Union européenne

Le 18 juillet, pas un vote pour Von der Leyen ou Kaja Kallas !

mardi 16 juillet 2024, par Karel Vereycken

Contexte

Le 27 juin, tout semblait plié. A Bruxelles, un consensus entre dirigeants des Etats membres s’était dégagé pour fixer les candidatures aux hauts postes de l’UE :

  • la Première ministre estonienne Kaja Kallas au poste de cheffe de la diplomatie pour succéder à Joseph Borrell.
  • Ursula von der Leyen, candidate à sa propre succession à la tête de la Commission européenne, mais dont la nomination, comme celle de Kallas, doit être confirmée ce 18 juillet à 11 heures par un vote secret dégageant une majorité absolue de 361 eurodéputés.

Kallas aussi bien que von der Leyen brillent, non pas par leur volonté d’incarner une Europe souveraine, mais par leur soumission totale au « parti de guerre » et au complexe militaro-financier conduisant le monde vers un affrontement y compris nucléaire.

Mais ça, c’était avant...

Si le 27 juin, tout laissait croire que l’habituelle coalition des eurodéputés conservateurs, socialistes et libéraux allait adouber sans hésitation ces candidatures, le scrutin européen en a clairsemé les rangs. En Estonie, le parti de Kaja Kallas, le Parti de la réforme, n’est arrivé qu’en troisième position aux européennes et l’opposition réclame sa démission.

Politico rapporte que le scrutin sera extrêmement serré. Si bien que :

au lieu d’affronter la chaleur du sommet de l’OTAN à Washington, VDL a passé sa semaine au Parlement européen à tenter d’obtenir suffisamment de voix pour un second mandat. Les choses semblent encore très serrées, et Ursula von der Leyen et son bras droit Björn Seibert rencontrent autant de délégations et de législateurs que possible pour tenter de rassembler les 361 voix nécessaires à Strasbourg la semaine prochaine.

Officiellement, Ursula von der Leyen semble pouvoir compter sur les voix de la coalition centriste pro-UE, composée du Parti populaire européen, des Socialistes et Démocrates européens (S&D) et des libéraux de Renew Europe. Ensemble, ces partis disposent de 400 sièges.

Cependant, s’agissant d’un scrutin à bulletin secret, on ne peut affirmer avec certitude que tous les eurodéputés de ces groupes voteront pour elle. Le PPE, le parti de Von der Leyen, prévoit d’ailleurs 15 % de pertes potentielles de voix, même au sein de sa propre famille politique. En effet, les choix énergétiques cataclysmiques ont mis l’industrie allemande au bord de l’asphyxie.

C’est pour cela que VDL a tenu à s’assurer le soutien d’autres groupes politiques. Suite à des pourparlers avec les Verts, elle pense pouvoir compter sur le soutien du groupe Verts/ALE et de ses 53 eurodéputés.

« Selon les chiffres actuels, si les Verts ne rejoignent pas la coalition PPE-S&D-Renew qui devrait voter en sa faveur et que les 15 % de pertes devenaient réalité, Ursula von der Leyen se trouverait en mauvaise posture et n’obtiendrait pas les 361 voix de majorité. Cependant, si les Verts rejoignent la coalition, sa reconduction semble plus certaine », écrit EURACTIV.

Le deuxième facteur indiquant que nous ne sommes plus dans le même monde que le 27 juin, c’est l’évolution du conflit en Ukraine. La réalité du terrain amène un nombre croissant de dirigeants conservateurs des deux côtés de l’Atlantique à estimer que, contrairement aux obsessions des va-t-en guerre de l’OTAN, de VDL et de Kallas, il est temps d’y mettre fin par la diplomatie.

Or, bizarrement, plusieurs de ces personnalités sont la cible de graves incidents touchant à leur sécurité et de tentatives assassinats :

  • 15 mai, tentative d’assassinat contre le Premier ministre slovaque Robert Fico ;
  • 23 juin, accident de voiture provoquant la mort d’un agent de sécurité accompagnant le Premier ministre hongrois Victor Orban ;
  • 13 juillet, tentative d’assassinat contre l’ancien président américain Donald Trump.

