La vaccination, un enjeu majeur de santé publique

samedi 22 août 2020, par Karel Vereycken

Faute de couverture vaccinale suffisante, la rougeole fait son retour aux Etats-Unis.

Alors que la pandémie du Covid-19 nous rappelle cruellement à quel point nous ignorons encore bien des choses sur le fonctionnement de notre système immunitaire, il n’en reste pas moins que toute politique de santé se condamne à l’échec si elle fait l’impasse sur une véritable stratégie de couverture vaccinale.

Certes, le discours (si ce n’est le lobby) anti-vaccination trouve de plus en plus d’échos au sein de la population. Mais doit-on s’en étonner, quand le discours politique (surtout depuis la crise du coronavirus) entretient si souvent le flou au point de se contredire lui-même – donnant le sentiment qu’une fois de plus, on ne nous dit pas tout ? Oui, il faut avoir du discernement concernant le choix des vaccins à prioriser, et oui, il faut savoir reconnaître quand il y a eu des failles. Mais en aucun cas on ne peut se permettre de laisser la société sombrer dans le rejet de ce qui constitue l’une des plus grandes avancées de l’histoire humaine ; et de ce qui a sauvé des millions de vies.

Non seulement la vaccination a-t-elle permis, dans les pays avancés, de marginaliser des maladies autrefois redoutables, mais elle a aussi allégé considérablement le fardeau des maladies infectieuses dans bon nombre de pays sous-développés.

En réalité, après l’accès à l’eau potable, rien n’est aussi efficace pour prévenir les maladies que la vaccination !

On ne le redira jamais assez : si les masques protègent bien plus autrui que soi-même, il en est de même pour les vaccins : un pourcentage élevé de personnes vaccinées dresse une barrière protectrice qui réduit considérablement le risque pour les individus non-vaccinés— y compris ceux, comme les immunodéprimés, pour qui la vaccination est contre-indiquée. Cette couverture est décisive dans un monde où l’augmentation massive de la mobilité et la forte densité de population exposent potentiellement tous les membres de l’espèce humaine, mais aussi du monde animal et végétal, aux maladies développées localement par chacun individuellement.

Paradoxalement, comme le note le Pr Didier Raoult [1], partisan d’une politique de vaccination raisonnée, c’est en vaccinant les enfants (contre la grippe ou la méningite), qu’on offre la meilleure protection à leurs grands-parents. De plus, on sait maintenant qu’un taux élevé de vaccination d’une génération protège celle qui lui succède.

Dans nos pays développés, malheureusement, plusieurs facteurs ont gravement entamé la confiance, l’acceptation et la participation citoyenne aux campagnes de santé publique :

  • L’efficacité des systèmes de santé publique dans les pays développés a paradoxalement induit, dans l’esprit des jeunes générations, la dangereuse illusion d’une société « à risque zéro », donc « à zéro responsabilité ». Comme le dit Judith Ehret, spécialiste des vaccins basée à Paris : « Si les parents ne voient pas leurs enfants mutilés par la polio ou atteints de diphtérie ; s’ils s’imprègnent d’articles sur les dangers de la vaccination et qu’ils sont obligés de prendre l’initiative d’amener leurs enfants – en excellente santé – dans une clinique pour les faire vacciner, la chance qu’ils se conforment aux recommandations est bien moindre que s’ils comprenaient pleinement l’importance des enjeux ».
  • Des esprits de plus en plus gangrenés par l’idéologie hédoniste ou libertarienne, pour qui la liberté individuelle, réduite au droit à disposer « librement » de son corps (se suicider, se droguer, se tatouer, avorter, choisir son sexe, etc.) passe avant tout autre considération des règles collectives élémentaires structurant une société et un vécu en commun.
  • Une présence de plus en plus réduite de médecins et d’infirmières (y compris parfois eux-mêmes en proie de doute sur le bien-fondée de la démarche) dans la sphère collective : école, lieu de travail, lors de la préparation militaire pour les conscrits. Autant de circonstances dans la vie de chacune et de chacun, où, dans un cadre collectif, on se faisait vacciner.
  • La surexposition à des informations faciles, biaisées, voire carrément fausses sur les réseaux sociaux, amplifiée par une baisse généralisée du niveau d’exigence intellectuelle – elle-même doublée d’un rejet d’une élite politique ou scientifique bien souvent corrompues (ou imposant verticalement des décisions) – , qui ont dénaturé le rapport à la connaissance. Aujourd’hui, une recherche rapide effectuée sur internet avec le mot-clé « risques + vaccins » donne cinq fois plus de réponses qu’avec « avantages + vaccins ». De facto, les aspects négatifs de la vaccination font l’objet d’une publicité beaucoup plus importante que les aspects positifs. Par exemple, le fait que l’aluminium soit présent dans certains vaccins a été présenté comme une preuve spectaculaire du grand danger qu’ils sont censés représenter. Mais pourquoi ne voit-on que rarement précisé que, si une (infime) quantité d’aluminium est ajoutée à certains vaccins sous forme d’adjuvant, c’est justement pour faciliter la réponse immunitaire de notre corps et que des vaccins de plus en plus perfectionnés n’ont plus besoin d’y recourir. Et pourquoi ne nous dit-on jamais que les nourrissons reçoivent plus d’aluminium par le lait maternel au cours des six premiers mois de leur vie que par les vaccins ; et que leur organisme est parfaitement en mesure de l’éliminer rapidement ? Malheureusement, suite à des campagnes jetant le doute sur son innocuité, la couverture vaccinale a chuté dans certains pays, entraînant par exemple la réapparition de la coqueluche, maladie bactérienne très contagieuse, et de la rougeole, maladie mortelle.

