Nouvelles hypothèses concernant la répartition des astéroïdes

dimanche 2 juin 2013

Par Jason Ross

Cet article est adapté d’une présentation faite dans le cadre de l’émission hebdomadaire The weekly report. La vidéo est disponible ici.


Nous nous sommes intéressés récemment dans nos publications à deux sujets, qui sont la défense planétaire contre les astéroïdes et les découvertes de Kepler concernant l’harmonie du Système solaire. Nous allons maintenant combiner ces deux sujets avec certaines recherches que nous avons effectuées à propos des astéroïdes.

Partons de l’harmonie que Kepler a observée dans le Système solaire – question que vous pourrez approfondir sur notre site http://science.larouchepac.com. A son époque, on ne connaissait que six planètes. Celui-ci s’interrogeait sur la raison pour laquelle elles avaient ces paramètres-là et pas d’autres, pourquoi elles avaient ces différentes vitesses, pourquoi elles changeaient leurs vitesses de cette manière et, partant des harmonies de la vision et de l’ouïe prises ensemble, il développa un système musical dans lequel chaque planète jouait sa partie.

Intéressons-nous ici aux astéroïdes, sachant qu’il y a certaines différences entre les astéroïdes et les planètes. Voici une animation vidéo (animation 1 : cliquez ici) représentant la découverte des astéroïdes. Les éclats lumineux correspondent aux instants de découverte des astéroïdes. Ils s’estompent peu à peu, mais on voit se construire un anneau de tous les astéroïdes connus. Ce qui apparaît nettement, c’est qu’on découvre des astéroïdes près de la Terre, et ceci est dû au fait que nous vivons sur Terre et que c’est à partir de là que nous les cherchons. Aujourd’hui, on connaît entre un demi-million et 600 000 astéroïdes et environ 10 000 d’entre eux ont des orbites proches de l’orbite terrestre.

Si l’on considère tous ces astéroïdes, un certain nombre de constatations s’impose. Tout d’abord, on ne remarque pas d’espace vide dans la distribution des astéroïdes, on ne voit rien qui puisse ressembler à des anneaux emboîtés ou à quelque chose de ce genre. Par ailleurs, ils sont très nombreux. Ce n’est pas la même chose d’étudier l’harmonie entre six planètes, que d’essayer de trouver un système cohérent d’un demi-million d’objets. Et ce ne sont là que ceux que nous connaissons, mais il en existe beaucoup d’autres.

Animation 2
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Considérons tout d’abord les différents éléments d’une orbite (voir animation 2). Kepler a découvert qu’on différencie les orbites planétaires à partir d’un petit nombre de paramètres. L’un d’entre eux est le grand axe ou le demi grand axe, en d’autres termes, la taille de l’orbite. Il y a aussi l’inclinaison, c’est-à-dire l’angle entre le plan orbital de l’astéroïde et l’écliptique (le plan orbital de la Terre). Il y a l’excentricité, la distance entre le Soleil et le centre de l’orbite de l’astéroïde rapportée au demi grand axe. (Ce nombre est entre 0 et 1 : s’il est égal à 0, l’orbite est un cercle ; plus il se rapproche de 1, plus l’ellipse s’allonge). Nous avons la longitude du nœud ascendant : toute orbite coupe le plan de l’écliptique en deux points, les nœuds ; le nœud ascendant est celui par lequel l’objet passe du côté sud de l’écliptique au côté nord ; sa longitude est sa position mesurée en degrés par rapport à la position du Soleil au moment de l’équinoxe de printemps. Et nous avons enfin l’argument du périhélie, c’est-à-dire le nombre de degrés mesurés depuis le nœud ascendant jusqu’au périhélie, c’est-à-dire le point de l’orbite de l’objet le plus proche du Soleil.

Parmi ces paramètres de base, les deux auxquels Kepler s’intéressa le plus sont le grand axe et l’excentricité. C’est à partir de ces deux paramètres, qui lui donnèrent les vitesses des planètes telles que vues depuis le Soleil, que Kepler fit ses harmoniques. Il n’utilisa pas l’inclinaison : il n’était pas en mesure d’avoir une bonne idée de comment les orbites des planètes étaient inclinées, parce qu’il savait qu’il était incorrect de baser une telle mesure sur la trajectoire de la Terre autour du Soleil, qui n’est qu’une parmi beaucoup d’autres.

