Poutine, Modi et Xi Jinping, ensemble pour un ordre économique polyphonique

lundi 8 septembre 2025, par Helga Zepp-LaRouche

En ouvrant la réunion hebdomadaire de la Coalition internationale pour la paix, le 5 septembre, Helga Zepp-LaRouche, présidente de l’Institut Schiller et initiatrice de cette Coalition, a qualifié les événements survenus à la conférence de l’Organisation de la coopération de Shanghai (OCS), le 2 septembre, et au défilé militaire à Beijing le lendemain, « d’évolution positive majeure pour l’humanité ». Le président russe Vladimir Poutine et le Premier ministre indien Narendra Modi s’étaient joints à ces événements.

Transcription de son commentaire :

Aujourd’hui, la situation est extrêmement contrastée mais on discerne une évolution positive majeure. Il est extrêmement important que tout le monde réalise qu’avec le Sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS à Tianjin, en Chine, et les réunions qui ont suivi, le défilé militaire à Pékin, le 3 septembre, et la réunion du Forum économique oriental à Vladivostok qui a ouvert le 6 septembre, on assiste à un changement très profond pour le mieux dans le monde.

En effet, un nouveau système économique est en train d’émerger. Il n’est pas encore consolidé mais il est clair que la majorité de la population mondiale, représentée à cette réunion de l’OCS, a changé le monde. Elle est en train de créer un système économique indépendant qui a le potentiel de devenir un nouvel ordre mondial. À la fin de ma brève allocution, je vous lirai un texte pour vous inciter à réfléchir à la possibilité d’approuver cette évolution.

Voilà ce qui s’est passé : lors de la 25e réunion de l’OCS, organisée en réaction à la guerre tarifaire lancée par le président Trump contre les pays des BRICS, un événement sans précédent s’est produit : le rapprochement entre l’Inde et la Chine. Une rencontre très importante et positive a eu lieu entre le président Xi et le Premier ministre Modi, au cours de laquelle ils ont enterré les tensions passées. Par ailleurs, on connaît l’amitié très profonde qui unit Poutine et Modi, qu’on a vus marcher main dans la main et discuter ensemble.

Tout cela repose sur le partenariat inébranlable entre la Russie et la Chine. Ces pays, qui étaient représentés là-bas, constituent 42 % de la population mondiale, et en tenant compte du fait que les pays membres de l’OCS sont tous liés et interconnectés via d’autres organisations telles que les BRICS, l’Union économique eurasienne, l’ASEAN, la CELAC, l’Union africaine, etc., on se retrouve avec un réseau d’organisations et de pays représentant ensemble 85 % de l’espèce humaine, soit la majorité mondiale. Ils ont clairement décidé de créer un nouveau système fondé sur la souveraineté, le respect absolu des différents systèmes sociaux, la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays et la coopération pacifique. Ils ont également commencé à créer des mécanismes alternatifs pour se protéger contre les mesures de guerre économique lancées par l’Occident collectif – droits de douane, sanctions unilatérales, changements de régime et autres mesures similaires – en créant une banque de l’Organisation de coopération de Shanghai, qui viendra compléter l’action d’autres institutions telles que la Nouvelle banque de développement des BRICS (NBD) et la BIIA (Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures) déjà existantes. Naturellement, tout ce développement repose sur le partenariat inébranlable entre la Russie et la Chine. Il est donc clair qu’ils s’efforcent de créer des mécanismes d’émission de crédit indépendants, leur permettant d’échapper à l’utilisation du dollar comme une arme, les excluant du système SWIFT et leur imposant d’autres mesures de coercition similaires.

Il s’agit là d’une évolution extrêmement positive, qui, selon moi, place le soi-disant Occident collectif, qui n’est plus aussi uni, devant un choix clair : soit poursuivre l’affrontement géopolitique avec la Russie et la Chine et finir par déclencher une troisième guerre mondiale, soit reconnaître que cette majorité mondiale est désormais incontournable.