Les avantages des vaccins

La variole, éradiquée grâce à la vaccination, touchait encore 15 millions de cas par an dans les années 1960. Ici un enfant du Ghana.
Jeune asiatique atteinte de la polio.

Les premiers argumentaires en faveur de la vaccination datent de l’époque de Benjamin Franklin, d’Edward Jenner et de Louis Pasteur. Si le problème est avant tout philosophique, quelques faits pourront peut-être amener les anti-vaccins à reconsidérer leurs positions.Pour accéder au résumé de l’histoire de la vaccination, nous vous invitons à consulter cet excellent article sur le site vaccination-info.be.

Les vaccins sont incontestablement l’une des plus grandes réussites de la médecine moderne. Selon les chiffres de l’OMS, au moins 10 millions de décès auraient été évités entre 2010 et 2015 grâce aux vaccinations effectuées dans le monde. Des millions d’autres vies ont été protégées contre les souffrances et les handicaps liés à des maladies telles que la pneumonie, la diarrhée, la coqueluche, la rougeole et la polio.

Vers l’éradication de la polio grâce à la vaccination ? Alors qu’en 1988 la maladie était endémique dans 125 pays, elle ne l’était plus qu’en 3 pays en 2017.

Rappelons également que la variole a été éradiquée de la surface de la terre en 1980, permettant une économie globale de 2 milliards de dollars. On ne vaccine plus contre la variole, sauf pour se protéger contre des attaques bioterroristes.

Un énorme effort de vaccination a permis de réduire le nombre de cas de poliomyélite, de 350 000 dans 125 pays en 1988 à seulement 33 cas confirmés en 2018, mais repassant à 175 cas en 2019, principalement au Pakistan, au Nigéria et en Afghanistan.

En faisant un calcul un peu mécanique, certains estiment qu’en vaccinant l’ensemble des enfants avec toute la palette de des vaccins existants, on éviterait aujourd’hui un décès sur sept chez les enfants en bas âge, principalement dans les pays en développement.

Fait intéressant : on a constaté que certains vaccins augmentent l’espérance de vie des personnes en leur offrant une protection inattendue contre des maladies autres que celles contre lesquelles ils étaient destinés !. Aux États-Unis, les personnes âgées vaccinées contre la grippe auraient environ 20 % de risques en moins de souffrir de maladies cardiovasculaires et cérébrovasculaires. Leur mortalité, toutes causes confondues, diminue de 50 % par rapport à leurs homologues non vaccinés.

A cela s’ajoute le fait qu’en diminuant le recours aux antibiotiques (médicaments qui ont permis de faire reculer considérablement la mortalité associée aux maladies infectieuses), on réduit en même temps le développement des bactéries multirésistantes (BMR) à ces substances, un enjeu qui mobilise toute la communauté médicale de la santé depuis 2015.