Quoi que l’on puisse penser de l’homme lui-même, du point de vue de Moscou, faute d’autres forces réclamant un accord de paix, il est clair que l’assassinat de Trump, s’il avait réussi, aurait été perçu comme un « nouveau Sarajevo ».

En Roumanie, un auteur invite ses lecteurs à écrire aux eurodéputés. Sans partager son point de vue sur de nombreux points, nous publions ici sa lettre pour vous inviter à prendre également votre plume car il y a urgence :

RECOMMANDATION POLITIQUE

Mme Kaja Kallas (Première ministre d’Estonie) ne doit pas devenir la plus haute diplomate / haute représentante de l’UE !

1. CONTEXTE

Après les élections au Parlement européen, Mme Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, Mme Kaja Kallas, Première ministre estonienne en exercice, et M. António Costa ont été nommés de manière non transparente comme futurs dirigeants de la Commission européenne, du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) / vice-président de la Commission européenne et du Conseil européen. (…)

Nous considérons que Mmes von der Leyen et Kallas ne sont pas les bonnes candidates pour ces postes à haute responsabilité - pour les raisons suivantes :

Mme von der Leyen s’avère être une fervente partisane de la guerre potentiellement génocidaire d’Israël contre le peuple palestinien occupé à Gaza et en Cisjordanie, bien au-delà du droit inhérent d’Israël à l’autodéfense.

Mme Kaja Kallas, par ses déclarations publiques incendiaires concernant la Russie après son invasion de l’Ukraine, ainsi que par l’implication de son père Siim Kallas, ancien Premier ministre en 2003, dans l’invasion de l’Irak, fait craindre qu’ à l’avenir, Mme Kallas ne nuise non seulement à l’image de l’Europe à l’étranger (principalement dans les pays arabo-musulmans), mais qu’elle ne bloque également de manière active les futures tentatives visant à mettre fin à la guerre Russie-Ukraine.

Nous aimerions attirer l’attention sur les points importants suivants qui font que Mme Kallas ne convient pas, à notre avis, pour les postes de Haute représentante de l’UE et vice-présidente de la Commission européenne :

2. RAISONS DE VOTER CONTRE MME KAJA KALLAS

Mme Kallas fait des déclarations publiques incendiaires, tout en minimisant la menace nucléaire pour l’Europe et le monde.

Mme Kaja Kallas a exprimé son souhait, bien que légèrement voilé, de vaincre militairement et même de démembrer la Russie en plusieurs États.

Cela est non seulement contraire aux principes fondamentaux du droit international public (droit d’un État à la souveraineté et à l’intégrité territoriale, conformément à la Charte des Nations unies), mais cela pourrait également déclencher des représailles nucléaires de la part de la Russie, conformément à sa doctrine nucléaire.

Lors d’un débat public au début de cette année, face à la peur « des bombes nucléaires » exprimée par de nombreux Européens, Mme Kallas a réagi avec un sourire et sans aucun signe d’inquiétude pour la peur justifiée de millions de personnes en Europe !

Avec toute la compréhension nécessaire pour les opinions politiques sans compromis de Mme Kallas contre l’État agresseur qu’est la Russie, son attitude est totalement opposée aux principes fondamentaux de la démocratie et de l’État de droit : son attitude est totalement opposée aux objectifs fondamentaux du Service européen pour l’action extérieure, qui se lisent comme suit :
« Le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) est le service diplomatique de l’UE (...). Il vise à rendre la politique étrangère de l’UE plus cohérente et plus efficace, augmentant ainsi l’influence mondiale de l’Europe (...) gère les relations diplomatiques (...) travaille avec les services diplomatiques nationaux des pays de l’UE, les Nations unies et d’autres grandes puissances (...) construit la paix (...) [et] maintient de bonnes relations avec les voisins immédiats de l’UE. »

L’UE ne devrait pas accepter une Haute représentante qui ignore les préoccupations de centaines de millions de personnes et joue même avec le feu nucléaire !

