Nouvelle escalade dangereuse de l’OTAN en Ukraine. Confrontés à la bérézina de l’Ukraine et à des défaites politiques majeures sur le plan intérieur, les pays occidentaux poussent plus que jamais Kiev à multiplier les opérations sur le sol russe, au moyen de leurs armes lourdes et de leur soutien logistique, comme le montrent les frappes de dimanche contre des civils sur une plage de Sébastopol.
À chaque étape, les dirigeants russes ont exprimé leurs inquiétudes, tiré la sonnette d’alarme et souligné que Washington et l’OTAN franchissaient la ligne rouge d’une guerre ouverte contre leur nation. A chaque étape, cependant, ces mêmes pays occidentaux ont feint l’indifférence et poursuivi leur escalade.
Ce dimanche 23 juin, à la mi-journée, l’Ukraine a lancé cinq missiles ATACMS, fournis par les États-Unis, sur une plage bondée de Sébastopol en Crimée, tuant quatre personnes dont deux enfants et en blessant plus de 150 autres, toutes civiles. Le même jour, une double attaque terroriste s’est déroulée dans deux villes de la république russe du Daghestan, dans une région à majorité musulmane, visant un commissariat de police en charge de la circulation, une synagogue et une église orthodoxe, causant une vingtaine de morts.
Après les multiples frappes effectuées fin mai contre les radars d’alerte précoce en cas d’attaque nucléaire stratégique contre la Russie, également rendues possibles grâce aux Américains, ces attentats portent le conflit entre l’OTAN et la Russie à son paroxysme de tension.
Le ministère russe des Affaires étrangères a immédiatement convoqué l’ambassadrice américaine Lynne Tracy à Moscou. A Washington, l’ambassadeur russe Antonov a aussitôt dénoncé l’attaque en soulignant l’implication directe des États-Unis : « L’administration soutient manifestement le crime du régime de Kiev, a-t-il déclaré. Elle a pris le parti du terrorisme international et tolère les attaques contre les civils par les partisans de [Stepan] Bandera. Rien ne justifie les actes sanglants des forces armées ukrainiennes. Ces crimes ont été commis délibérément lors de la concentration d’un maximum de Russes sur le rivage. Ces criminels n’ont même pas hésité à tuer des femmes et des enfants en pleine fête chrétienne. » (C’était en effet le dimanche de la Trinité.)
Implication de l’OTAN
Non seulement les États-Unis ont fourni les missiles ATACMS, mais ils en ont même assuré le guidage. Dans une interview publiée le 24 juin sur le portail ilsussidiario.net, l’expert militaire italien et directeur d’Analisi Difesa, Gianandrea Gaiani, précise que les missiles qui ont frappé la Crimée ont été guidés par des drones basés sur la base aérienne américaine de Sigonella, en Sicile.
L’utilisation de l’ATACMS (…) implique un soutien technique important des États-Unis : ils sont utilisés avec des lanceurs HIMARS et l’attaque est lancée par un drone survolant la mer Noire. Les drones décollent de la base sicilienne de Sigonella et servent d’éclaireurs et de guidage aux missiles.
Dans une déclaration vidéo publiée sur X le jour-même, Scott Ritter, expert militaire au franc-parler et ancien inspecteur en armement des Nations unies en Irak, pointe du doigt l’implication occidentale dans les attaques, aussi bien en Crimée qu’au Daghestan :
Il n’y a aucun doute qu’on a affaire à deux attaques directes contre la Russie, par des mandataires des États-Unis et de l’OTAN. Et c’est plus qu’un engagement par procuration, étant donné la nécessité de la préparation, du soutien du renseignement, etc. Il s’agit d’une attaque directe à la fois des États-Unis, de l’OTAN et d’entités non européennes de l’OTAN, toutes les parties qui ont pris la décision, au cours des derniers jours et des dernières semaines, d’élargir la portée et l’ampleur de leur participation au conflit russo-ukrainien.
Gagner du temps
La réalité sur le terrain, comme le souligne Gianandrea Gaiani, est que
la stratégie russe d’anéantissement progressif des forces ukrainiennes porte ses fruits, y compris sur le plan politique : en témoigne le fait que les trois principaux partisans de la guerre, la France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne, ont des gouvernements en crise ou des élections prévues. Politiquement, la stratégie de Poutine porte ses fruits, au-delà de la conquête de territoires.
Comme la mobilisation de Solidarité & progrès dans la campagne des élections législatives est là pour le démontrer, la seule voie possible passe par une négociation de paix, telle que le président russe l’a mise sur la table le 14 juin dernier.
La proposition de Poutine de garder les quatre régions a été rejetée avec indignation, rappelle Gaiani. Mais accepter de négocier signifie s’asseoir à la table et dire : ‘Vous voulez quatre régions ? Je vous en donnerai trois, ou peut-être deux.’ Il y a deux ans, il y a eu un accord de paix, négocié par les Turcs et accepté par l’Ukraine et la Russie : il prévoyait une Ukraine neutre et l’autonomie pour les deux républiques du Donbass. Les Américains l’ont saboté. Poutine exige aujourd’hui l’annexion de quatre régions ; si nous attendons encore six mois, les revendications russes seront plus larges. Les Ukrainiens n’ont aucun moyen de renverser la situation, car pour recruter des gens pour aller au front, ils doivent déclencher des raids dans les villes – plus personne ne se porte volontaire.
Selon Gaiani, l’OTAN ne cherche qu’à gagner du temps,
parce que Kiev ne peut pas s’effondrer avant la formation de la nouvelle Commission européenne [en novembre] et avant les élections américaines, afin de ne pas causer d’ennuis à Biden lors des élections présidentielles.