Les campus américains et la Cour pénale vont-ils stopper la course génocidaire de Netanyahou ?

jeudi 2 mai 2024

A Gaza, l’opération meurtrière de Netanyahou se poursuit, les forces de Tsahal menaçant d’entrer à Rafah à tout instant et de mettre ainsi en péril les 1,5 million de réfugiés qui s’y trouvent. La région entière marche sur des charbons ardents depuis que le conflit s’est étendu, par la main d’Israël soutenue par Washington, mettant l’État hébreu directement aux prises avec l’Iran. Dans le même temps, les États-Unis et l’OTAN continuent à jeter de l’huile sur le feu ukrainien, rapprochant pas à pas le monde d’un conflit nucléaire avec la Russie.

Dans ce contexte, un certain nombre de mouvements, en différents lieux du monde, laissent espérer que les populations occidentales ne restent pas entièrement apathiques face à cette dérive périlleuse : l’État d’Hawaï, par la voix de son Parlement, vient d’exiger que le gouvernement américain soutienne un cessez-le-feu immédiat à Gaza ; sur les campus américains, les jeunes s’opposent massivement à la politique de Biden à l’égard d’Israël ; mardi, suite au dépôt d’une plainte du Nicaragua, la Cour internationale de justice (CIJ) a mis en garde l’Allemagne sur une potentielle complicité de génocide à Gaza ; en Israël même, Netanyahou s’inquiète des mandats d’arrêt éventuels de la CPI à son encontre…

Les États-Unis en pleine ébullition

Il devient de plus en plus compliqué pour l’administration Biden de se maintenir dans sa position pour le moins hypocrite, dans laquelle les États-Unis arment Israël pour son opération militaire contre Gaza, tout en apportant de l’aide humanitaire aux victimes palestiniennes de cette opération.

Dans le sillage de nombreuses villes américaines, un premier État exige le cessez-le-feu à Gaza. Par un vote de 24 contre 1 au Sénat et de 48 contre 3 à la Chambre des représentants, la législature d’Hawaï a adopté ce week-end le projet de loi SCR13, appelant le président américain à exiger un « cessez-le-feu immédiat et permanent » à Gaza. Le texte voté ajoute que « les membres de la délégation du Congrès d’Hawaï sont invités à soutenir la résolution » présentée par la députée démocrate Cori Bush. Cela faisait des semaines que les militants locaux allaient trouver les élus de tous bords pour les convaincre de faire adopter cette loi. Selon les mots d’un militant, « Hawaï peut être fier de son rôle de leader pour forcer un cessez-le-feu immédiat et permanent à Gaza ».

Depuis plusieurs jours, les manifestations étudiantes contre la guerre d’Israël se propagent comme un feu de paille sur les campus universitaires américains, commençant même à s’étendre à d’autres pays. Le génocide à Gaza, avec la bénédiction cynique de l’administration Biden, a réveillé les campus, poussant un nombre croissant de jeunes Américains à se lever pour exprimer leur opposition. Selon un sondage de CNN, 81 % des 18-34 ans désapprouvent la politique israélienne de Biden, et ils sont 71 % dans l’ensemble de la population américaine.

De plus, la combinaison d’une répression policière particulièrement violente (comme à l’Université Emory) et des accusations caricaturales d’antisémitisme pour tenter de discréditer les manifestations, ne fait qu’attiser la révolte.

Samedi soir, Jill Stein, candidate à la présidence du Parti vert, et Megan Green, présidente du Conseil municipal de St. Louis, ont été arrêtées avec des dizaines d’étudiants et de militants, alors qu’elles participaient à une manifestation pacifique contre le génocide à l’Université Washington de St. Louis. Green a rapporté à la presse locale que la manifestation était « bon enfant » avant l’arrivée de la police, qui a procédé à des arrestations, malgré les négociations engagées par Stein et deux conseillers municipaux de St. Louis avec les autorités policières et des responsables de l’université pour éviter les heurts. « La police commet les mêmes erreurs qu’il y a 50 ans », a déclaré un manifestant de 70 ans, faisant allusion aux arrestations d’étudiants sur les campus, lors des manifestations contre la guerre du Vietnam.
Le 26 avril, une lettre ouverte, signée par plus de 130 professeurs et personnels de l’Université de Washington, a été remise à l’administration de l’établissement, condamnant sa « réponse arbitraire et brutale » aux manifestations pacifiques sur le campus. « On doit s’inquiéter du fait que les attaques contre la liberté d’expression et la liberté académique ont considérablement augmenté dans notre pays et sur ce campus », dénonce cette lettre ouverte.

Netanyahou en panique face à un éventuel mandat d’arrêt de la CPI

Le Times of Israel a rapporté que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou aurait été pris de panique à l’idée que la CPI envisagerait très probablement d’émettre un mandat d’arrêt contre lui.

Selon ce quotidien, plusieurs médias israéliens rapportent que les États-Unis eux-mêmes se démènent pour empêcher cela. Le Times cite l’analyste Ben Caspit, qui écrit sur le site d’information Walla que Netanyahou est « sous un stress inhabituel » à propos de la perspective d’un mandat d’arrêt lancé contre lui et d’autres Israéliens par le tribunal de l’ONU à La Haye, ce qui constituerait une détérioration majeure du statut international d’Israël. Caspit rapporte également que le Premier ministre mènerait une « campagne téléphonique ininterrompue », centrée en particulier sur l’administration du président américain Joe Biden, pour empêcher cette possibilité.

L’analyste du quotidien Haaretz, Amos Harel, écrit de son côté que le gouvernement israélien s’attend à ce que le procureur de la CPI, Karim Khan, émette cette semaine des mandats d’arrêt contre Netanyahou, son ministre de la Défense Yoav Gallant et le chef d’état-major de Tsahal, Herzi Halevi. Selon Harel, les États-Unis, qui, comme Israël, ne font pas partie des 124 pays signataires du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, sont déjà pleinement engagés dans un effort pour bloquer l’émission de ces mandats d’arrêt.

Le New York Times a rapporté que le bureau du Premier ministre israélien ne commenterait pas ces « spéculations », mais Netanyahou lui-même, dans un accès de colère sur les réseaux sociaux, a déclaré que toute intervention de la CPI « créerait un dangereux précédent qui menacerait les soldats et les responsables de toutes les démocraties qui luttent contre le terrorisme sauvage et l’agression gratuite ».

« Sous ma direction, Israël n’acceptera jamais aucune tentative de la CPI de saper son droit inhérent à l’autodéfense, a-t-il ajouté. La menace de s’emparer des soldats et des fonctionnaires de la seule démocratie du Moyen-Orient et du seul État juif du monde est scandaleuse. Nous ne nous inclinerons pas devant elle. »

Comme l’explique la présidente de l’Institut Schiller, Helga Zepp-LaRouche, le monde se trouve dans un de ces « moments prégnants » qui se manifestent parfois dans l’histoire de l’humanité, et les États-Unis sont clairement le lieu où se décidera si cette histoire ouvrira un nouveau chapitre positif, un nouveau paradigme pour l’humanité, ou s’il s’agit, au contraire, du dernier chapitre.

Compte tenu du péril de la situation, dans un contexte où les deux candidats à la présidence américaine, Biden et Trump, sont l’un comme l’autre entourés de faucons et autres va-t-en-guerre, il est très difficile de savoir sur quoi tout cela va déboucher. Mais la conscience et la volonté de justice qui se manifestent actuellement dans la jeunesse américaine permettent d’espérer que les États-Unis et les pays de l’OTAN puissent un jour changer d’orientation et substituer la coopération à l’affrontement.