Mme Kallas applique deux poids, deux mesures

Pour des raisons tout à fait justifiées, Mme Kallas s’oppose au démembrement de l’Ukraine par la Russie, mais elle est très favorable au démembrement de la Russie. Il s’agit d’un exemple classique de deux poids-deux mesures dans le traitement des États, ce qui est contraire aux principes fondamentaux du droit international public (l’égalité souveraine des États).

L’UE ne devrait pas accepter un Haut Représentant qui ignore les principes fondamentaux du droit international !

Mme Kallas doit également condamner la participation de l’Estonie à l’invasion de l’Irak, et pas seulement l’invasion de l’Ukraine par la Russie !

L’Estonie a participé en 2003 à la fameuse « coalition des volontaires », dirigée par les États-Unis et le Royaume-Uni, comprenant même l’Ukraine (!), qui a envahi l’État souverain d’Irak - une violation du droit international aussi évidente que celle commise par la Russie en 2022. A notre connaissance, Mme Kallas n’a pas pris clairement position contre cette invasion, ni ne l’a condamnée. Ironie du sort, longtemps oubliée, c’est son père, Siim Kallas, qui était Premier ministre de l’Estonie en 2003 et donc responsable de cette décision. M. Kallas a même justifié l’invasion de l’Irak qui a engendré d’autres conflits armés dans la région, faisant des millions de morts, déstabilisant des États et des cultures et sociétés entières, tout en forçant d’autres millions de personnes à fuir leur pays. Ces vagues de migration de masse posent également des problèmes constants dans les pays européens de destination, entraînant l’insécurité, la polarisation politique et le renforcement des partis d’extrême droite, comme nous le constatons tous au sein du Parlement européen récemment élu.

Ainsi, avec l’installation de Mme Kallas au poste de première diplomate européenne, l’UE sera représentée à l’étranger pour les prochaines années par une personne qui sera inévitablement associée, politiquement et personnellement, à l’un des actes les plus condamnables de l’Occident envers l’Orient dans l’histoire récente. Peut-on imaginer coup plus dur pour la crédibilité déjà faible de l’UE dans de nombreux pays musulmans et arabes, que de voir Mme Kallas montrée du doigt et peut-être même déclarée persona non grata dans certains de ces pays ?

La politique de deux poids-deux mesures et le manque de crédibilité de l’Estonie et de son actuelle cheffe du gouvernement, Mme Kallas, lorsqu’elles dénoncent l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie, sont parfaitement symbolisés par le ruban bleu-jaune ukrainien affiché en signe de solidarité sur la page web du gouvernement estonien, qui contient la « justification » de l’invasion illégale de l’Irak en 2003 ! L’UE ne devrait pas accepter un Haut Représentant qui refuse de condamner l’invasion de l’Irak en 2003 !

Mme Kallas fera payer aux pays du Sud le prix de la guerre en cours en Ukraine

En soutenant fermement une guerre prolongée en Ukraine, du point de vue des États principalement arabes et africains, Mme Kallas sera tenue pour coresponsable de l’insécurité alimentaire et de l’augmentation des prix des denrées alimentaires en raison de la spéculation et de l’insécurité des voies d’exportation de l’Ukraine et de la Russie, pour le blé, les graines de tournesol, les fèves de soja, etc. L’UE pourrait donc être directement associée au risque de famine et à l’appauvrissement de dizaines de millions de personnes dans les pays du Sud.

3. CONCLUSION

Pour les raisons susmentionnées, nous considérons que Mme Kaja Kallas n’est pas en mesure de devenir la principale diplomate de l’Union européenne dans une période d’escalade des conflits armés dans la région de l’Europe. Nous lui demandons donc de renoncer à sa candidature.

En outre, nous lançons l’APPEL suivant aux membres du Parlement européen et aux autres décideurs internationaux : Veuillez voter contre Mme Kaja Kallas au sein de la Commission des affaires étrangères du Parlement européen (AFET) et lors de la session plénière, ou prenez les mesures nécessaires par le biais d’autres institutions à votre disposition, pour empêcher l’élection de Mme Kaja Kallas !