Un investissement sain

Plus terre à terre, investir dans les vaccins permet non seulement de sauver des vies mais de faire des économies considérables à moyen et long terme – et donc de redéployer les investissements publics vers d’autres secteurs décisifs. Aux États-Unis, un modèle informatique du Centre pour le contrôle des maladies (CDC) estime que chez les enfants nés entre 1994 et 2013, la vaccination permettra d’empêcher, au cours de leur vie, environ 322 millions d’affections, 21 millions d’hospitalisations et 732 000 décès (soit une économie nette de 295 milliards de dollars en coûts directs et de 1 380 milliards pour la société). Le paludisme (pour lequel il existe plusieurs candidats vaccins prometteurs), outre les terribles dommages humains, coûte à l’Afrique subsaharienne 100 milliards de dollars par an en perte de Produit intérieur brut (PIB).

Au niveau sociétal, si le retour sur investissement (ROI) dans la vaccination est estimé de 12 à 18 %, les avantages économiques de l’amélioration sanitaire qui en découle dépassent toute évaluation comptable, et restent donc largement sous-estimés ! Dans les pays en voie de développement, les programmes de vaccination sont la pierre angulaire des services de base en matière de santé. L’infrastructure et le personnel nécessaires à un programme de vaccination efficace et à son suivi permettent en outre d’améliorer les de services de base en matière de soins, en particulier pendant la période périnatale critique et la petite enfance. De plus, des programmes de vaccination bien menés laissent aux pays en voie de développement la possibilité de consacrer plus de ressources à d’autres grands objectifs nationaux, notamment l’éducation et l’investissement dans les infrastructures.

Rendre disponibles les vaccins existants

La première chose à faire sera donc de rendre universellement disponibles, à des coûts acceptables, les vaccins déjà existants. Si l’on recense 25 maladies évitables par la vaccination (MEV), le potentiel des vaccins ne se traduit pas sur le terrain pour l’ensemble de la population mondiale. Un enfant né dans un pays en voie de développement présente un risque plus de dix fois plus élevé de mourir de MEV qu’un enfant d’un pays industrialisé. Dans les pays riches, les enfants bénéficient d’une douzaine de vaccins, dans les pays pauvres, la moyenne est de six. Chez les enfants de moins de 5 ans, 4 des 25 MEV sont responsables de 98 % des décès :

  • Rougeole : 140 000 décès dans le monde en 2018. Bien qu’elle ait été éradiquée aux États-Unis, la maladie a fait son retour en 2018 avec 375 cas et 1 282 cas en 2019 dans 31 États. Parmi ces cas, 128 ont été hospitalisés et 61 ont déclaré avoir eu des complications, notamment une pneumonie ou une encéphalite ;
  • HIB (Haemophilus influenzae type b)  : 200 000 décès en 2008. L’HIB est une bactérie responsable de pneumonies graves, de méningites et d’autres maladies invasives, presque exclusivement chez les enfants de moins de 5 ans ;
  • Coqueluche : 160 700 décès par an pour un nombre de cas estimé à 24,1 millions. En 2012, les CDC ont signalé 48 277 cas de coqueluche aux États-Unis, soit le plus grand nombre depuis 1955 ;
  • Tétanos néonatal  : 25 000 décès de nouveau-nés en 2018.

Les autres MEV les plus courantes sont :

  • la tuberculose : 1,5 million de décès sur 10 millions de cas en 2018 ;
  • l’hépatite B : 1,34 million de décès sur le total des cas d’hépatite B (257 millions) et d’hépatite C (71 millions) ;
  • la fièvre jaune : 30 000 décès sur 200 000 cas ;
  • la diphtérie : 2 100 décès sur 4 500 cas en 2015 ;
  • la rubéole : non mortelle mais provoquant des lésions majeures ;
  • les oreillons : non mortelle mais provoquant des lésions majeures.
    En bref, au moins 4 millions de vies pourraient être sauvées chaque année, en rendant les vaccins existants immédiatement disponibles pour l’ensemble de la population mondiale. Si les anti-vaccins avaient le dernier mot et que toutes les vaccinations étaient interrompues, le monde perdrait immédiatement au moins 2 millions de vies par an, rien que pour commencer, car la situation irait en s’aggravant par la suite !

Dans le monde réel et non fantasmé, les vaccins ont un excellent ratio bénéfice/risque. La plupart des vents de panique se sont avérés être basés sur des données erronées, ou pire : des campagnes de propagande comme le documente assez bien cet article de la BBC.

