chiffre d’affaire est passé de 2,6 milliards en 2006 à 13,5 milliards en 2018 ; 3) la high-tech, dont 30 % des produits informatiques et électroniques sont importés de Chine, et 4) le textile et l’habillement, qui représentent 29 %.

L’onde de choc du coronavirus

Cette extrême dépendance signifie que le moindre retard dans la production des usines chinoises se répercute par des pertes sèches dans les chaînes de commercialisation occidentales. Si, de surcroît, l’épidémie s’étend au monde entier, comme c’est le cas, la crise de l’offre, conséquence de la rupture d’approvisionnement en produits venant de Chine pour être vendus, se conjuguera avec une crise de la demande : les personnes frappées par des mesures de quarantaine ne pourront plus acheter dans les magasins occidentaux. Et ce, pendant des mois ! Conséquence : outre les avions, hôtels, restaurants et magasins vides, des goulets d’étranglement dans la distribution et dans la production provoquant des pertes inestimables.

En Chine, suite à la quarantaine, production, commandes, exportations et emplois sont à leurs plus bas historiques. La consommation d’électricité est à 60 % de la normale et si l’économie productive redémarre, c’est seulement à 40-50 %, car des millions de PME et PMI n’ont pas encore repris le travail.

Selon les chiffres du Bureau national des statistiques chinois publiés le 29 février, l’indice PMI manufacturier qui signale, au-dessus de 50 points, une expansion de l’activité, et en-dessous, une contraction, est tombé de 50 à 35,7 dans le secteur manufacturier et même à 29,6 dans les services. Ce qui fait dire aux économistes de la Société Générale, que « le choc de l’épidémie de Covid 19 sur l’économie chinoise est encore plus grave que le choc Lehman Brothers, notamment dans le secteur des services » .

La contagion gagne le système financier

Jusque-là, les bourses s’étaient relativement bien tenues, mais avec la propagation de l’épidémie à l’Europe via l’Italie, et au Moyen-Orient via l’Iran, ainsi qu’à de nombreux autres pays, la contagion a gagné les marchés. La semaine du 24 au 29 février a vu les principaux indices chuter de 12 %, avec des pertes de 5000 milliards de dollars.

Là aussi, les Occidentaux risquent de payer très cher le fait d’avoir abandonné totalement la production aux pays émergents et d’avoir misé sur une économie de consommation, dopée par une financiarisation et une titrisation des flux financiers liés aux dépenses et à la dette des consommateurs. Explication : les paiements que vous effectuez pour une chambre d’hôtel, vos courses ou vos factures de gaz et d’électricité, par exemple, alimentent souvent toute une série de « véhicules financiers » qui prennent chacun une part des profits. Utiliser ainsi votre argent dans la spéculation financière, une « industrie » en pleine expansion depuis 50 ans, est devenu beaucoup plus « rentable » que d’investir dans l’économie productive (industrie, infrastructures, etc.). Voilà pourquoi nos pays sont devenus totalement dépendants des chaînes d’approvisionnement industriel à bas coûts depuis les pays émergents, sous le contrôle des cartels internationaux.

Imposez une quarantaine quelque part, et l’arrêt de ces chaînes d’approvisionnement provoquera des effets déstabilisateurs tout le long de la finance mondialisée. Cela peut être temporaire, mais les fortes baisses enregistrées dans les valeurs des banques et des compagnies d’assurance notamment, pourraient faire sauter la digue du système financier international en provoquant l’effondrement de la bulle des 700 000 milliards de dollars en contrats de produits dérivés et de leurs contreparties dans les compagnies d’assurance.

On le voit, cette crise exige un changement global d’orientation.
Si les épidémies, la crise et la guerre font leur retour indécent sur la scène internationale, c’est que l’humanité a oublié les principes élémentaires pour développer des économies saines.

Pour changer cela, que faire ? il faudra écouter les sages principes économiques de Lyndon LaRouche !