Voici maintenant ce que nous avons tenté de faire, en commençant par séparer les astéroïdes en groupes qui pourraient avoir chacun une orbite caractéristique, afin d’essayer d’appliquer la méthode de Kepler à des groupes individuels d’astéroïdes. Car la ceinture d’astéroïde est en soi un ensemble très disparate.

Figure 1

Voici la première constatation qui s’impose d’elle-même (voir figure 1) : les astéroïdes se répartissent selon des aires bien délimitées sur cet histogramme. L’axe horizontal correspond à la distance moyenne de chacun d’entre eux par rapport au Soleil. On voit par exemple que lorsque cette valeur vaut deux fois et demi la distance de la Terre au Soleil, il n’y a aucun astéroïde présent. Ces espaces qui apparaissent entre les aires s’appellent les lacunes de Kirkwood, du nom de l’astronome qui les a découverts. Entre ces lacunes se trouvent des paquets d’astéroïdes. Cherchant des moyens d’étudier les astéroïdes par groupes séparés, nous avons donc trouvé ici un moyen de les diviser en cinq groupes. Nous espérions trouver ainsi une approche possible à notre problème initial.

Animation 3
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On voit sur l’animation suivante (voir animation 3) des couleurs différentes (rouge, orange…) correspondant chacune à un groupe d’astéroïdes. Il s’avère que, bien que les lacunes correspondent à des distances moyennes pour lesquelles il n’existe pratiquement aucun astéroïde, il n’y a néanmoins aucun espace vide apparent sur l’anneau de l’ensemble des astéroïdes – contrairement à ce que l’on observe par exemple dans les anneaux de Saturne. Ceci vient du fait que les astéroïdes ne se déplacent pas sur des trajectoires circulaires mais elliptiques. Comme ils se rapprochent et s’éloignent périodiquement du Soleil, leurs trajectoires se recouvrent.

Par contre, comme nous l’avons vu sur l’histogramme précédent, cinq groupes se détachent nettement si l’on s’intéresse à la distance moyenne. Il y a des lacunes et des pics. On voit, par exemple, que beaucoup d’astéroïdes ont une distance moyenne de l’ordre de 2,3 fois la distance Terre-Soleil alors que très peu ont une distance moyenne de 2,5.

Figure 2

Si on considère l’ensemble de tous les astéroïdes, il y a certaines caractéristiques pour lesquelles il ne semble pas exister de moyenne commune. C’est le cas de leur vitesse moyenne lorsqu’ils sont au point le plus proche du Soleil (figure 2). On voit différents pics sur l’histogramme mais pas de caractéristique pour l’ensemble de la ceinture d’astéroïdes. Cependant, si l’on considère un des cinq groupes indépendamment des autres on voit que c’est davantage le cas : il existe une sorte de vitesse minimale moyenne (aphélie) et une sorte de vitesse maximale moyenne (périhélie) (figures 3a à gauche et 3b à droite).

Voici maintenant quelque chose que Kepler n’a jamais vu, mais qui met en évidence une corrélation très surprenante (voir figure 4). Nous nous intéressons ici à la longitude du périhélie des astéroïdes, qui est une grandeur assez similaire à la longitude que l’on mesure sur la surface de la Terre en prenant comme référence le méridien de Greenwich en Angleterre. En astronomie, le point de longitude 0 correspond à l’équinoxe de printemps, et les autres longitudes sont mesurées en degrés le long de l’écliptique, qui est un cercle comme l’équateur terrestre.

Figure 4

Ces histogrammes montrent donc à quelle position en degré sur l’écliptique les astéroïdes sont le plus près du Soleil. Vous pouvez voir qu’à chacun des cinq groupes qui sont, rappelons-le séparés par les lacunes de Kirkwood, correspond indiscutablement un pic : ils ont tous une direction vers laquelle il est le plus probable de trouver les périhélies. Et cette direction est à peu près la même. La ligne noire que nous avons tracée sur chacune des figures indique le périhélie de Jupiter. Cela n’est peut-être pas très surprenant du fait que Jupiter est un très gros objet et relativement près d’eux, mais il semble bien que ces astéroïdes ont quelque chose en commun avec la direction moyenne de Jupiter.