Il n’en reste pas moins vrai, et il faut le dire : dans la vaccination comme dans tous les domaines, le ratio bénéfice/risque n’a jamais été et ne sera jamais de 100 pour 0. Il demeure une réalité (et une véritable problématique pour la recherche scientifique), que si l’immense majorité des gens tireront profit de la vaccination, une infime minorité en subira des effets secondaires indésirables – chaque individu ayant, de fait, un système immunitaire et un métabolisme différent.. Mettre au point un vaccin qui sera bénéfique pour la plus large majorité (jeunes, vieux, porteurs d’autres pathologies, etc.) est chaque fois un défi majeur.

Ajoutons, car on tend à l’oublier, que les vaccins ne rendent pas immortel. Il ne s’agit pas de la potion magique d’Astérix. Certaines maladies peuvent frapper même des personnes vaccinées. La différence, c’est que l’organisme vacciné, dont le système immunitaire dispose déjà d’informations sur la nature de l’agresseur, pourra mieux et plus rapidement se défendre.

Si certaines protègent contre l’infection en tant que telle, la plupart des vaccins sont principalement destinés à éduquer le système immunitaire. Par exemple, il a été démontré que le vaccin contre le papillomavirus humain (HPV), un virus transmis pendant les rapports sexuels pouvant entraîner des lésions allant jusqu’au cancer, offre une protection complète contre la maladie, phénomène qu’on appelle « l’immunité stérilisante ». Cette immunité stérilisante peut diminuer à long terme, mais la protection contre la maladie persiste généralement car la mémoire immunitaire minimise les conséquences de l’infection.

Pour autant, l’objectif idéal d’un programme de vaccination demeure celui de l’éradication complète de la maladie, comme on a su le faire pour la variole. 

Potentiellement, souligne un bulletin de l’OMSd’autres maladies infectieuses sans réservoir extrahumain (animal) peuvent être éradiquées, à condition qu’un vaccin efficace et des tests de diagnostic spécifiques soient disponibles. L’éradication nécessite des niveaux élevés d’immunité de la population dans toutes les régions du monde sur une période prolongée, avec une surveillance adéquate en place.

Un contre-exemple, le retour de la rougeole

Faute de couverture vaccinale suffisante, la rougeole fait son retour aux Etats-Unis.

Le retour dramatique de ce qui est pourtant une MEV, est un terrible contre-exemple de ce qu’il faut faire.

Cette maladie infectieuse très contagieuse causée par le virus de la rougeole touche environ 20 millions de personnes par an, principalement dans les régions en développement d’Afrique et d’Asie. Le risque de décès parmi les personnes infectées est d’environ 0,2 %, mais peut atteindre 10 % chez les personnes souffrant de malnutrition. La rougeole peut toucher des personnes de tout âge, mais les nourrissons et les très jeunes enfants sont les plus exposés, avec des complications potentielles telles que la pneumonie et l’encéphalite (gonflement du cerveau), ainsi qu’un handicap à vie - lésions cérébrales permanentes, cécité ou perte d’audition.

Des données récentes montrent que le fait de contracter le virus de la rougeole peut avoir des conséquences sanitaires supplémentaires à long terme, le virus endommageant la mémoire du système immunitaire pendant des mois, voire des années, après l’infection. Car cette « amnésie immunitaire » rend les survivants vulnérables à d’autres maladies potentiellement mortelles, comme la grippe ou des diarrhées graves, en affaiblissant les défenses immunitaires de l’organisme.

En 1980, 2,6 millions de personnes sont mortes de la rougeole. Suite à un effort de vaccination massif, ce chiffre a pu être ramené, d’abord à 545 000 en 1990, puis à 73 000 en 2014. Malgré ces améliorations prometteuses, le taux de maladie et de décès a recommencé à augmenter entre 2017 et 2019 en raison d’une diminution de l’immunisation.

On estime qu’en 2018, 20 millions d’enfants dans le monde, soit plus d’un sur dix, n’ont pas reçu les vaccins protecteurs, tels que le vaccin contre la rougeole, la diphtérie et le tétanos. Au niveau mondial, depuis 2010, la couverture vaccinale avec la triple dose contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche (DTC3) et une dose de vaccin contre la rougeole, a stagné à environ 86 %. Bien qu’élevé, ce taux reste insuffisant, car pour que cela marche réellement, c’est un taux de couverture de 95 % dont on a besoin !