La seule solution est donc de s’adapter à cette situation. Ce changement sera douloureux pour de nombreux tenants de l’establishment occidental, qui devront reconnaître cette nouvelle réalité que nous voyons déjà clairement à l’œuvre. L’un des signes de ce changement est le fait que lors de la récente réunion de la Coalition des volontaires à Paris, bien que Macron ait insisté très fortement pour envoyer des soldats sur le terrain en Ukraine afin de « maintenir la paix », cela n’a pas été bien accueilli. Seuls 6 des 26 pays de la Coalition auraient accepté d’envoyer des troupes, dont la Grande-Bretagne, la France et les trois pays baltes. Tous les autres ont refusé : l’Italie, la Pologne, la Bulgarie, l’Allemagne…

Ils ont eu une conversation téléphonique décevante depuis Paris avec le président Trump, qui n’a soutenu aucune de leurs demandes. Le chancelier Merz, qui s’était montré extrêmement belliqueux auparavant, s’est dit très frustré et a déclaré que l’Allemagne n’enverrait pas de troupes. Elle va essayer de renforcer la production de toutes sortes d’armes à longue portée en Ukraine, mais sans envoyer de troupes. Le problème, a-t-il déclaré, est qu’il est impossible de trouver une solution pacifique sans la Russie, alors que celle-ci a renforcé ses partenariats avec la Chine, l’Inde, le Brésil et d’autres pays. Cela bloque en quelque sorte toute approche unilatérale en Ukraine.

Il s’agit d’un changement très important dans la situation stratégique, dont nous ne voyons encore que le début. Espérons que cela aura également un impact sur la situation au Moyen-Orient, car cette réalité changeante devrait bientôt s’y faire sentir également. La situation sur le terrain reste horrible. L’assaut effréné de l’armée israélienne sur la ville de Gaza se poursuit, avec son terrible lot de victimes, tandis que les attaques en Cisjordanie se poursuivent. La réponse de la communauté internationale est totalement insuffisante. C’est pourquoi nous devons absolument accélérer la mise en place de la stratégie adoptée par la Coalition internationale pour la paix.

L’Assemblée générale des Nations unies débute le 9 septembre et nous faisons tout pour que le pouvoir de décision soit transféré du Conseil de sécurité à l’Assemblée générale, comme le prévoit la résolution 377 des Nations unies, « Unis pour la paix », qui autorise précisément ce transfert.

L’Assemblée générale des Nations unies pourrait alors prendre des décisions visant à imposer des mesures telles que des sanctions contre Israël ou l’envoi de casques bleus dans la région, entre autres. Cette réunion intervient donc à un moment où la communauté internationale se retourne de plus en plus contre Israël. Les informations sur ce génocide sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale ne peuvent plus être étouffées.

Le film « The Voice of Hind Rajab », présenté le 3 septembre à la Mostra de Venise, aurait reçu une ovation debout de plus d’une vingtaine de minutes. C’est l’histoire déchirante d’une fillette gazaouie de 5 ans, seule survivante après le bombardement par Tsahal de la voiture où elle se trouvait avec sa famille, et assassinée après être restée bloquée des heures parmi les cadavres. Le film comprend également 17 minutes d’enregistrement en direct, dans lequel elle explique qu’elle ne peut pas parler parce que le sang coule de sa bouche – un récit tout simplement incroyable de l’horreur. Je pense que ce film est un terrible avertissement au monde entier. J’espère qu’il contribuera à réveiller la conscience du monde pour qu’il se décide enfin à agir. Nous devons donc redoubler d’efforts pour inscrire la résolution 377 des Nations unies à l’ordre du jour de la réunion qui débutera dans quelques jours à New York.

Comme je l’ai dit, la situation a complètement changé. Je pense que nous vivons l’un de ces rares moments que je compare à la chute du mur de Berlin, en 1989, et à l’opportunité historique que représentait la réunification allemande, à la fin de la Guerre froide. On aurait alors pu changer le monde, instaurer un ordre de paix pour le XXIe siècle. Cette opportunité a été complètement manquée, et à la place, les pays anglophones, les néoconservateurs et leurs acolytes en Grande-Bretagne ont tenté d’imposer un monde unipolaire, avec son cortège de conséquences désastreuses. Cela s’est retourné contre eux.