Ceci étant posé, nous avons commencé à essayer de chercher toutes les corrélations que nous pouvions trouver entre tous les astéroïdes possibles. En voici une qui ne montre pas grand-chose (voir figure 5) : les deux axes correspondent respectivement à l’excentricité et à la longitude du nœud ascendant. Il n’y a rien de remarquable dans ce nuage de points.

Il n’en est pas de même sur d’autres graphiques. Ici (voir figure 6), nous avons en abscisse la distance moyenne par rapport au Soleil, et en ordonnée l’inclinaison. Le groupe des astéroïdes dont la distance moyenne est d’environ deux fois la distance Terre-Soleil ont une inclinaison d’environ 20 à 25 degrés. Dans le troisième groupe, qui avait l’air d’une montagne dans l’histogramme correspondant, on voit plusieurs paquets bien séparés, quand on combine ces deux manières différentes de les observer.

Figure 6

Il est donc légitime de séparer les astéroïdes dans ces groupes, mais fonctionnent-ils comme un tout ? Y a-t-il des harmonies entre eux ? Proviennent-ils d’une planète qui a éclaté ? Cet ensemble est-il en train de se coaguler pour former un objet plus gros ? Il est difficile de répondre à ces questions car nous n’avons pas eu beaucoup de temps pour faire des observations et essayer de comprendre comment ce système évolue, dans la mesure où nous ne disposons de techniques d’observation que depuis une époque relativement récente.

Voici un autre graphique (voir figure 7) qui met en relation la distance moyenne des astéroïdes par rapport au Soleil et l’excentricité de leurs trajectoires. Ici encore, certaines choses intéressantes apparaissent : par exemple, les excentricités semblent plus grandes dans le troisième groupe que dans le quatrième.

Figure 7

De toute évidence, les données que Kepler ne possédait pas à son époque et que les techniques modernes d’observation nous ont permis d’acquérir nous permettent désormais d’étendre notre étude au delà de la simple différenciation des astéroïdes en cinq groupes suivant la distance moyenne au Soleil. Si l’on combine en effet plusieurs autres paramètres, on voit clairement dans les figures figure 6 et 7 qu’il y aurait là bien plus à découvrir.

Figure 8

Voyons le prochaine graphique (figure 8), lequel fut une grande surprise voire même un choc. Nous ne nous attendions vraiment pas à ce résultat. Après avoir testé toutes les combinaisons possibles entre différents paramètres, voici la chose étonnante que nous avons obtenue. Vous avez en abscisse l’excentricité des orbites, et en ordonnée la longitude du périhélie qui caractérise l’orientation de l’orbite de l’astéroïde autour du Soleil. Précisons encore que la longitude du périhélie, ici, est la direction vue du Soleil où se trouve le périhélie, le point le plus proche de l’orbite (0 degrés de longitude correspondant à la direction Soleil-Terre au moment de l’équinoxe de printemps).

Il y a deux choses que vous pouvez observer ici : premièrement, le graphique apparaît plus sombre en haut et en bas proche du 0 (ou 360) degrés de longitude, ce qui signifie qu’il y une plus grande quantité d’astéroïdes dont le périhélie est à cette longitude alors qu’un nombre moins important ont leur périhélie à 180 degrés (environ à la moitié de l’axe des ordonnées). Mais quelque chose d’autre nous frappe en voyant ce graphique : on observe clairement des bandes plus sombres bien distinctes, courbes mais parallèles suivant l’axe horizontal. Il semble qu’il y aient là plusieurs groupes d’astéroïdes qui soient l’objet d’une sorte de « conspiration » entre l’excentricité et longitude du périhélie. Bien qu’elles ne soient que de simples données observables et mesurables, c’est comme si ces deux paramètres s’étaient entendus pour organiser les astéroïdes dans un but précis.

Ce qu’il est bon de préciser et que je n’ai pas fait ici, c’est la direction du périhélie de Jupiter, qui est de 15 degrés, correspondant à la partie la plus sombre du graphique en bas, alors que la longitude de son aphélie, de 195 degrés, correspond à la zone au centre où l’excentricité des astéroïdes tendent vers un minimum. Il semble donc dans un premier temps que ces astéroïdes subissent une forte influence de Jupiter, et qu’ils tendent à s’aligner suivant la direction de son périhélie. Mais cela n’explique pas pourquoi on distingue alors ces franges plus sombres.

