Nouvelles encourageantes de Corée

mardi 9 janvier 2018

Nous assistons en ce début d’année à des développements inattendus, et d’autres vont sans doute survenir. Ces développements reflètent le changement de paradigme global en cours, et non seulement tel ou tel facteur particulier. C’est ainsi qu’Emmanuel Macron a déclaré hier à Xi’an (le berceau historique des Routes de la soie) que la Chine « a réalisé un rêve » en réinventant les Routes de la soie, qui « réactivent un imaginaire de civilisation ». En affirmant que la France, l’Europe et la Chine devaient travailler ensemble pour le futur, le président français a pris les devants par rapport aux élites transatlantiques, en particulier à Berlin et à Bruxelles, qui s’accrochent obstinément à leurs dogmes monétaristes et géopolitiques.

D’un autre côté, la crise coréenne semble bien être sur la voie de la résolution. Aujourd’hui même ont lieu les pourparlers entre les deux voisins de la péninsule, à la « Maison de la paix », dans le village de Panmunjon, alors que le dialogue était rompu depuis près de deux ans. La semaine dernière, les États-Unis et la Corée du Sud se sont accordés pour reporter leurs exercices militaires conjoints, qui se déroulent habituellement en février-mars, à après les jeux olympiques et paralympiques de Pyeongchang, qui se concluront le 18 mars. Ceci, alors que le 30 décembre, à la question d’un journaliste lui demandant si les États-Unis envisageaient le report des exercices, le secrétaire américain à la Défense, le général Mattis, avait répondu catégoriquement « non ».

Donald Trump a déclaré ce week-end qu’il était « tout à fait prêt à parler avec [Kim Jong-un] si la rencontre se déroule bien », faisant référence à la discussion inter-coréenne de Panmunjon. « J’ai toujours cru dans le dialogue (…), et j’espère que les Nord-coréens se rendront aux jeux olympiques, et que les choses pourront se résoudre à partir de là. Donc je soutiens cela à 100 % », a-t-il affirmé, selon le journal The Hill.

Les présidents américain et français se sont entretenus samedi à propos de la Corée, « afin de faire le point sur l’évolution de la situation dans la péninsule coréenne et de souligner la détermination américaine, sud-coréenne et internationale à parvenir à la dénucléarisation complète de la Corée du Nord », a rapporté dimanche la Maison-Blanche (source Europe1).

Reprise du dialogue inter-coréen

La presse l’a très peu mentionné, mais c’est bien le président nord-coréen qui a fait le premier pas, lors de son discours du Nouvel an. D’un côté, Kim Jong-un a fait valoir auprès des États-Unis la puissance nucléaire dissuasive désormais détenue par la Corée du Nord – ce qui a donné lieu au tweet « cour de récréation » de Donald Trump sur son « plus gros bouton » –, mais il a également souligné la nécessité d’apaiser les tensions sur la péninsule et d’améliorer les relations avec la Corée du Sud, et a exprimé son souhait qu’une délégation nord-coréenne puisse participer aux jeux olympiques.

Le gouvernement de Séoul s’est immédiatement félicité de l’ouverture de Kim : « Nous avons toujours exprimé notre volonté de parler avec la Corée du Nord à tout moment et en tout lieu, si cela peut aider à rétablir les relations inter-coréennes et mener à la paix dans la péninsule coréenne », a déclaré le 1er janvier un porte-parole de la Maison Bleue présidentielle.

Suite à cet échange, la Corée du Sud a proposé à son voisin du Nord de reprendre le dialogue, et d’organiser pour cela des pourparlers diplomatiques le 9 janvier à Panmunjon. Le 3 janvier, la ligne de communication téléphonique a été rétablie ; comme l’a rapporté le Korea Herald, le Nord a appelé le Sud pendant 20 minutes. « Rétablir les communications est essentiel », a déclaré Yoon Young-chan, porte-parole de la présidence sud-coréenne. « Nous estimons que nous disposons désormais d’une structure [inter-coréenne] nous permettant de nous parler à tout moment. (…) Je crois que c’est le signe d’une évolution vers un environnement où la communication sera toujours possible ».

Au-delà des détails, c’est bien l’horizon promu par la Russie et de la Chine, de développement économique mutuel de l’ensemble de la péninsule coréenne, qui est en train de l’emporter. Car, si l’on peut douter que Kim Jong-un accepte de se défaire de l’arme nucléaire, ne voulant pas connaître le même sort qu’un Kadhafi ou qu’un Saddam Hussein, seule l’initiative des Nouvelles Routes de la soie, portée par la Chine, offre la possibilité à tous les acteurs de sortir de la crise par le haut, notamment à travers le développement d’un corridor de développement joignant la Chine à la Russie via la péninsule coréenne, comme cela avait été discuté au début des années 2000 avec la « politique radieuse » (« Sunshine policy »).

Nikki Haley, l’ambassadrice américaine aux Nations unies, en qualifiant les développements de ces derniers jours de « rafistolage », a perdu une occasion de se taire. Elle incarne bel et bien une élite incapable de se remettre en cause face à la réalité d’un monde en pleine transformation, où la vieille géopolitique doit laisser la place à une politique « de détente, d’entente et de coopération », comme le disait le général de Gaulle.