Je suis convaincue que nous devons absolument soutenir la majorité mondiale, mais surtout mobiliser les pays d’Europe, les États-Unis et tous les autres appartenant à cette faction occidentale, Japon, Corée du Sud et Nouvelle-Zélande, pour la soutenir sans réserve et surmonter cette division géopolitique. À mon avis, c’est la seule façon de résoudre la crise ukrainienne. En modifiant ainsi la composition du monde, je pense que c’est la seule façon de parvenir à une solution à deux États, une aide humanitaire immédiate, le plan Oasis et la reconstruction du Moyen-Orient. Car ce n’est qu’en convainquant les pays occidentaux de cesser de s’opposer à la majorité mondiale que l’on pourra mettre fin à ce génocide au Moyen-Orient.

Voici donc le très court texte que je propose. Si vous êtes d’accord, je vous invite à en faire le cri de ralliement pour la mobilisation de la Coalition Internationale pour la paix. Cela pourrait vraiment changer la donne.

Appel de la Coalition internationale
pour la paix :

5 septembre 2025

« Les nations occidentales doivent coopérer avec le nouvel ordre mondial.

Lors du sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) à Tianjin, représentant environ 42 %
de la population mondiale, un nouvel ordre mondial indépendant de l’Occident a vu le jour, fondé sur les
principes de souveraineté, de non-ingérence, de coopération économique mutuellement bénéfique et de
coopération pacifique.

Dans le cadre de cet événement d’importance historique mondiale, la Chine et l’Inde, les deux nations les
plus peuplées, représentant déjà 35 % de la population mondiale, ont décidé de commencer à coopérer
étroitement entre elles et avec la Russie.

Les pays réunis au sein de l’OCS, qui sont également interconnectés par le biais d’organisations telles que les BRICS, l’Initiative la ceinture et la route (BRI), l’Union économique eurasienne, l’ASEAN, la CELAC et l’Union africaine, représentent collectivement 85 % de l’humanité.

L’émergence de cet ordre mondial est une réponse à la tentative collective de l’Occident, après la fin de la Guerre froide, d’imposer un ordre mondial unipolaire sous domination anglo-américaine, marqué par des guerres d’ingérence sans fin, des sanctions et des opérations de changement de régime, qui ont finalement complètement échoué. Les nations de la Majorité mondiale sont en train de surmonter une période de 500 ans de colonialisme et d’affirmer leur droit à un développement économique indépendant.

Cela fut rendu possible avant tout par l’essor sans précédent de la Chine, offrant aux pays du Sud un modèle et une coopération que l’Occident leur a refusés pendant des siècles. Le monde a ainsi atteint un tournant décisif. Nous pouvons soit poursuivre l’affrontement géopolitique avec la Russie et la Chine, au risque d’une troisième guerre mondiale, la dernière cette fois, soit choisir de coopérer avec le nouveau système économique émergent.

Dans son discours intitulé « L’humanité sombrera ensemble ou s’élèvera ensemble », prononcé le 3 septembre lors des commémorations du 80e anniversaire de la défaite du Japon, le président Xi Jinping a proposé la perspective d’une communauté avec un avenir commun pour l’humanité.

Il est dans l’intérêt fondamental des nations de l’Occident collectif (qui ne sont plus vraiment unies) de coopérer avec les États de la Majorité mondiale pour relever ensemble les grands défis auxquels l’humanité est confrontée : vaincre la pauvreté et le sous-développement, garantir une paix mondiale durable et assurer à chaque habitant de cette planète le droit de réaliser le potentiel qu’il porte en lui. Pour l’avènement d’une communauté partagée pour l’avenir de l’humanité ! ».

Je vous invite donc à signer ce document (en ligne sur le site de l’Institut Schiller France) et à nous aider à le diffuser le plus largement possible.