4. QUESTIONS A POSER A MME KAJA KALLAS

1. Comment vos déclarations polarisantes et incendiaires dans le conflit russo-ukrainien s’accordent-elles avec les exigences d’un diplomate, dont le rôle principal est de désamorcer les conflits, de les négocier et de chercher des solutions pour les résoudre ?

2. Considérant que votre propre peur de la Russie, ou celle de votre pays d’origine, l’Estonie, vous semblent plus importantes que la peur justifiée de centaines de millions de citoyens européens face au danger d’un conflit nucléaire ou même d’une troisième guerre mondiale, comment garantissez-vous aux citoyens de l’UE et du monde que vous ne les entraînerez pas dans un conflit militaire majeur avec la Russie ?

3. En supposant que vous accordiez de l’importance au respect du droit international, à la souveraineté des États et à l’intégrité territoriale de chaque pays, comptez-vous présenter des excuses pour l’invasion non provoquée, injustifiée et illégale de l’Irak en 2003 par d’autres États, incluant l’Estonie, et même condamner cette invasion ?

4. Dans le cas contraire, comment comptez-vous représenter l’UE dans les pays arabo-musulmans sans réduire davantage sa crédibilité déjà entamée ?

5. En supposant que vous accordiez de l’importance au respect du droit international, à la souveraineté des États et à l’intégrité territoriale de chaque pays, pourquoi avez-vous fait des déclarations publiques en faveur de l’éclatement de la Russie en petits États, après son éventuelle défaite dans la guerre contre l’Ukraine - en gardant à l’esprit qu’un tel scénario pourrait déclencher des représailles nucléaires de la part de la Russie, et même une Troisième Guerre mondiale ?

5. AGIR

1. Contactez le gouvernement estonien à l’adresse press@riik.ee ou par téléphone au +372 693 5710 et demandez à Mme Kallas de se retirer volontairement.

2. Contactez le SEAE de l’Union européenne par téléphone : +32 2 584 11 11, via ce formulaire en ligne (https://european-union.europa.eu/contact-eu/write-us_en), ou le comité d’évaluation (AFET) de Mme Kallas via l’email afet-secretariat@ep.europa.eu et formulez vos questions/préoccupations.

3. Contactez les membres du Parlement européen (MEPs), idéalement les membres du comité d’évaluation (AFET) de Mme Kallas et formulez vos questions/préoccupations.

4. Contactez les ambassades des pays arabo-musulmans à Bruxelles et informez-les des risques que Mme Kallas peut faire peser sur les relations entre l’Union européenne et ces pays ; demandez-leur de prendre des mesures contre l’élection de Mme Kallas en tant que Haute représentante de l’UE / vice-présidente de la Commission européenne.
— Mission irakienne à Bruxelles : (+32) 2 374 59 92 ; (+32) 2 663 04 90 ; brxemb@mofa.gov. ; iqmail.brussels@mofa.gov. ; iqambassade.irak@skynet.be
— Bureau du représentant palestinien à Bruxelles : (+32) 2 735 1639 ; secretariat@palestinedelegationbrussels.eu
— Mission égyptienne à Bruxelles : (+32) 2 663 58 00 ; (+32) 2 663 58 20 / 28 ; eg.sec.be@hotmail.com
— Mission du Qatar à Bruxelles : (+32) 2 643 4730 ; brussels@mofa.gov.qa

5. Informer les médias et les personnes ou groupes sur les médias sociaux sur les questions concernant l’élection possible de Mme Kaja Kallas en tant que Haut Représentant de l’Union européenne.

Pour toute information utile, veuillez contacter Hans Hedrich au téléphone +40752616128 ou par courriel hanshedrich@gmx.de.

Nous vous remercions de votre contribution à l’élaboration d’une politique étrangère de l’UE davantage axée sur la paix et plus crédible !

Je vous prie d’agréer l’expression de mes salutations distinguées.

Hans Hedrich - militant des droits civiques et de la paix - Roumanie
Le 12 juillet 2024