L’Occident finira-t-il comme la dernière grenouille au fond du puits ?

vendredi 27 octobre 2017

Le XIXe Congrès du Parti communiste chinois (PCC) vient de se terminer, consacrant le président Xi Jinping et sa vision de Nouvelles Routes de la soie, qui a été inscrite dans la Charte du PCC (ce qui revient à l’inscrire dans la constitution du pays). La résolution finale contient un appel vibrant à donner à la Chine un rôle de premier plan dans la construction d’une nouvelle ère de l’humanité. « La Chine reste ferme dans son engagement à renforcer l’amitié et la coopération avec les autres pays sur la base des Cinq principes de la coexistence pacifique. Elle compte promouvoir activement la coopération internationale à travers l’initiative de la Ceinture et de la route, (…) afin d’établir dans le monde une nouvelle forme de relations entre les nations, basées sur le respect mutuel, l’équité, la justice, et la coopération gagnant-gagnant au sein d’une communauté partageant le futur de l’humanité ».

Les grands médias occidentaux ont fait peu de cas de cette déclaration d’intention, qui est pourtant tout à fait cohérente avec les principes énoncés dans la Charte des Nations unies, et ils ont continué dans le registre catastrophiste de la terrible dictature rouge et du péril jaune. La BBC a publié dimanche dernier une étude montrant que « plus de 170 ministres et de secrétaires d’État ont été limogés et mis en prison depuis l’arrivée de Xi au pouvoir, accusés de corruption, de mauvais comportement ou de violation de la discipline du parti ». En cinq ans, 35 membres du Comité central du PCC ont été recadrés, ce qui est autant qu’entre 1949 et 2012. D’après les chiffres officiels, environ 1,34 millions (!) de responsables de tous niveaux ont été limogés ou soumis à des mesures disciplinaires au cours de ce premier mandat de Xi. Bien entendu, la BBC saisit l’occasion non pas pour féliciter Xi de son dur combat contre la gangrène de la corruption, mais pour l’accuser d’opérer une purge politique comparable aux horreurs de la Révolution culturelle sous Mao, alors qu’il y a cinq ans la BBC (comme la plupart des médias occidentaux) publiait étude après étude sur l’état de corruption sévissant en Chine...

En France, le journal Le Monde, grand pilier de la démocratie et des droits de l’homme, est évidemment monté au banc des accusateurs, notamment par la voix de l’éditorialiste Sylvie Kauffmann, dont le ton sentencieux doit irrésistiblement nous faire trembler : « Si l’’ère’ est nouvelle, cependant, le modèle de la concentration des pouvoirs dans les mains d’un seul homme et de son parti, lui, est familier. Cela s’appelle une dictature ». Kauffmann cite le sinologue François Godement, du European Council on Foreign relations, pour qui l’ambition de Xi Jinping, s’appuyant sur Internet et le big data, « dépasse Orwell ». Il serait sans doute déplacé de poser ici la question des ambitions d’un certain Xavier Niel, dieu tout puissant de la téléphonie, et propriétaire du Groupe Le Monde...

Sortir du puits

Du point de vue chinois, ce flot d’incompréhensions, de mensonges et de mauvaise foi proférés par les médias occidentaux à propos de la Chine est avant tout un problème pour l’Occident, pas pour la Chine. « La Chine ne se soucie plus désormais des préjudices des Occidentaux et de leur arrogance culturelle », écrit le célèbre écrivain Zhang Weiwei dans les colonnes du Global Times. « Depuis 30 ans, l’Occident a toutes les difficultés du monde à faire des prévisions correctes sur la Chine. Presque toutes leurs prédictions se sont avérées fausses, comme l’idée que la Chine devait connaître le même destin que l’Union soviétique, que la prospérité de Hong Kong s’arrêterait dès lors qu’elle aurait rejoint la mère patrie, ou encore que la Chine allait s’effondrer dès qu’elle aurait intégré l’OMC. En un mot, la théorie de l’effondrement de la Chine n’a jamais fonctionné ».

« D’une certaine manière », continue Zhang, « nous devons ré-éduquer les médias occidentaux en les aidant à mieux connaître la Chine. Plus les Occidentaux connaîtront la vérité, et en particulier la vérité à propos de l’ascension de la Chine, plus ils seront en mesure d’identifier les problèmes de leur propre système ». Zhang Weiwei conclue son article en évoquant une récente tribune écrite dans l’Asia Times, par l’universitaire français David Gosset, où ce dernier compare « ceux en Occident qui portent préjudice à la Chine à la grenouille dans le puits – une métaphore chinoise utilisée pour railler l’esprit de clocher, l’étroitesse d’esprit et la complaisance », rappelle Zhang. « Si l’Occident, face au succès du modèle chinois, refuse de remettre en question ses propres axiomes concernant la modernité économique et politique, alors nous risquons de finir comme la dernière grenouille dans le puits », écrit Gosset.