De plus comment l’interpréter l’influence de Jupiter, non pas uniquement en terme d’une planète interagissant avec d’autres corps, mais en terme d’interaction entre orbites ? Nous voudrions en effet non pas traiter les astéroïdes comme des objets isolés mais rechercher plus précisément leurs caractéristiques à partir des paramètres orbitaux, suivant ainsi la voie de Kepler. Comment alors considérer l’orbite d’une planète comme un tout, subissant l’influence de l’orbite de Jupiter comme un tout ? Comment décrire physiquement une orbite, qui n’est au premier abord que l’ensemble des positions distinctes de cet objet se déplaçant sur une trajectoire ? Comment considérer cette orbite comme une seule et unique chose, une seule et unique entité physique représentée dans l’espace par un point ?

Nous pourrions utiliser le centre géométrique de l’orbite elliptique, mais cela serait peu judicieux car il ne correspondrait à rien de tangible. Au lieu de cela nous utiliserons ce qu’on appelle le centre de masse, reprenant la technique du grand mathématicien allemand Carl Gauss qui, pour comparer comment les différentes planètes s’influençaient les unes des autres, au lieu d’additionner leurs influences respectives point par point pour décrire leur mouvement et vitesse respectifs, privilégia l’idée que l’orbite devait physiquement représenter une distribution de la masse de la planète, une sorte d’anneau plus dense aux endroits où la planète est la plus lente et plus éloignée du Soleil, et moins dense là où elle se déplace plus rapidement.

Figure 9

Prenez l’orbite imaginaire décrite sur la figure suivante (figure 9), où l’on retient vingt positions de la planète situées à des intervalles de temps égaux. Une astéroïde sur cette orbite mettrait donc autant de temps pour aller du point A au point B que du point C au point D. Mais, étant plus lente du point A au point B, l’astéroïde passe plus de temps de ce coté de l’orbite et sa masse y est distribuée en plus grande quantité, ce qui décale vers la gauche sur notre graphique ce qu’on définirait comme le centre de masse de l’orbite (le point en bleu).

Figure 10
Répartition de tous les centres de masse des orbites des objets formant la ceinture d’astéroïde avec, en rouge, le centre de masse de l’orbite de Jupiter, et en jaune le Soleil.

En cherchant alors comment les centres de masse des astéroïdes pouvaient s’organiser, nous eûmes alors un véritable choc. Voyez la figure suivante (figure 10) reprenant toutes les objets de la ceinture d’astéroïde et montrant où se situe leur centre de masse respectif. Évidemment, observer des anneaux ou bien des cercles au sein du Système solaire peut nous sembler quelque peu banal, mais ce n’est pas ce dont il s’agit ici. Ce que vous voyez là n’est pas un groupe de roches flottant en cercle autour du Soleil. Ce sont les centres de masse de leurs orbites elliptiques qui, ensemble, forment entre autres un cercle !

A supposer que les orbites ne subissent pas de changement significatifs sur de longues périodes de temps, on doit voir ici ces centres de masse comme étant stationnaires et, c’est indéniable, distribués de manière stupéfiante en cercles. Peut-être quelqu’un a-t-il déjà obtenu ce genre de résultat auparavant et saurait y répondre, mais à ce jour, cela semble tout à fait unique et nouveau.

Figure 11

Sur la figure suivante (figure 11), voici la distribution des centres de masse pour chaque groupe. Observez entre autres, en haut de gauche à droite, les groupes 1 et 2, où vous pouvez voir plusieurs anneaux, le groupe 3 aussi, avec les points jaune pour le Soleil et rouge pour le centre de masse de l’orbite de Jupiter. Pour mieux se figurer le point rouge ici, imaginez que vous ayez observé Jupiter pendant 100 ans et que vous vous demandiez où la situer en moyenne durant tout ce temps. Quelle position moyenne, quel point central pourrait rendre compte de l’ensemble de son parcours ? Dans ce cas, ça serait justement le point rouge, le centre de masse orbital. Le centre de masse S se situe quant à lui au centre du Soleil, vu que ce dernier est supposé demeurer immobile au centre du Système solaire.

On voit alors, sur notre graphique, que le centre de ces anneaux, constitués des centres de masse orbitaux des astéroïdes, se situe en général quelque part entre le Soleil et le centre de masse orbital de Jupiter. Si nous tracions une ligne entre le Soleil et le centre J (le point rouge), on verrait le centre (géométrique de ces anneaux) quasiment sur cette ligne, mais pas tout à fait. On peut alors se demander pourquoi.

Animation 4
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Observons maintenant les cercles que forment ces centres de masse à travers une animation continue (animation 4). En partant de la distance moyenne la plus proche du Soleil vers la plus éloignée, prenons les astéroïdes pour chaque distance moyenne correspondante et dessinons leurs centres de masse. Voyez comment l’animation évolue et comment ces anneaux se forment, avec en toile de fond les centres d’autres planètes dont l’influence pourrait jouer dans toute cette dynamique. Les points représentent les centres de masse orbitaux du Soleil, de Jupiter, de Mars, de Saturne et enfin ceux des trois plus gros astéroïdes Pallas, Vestas et Cérès, qui à eux seuls constituent un tiers de la masse totale de la ceinture d’astéroïdes.

Observons une fois de plus sur cette autre animation (animation 5 : cliquez ici) la formation des anneaux, mais cette fois-ci avec le graphique des différents groupes classés suivant les distances moyennes en écusson en haut à gauche, et en effectuant plusieurs pauses pour faire apparaître et dessiner les cercles plus nettement. Ces derniers, d’ailleurs, sont peut-être des ellipses de très faible excentricité, qui sait ? C’est pour l’instant très difficile à vérifier.

Une fois de plus, pour bien comprendre de quoi il s’agit ici, étant donné que nous étudions là un concept nouveau, rappelez-vous que chacun des points sur le graphique représente la position, non pas d’un astéroïde, mais du centre de masse de son orbite. Au fur et à mesure que l’animation défile, nous prenons un échantillon d’astéroïdes correspondant à une distance moyenne par rapport au Soleil et représentons l’ensemble des centres de masse de cet échantillon.

La question se pose alors : pourquoi ces centres forment-ils des cercles ? Ensuite, et si nous isolons les astéroïdes en fonction des cercles auxquels appartient leur centre de masse – ce que nous n’avons pas encore fait ici – que trouverons-nous en terme de dynamique entre elles, en terme d’harmoniques définies selon l’approche originale de Kepler ?

Animation 6
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J’ai voulu explorer la question encore sous un autre angle, comme vous pouvez le constater sur l’animation suivante (animation 6). Le point noir que vous voyez bouger sur le graphique est la position moyenne calculée de tous les centres de masse que vous voyez un peu partout ici pointés en gris. C’est le centre, dirons-nous, de toutes les astéroïdes qui apparaissent sur notre animation. Vous pouvez alors observer que ce centre se meut, essentiellement entre le centre de Mars et Jupiter, mais pas tout à fait ! Et sur la fin, pour les astéroïdes plus éloignées, il y en a si peu que le mouvement de ce centre devient relativement instable. Enfin, on remarque à un moment donné de l’animation que ce centre moyen est étonnamment situé directement sur le centre de Mars.

Pour l’animation suivante (animation 7), là encore les astéroïdes ne sont pas classées suivant leur distance moyenne par rapport au Soleil mais selon leur inclinaison (c’est à dire l’angle d’inclinaison du plan de l’orbite par rapport au plan solaire, plan orthogonal à l’axe de rotation du Soleil). Vous voyez là aussi que les centres de masse des objets ayant une inclinaison similaire forment aussi des anneaux. Mais la question demeure toujours : pourquoi ?

Animation 7
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Le bilan de cette première étude nous amène à plus de questions que de réponses. La première étant : pourquoi ces anneaux ?

Ensuite, il nous faudrait certainement sélectionner les astéroïdes selon l’anneau auquel leur centre de masse appartient et, si cela est possible, étudier les caractéristiques de cet anneau comme s’il était une seule et même orbite. Nous n’avons pas encore clairement identifié, en effet, si au sein d’un même anneau correspondant à une distance moyenne donnée par rapport au Soleil, les astéroïdes partageaient la même inclinaison. Si cela s’avérait vrai, nous pourrions alors faire l’hypothèse que ces groupes d’astéroïdes, soit cherchent à se rassembler pour devenir de nouvelles planètes, soit proviennent de l’éclatement d’une ancienne planète. Cela est difficile à affirmer pour l’instant. Il nous faudra appliquer plus en profondeur la méthode de Kepler pour mieux répondre à ces questions.

L’autre chose qui serait très utile à savoir serait l’évolution au cours du temps des paramètres des orbites. En effet, peut-être ces centres de masse en cercle se déplacent-ils aussi en cercle ? Pour l’instant, il est impossible d’affirmer quoi que ce soit sur ce point, étant donné que la première astéroïde a été découverte il y a seulement 200 ans et que presque toutes les autres ont été découvertes ces trente dernières années. En d’autres termes, nous sommes incapables à l’heure actuelle de savoir comment ces orbites ont évolué au cour du temps.

Ce qui serait judicieux, c’est de prendre toutes celles que nous connaissons depuis à peu près une décennie et comparer l’orbite que nous aurions calculée 10 ans après, avec celle que nous mesurons actuellement à l’aide des méthodes d’observation les plus modernes, et voir ainsi comment cette orbite a pu se modifier durant cette courte période de temps. Peut-être constaterons-nous un déplacement plus rapide que ce que nous aurions pu prévoir ? Peut-être ne verrons-nous rien de significatif étant donné l’importance des incertitudes dans les observations qui ont pu être faites par le passé, ou bien encore qui sont faites actuellement. Mais il nous faut aller voir et investiguer.

Ensuite, on peut se demander s’il n’y a pas quelque chose à l’extérieur du système solaire qui puisse avoir une influence sur toute cette organisation de la ceinture d’astéroïdes. Il n’y a aucune raison de présupposer que la configuration de ces anneaux, leur direction, leur inclinaison soient dues uniquement à l’influence exercée par les phénomènes à l’intérieur du Système solaire.

Ainsi, une fois que ces directions et autres paramètres seront mieux établis, nous pourrons nous diriger vers les étoiles et voir si il y a quelque chose de significatif à obtenir. La nébuleuse du Crabe par exemple nous montrerait-elle une direction privilégiée ? Nous n’en savons rien pour l’instant mais devons aller voir.

S’il y a bien une chose que cette étude nous montre, c’est que ces objets ne sont définitivement pas un simple amas de roche distribués au hasard. Car il n’y aurait aucune raison à ce que ces cercles soient formés ainsi. Evidemment, si on ne prenait ces astéroïdes un par un selon la distance moyenne au Soleil uniquement, ou encore les excentricités, cette organisation particulière n’apparaîtrait pas et on s’imaginerait facilement que leur disposition ne serait que le fruit du hasard. Les résultats étonnants de notre étude montrent à quel point l’organisation de cette masse d’astéroïdes est bien plus un phénomène continu unifié plutôt que la simple somme d’interactions entre objets discrets indépendants. On ne peut plus raisonner ici en termes de roches individuelles en nombre limité interagissant les unes avec les autres, mais en terme de champs physique, de la même manière que l’on considérerait les ondes formées par la chute d’une goutte sur une étendue d’eau.

Je ne peux pas affirmer où tout cela nous mènera exactement, mais il semble que des réponses aux questions qui sont soulevées ici nous aideraient à comprendre la dynamique du mouvement des astéroïdes dans son ensemble, et nous permettraient peut-être ainsi d’anticiper l’existence de certaines orbites qui nous sont inconnues et qu’il nous faudra découvrir. En se dotant ainsi de la capacité de prévoir la présence d’un objet sans avoir à l’observer au préalable, nous pourrions révolutionner la méthode de détection des astéroïdes et protéger la Terre de leur menace.

Malheureusement, pour ce qui est des géocroiseurs qui passent près de la Terre, nous en avons tellement peu détecté pour l’instant qu’il nous est impossible d’appliquer l’étude que nous venons de décrire ! Il nous manque encore beaucoup trop de données à leur sujet pour pouvoir déterminer une quelconque caractéristique concernant leurs orbites.

Ce qui nous donne une idée assez claire de ce qu’il nous reste alors à accomplir à l’avenir.

Traduction Pierre Bonnefoy et Sébastien Drochon.

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