Ainsi, en 2018, près de 350 000 cas de rougeole ont été signalés dans le monde, soit plus du double par rapport à 2017. La même année, plus de 140 000 personnes en sont mortes selon les estimations.

La plupart des enfants non vaccinés vivent dans les pays les plus pauvres et en proportion accrue dans des États fragiles ou touchés par des conflits. Près de la moitié d’entre eux habitent dans 16 pays : Afghanistan, République centrafricaine, Tchad, République démocratique du Congo (RDC), Éthiopie, Haïti, Irak, Mali, Niger, Nigeria, Pakistan, Somalie, Soudan du Sud, Soudan, Syrie et Yémen.

En 2018, les pays les plus touchés par la rougeole étaient la République démocratique du Congo (RDC), le Liberia, Madagascar, la Somalie et l’Ukraine. Ces cinq pays représentaient près de la moitié de tous les cas de rougeole dans le monde.

« Nous disposons d’un vaccin anti-rougeoleux sûr et efficace depuis plus de 50 ans », relève avec amertume le Dr Robert Linkins, chef de la branche du contrôle accéléré des maladies et de la surveillance des MEV aux CDC. « Ces chiffres nous rappellent que chaque enfant, partout, a besoin, et mérite, ce vaccin qui lui sauve la vie. Nous devons inverser la tendance et mettre fin à ces décès évitables en améliorant l’accès au vaccin anti-rougeoleux. »

Si les pays les plus pauvres sont les plus touchés, certains pays plus riches ont également été confrontés à des poussées de l’épidémie de rougeole. En 2019, les États-Unis ont signalé leur plus grand nombre de cas depuis 25 ans, tandis que quatre pays d’Europe ont été touchés : l’Albanie, la République tchèque, la Grèce et le Royaume-Uni, tous ont perdu leur statut de pays sans rougeole en 2018 à la suite d’épidémies prolongées de cette maladie. C’est le protocole lorsque la transmission se poursuit de façon continue dans le pays pendant plus d’un an.

Il sera essentiel de corréler la carte de l’actuelle pandémie de Covid-19 avec celle de la couverture vaccinale contre différentes maladies, région par région et pays par pays.

Éradiquer le malthusianisme

On peut prouver que le mouvement antivaccins a été dirigé et promu, ouvertement et en sous-main, par la faction la plus malthusienne du lobby financier « vert » qui dirige à la fois la City de Londres et Wall Street.

Après tout, le prince Philip, l’époux de la reine Elizabeth II, a ouvertement fait connaître son désir, afin de marquer sa sympathie pour le règne animal qu’il estime menacé, de se réincarner sous forme d’un virus mortel afin de régler le « grave problème » de la « surpopulation », qu’Henry Kissinger avait lui-même identifié en 1972, dans le (National Security Study Memorandum 200) comme une « menace » pour les intérêts de la sécurité nationale américaine, les ressources des pays du Nord se trouvant dans ceux du Sud. Cela explique sans doute pourquoi tant de vaccins restent indisponibles pour ces derniers.

Ajoutons que les politiques de privatisation et de démantèlement du secteur public, dictées par le FMI depuis la même époque au nom du « consensus de Washington », ont conduit de nombreux pays de l’hémisphère sud à réduire, voire arrêter, les investissements dans la santé publique. Et comme toujours lorsqu’on veut faire des économies, ce sont les mesures préventives, telles que la vaccination, qui sont les premières cibles.

Ainsi, malgré des efforts admirables aboutissant à des progrès, beaucoup trop de personnes dans le monde (dont près de 20 millions de nourrissons chaque année) n’ont toujours pas réellement accès aux vaccins.

Et maintenant que la Covid-19 vient désorganiser la logistique et des systèmes de santé toujours précaires, sans un sursaut planétaire, le danger d’une régression de la situation sanitaire mondiale devient, hélas, bien réel.

Vaccins : principes, types et procédures

Principes

Les vaccins sont des préparations contenant des substances antigéniques destinées à induire une immunité active spécifique contre un agent infectieux donné (virus, bactérie, parasite). On appelle antigène toute substance étrangère à l’organisme qui est susceptible d’induire la formation d’anticorps avec lesquels elle s’unira spécifiquement. Cette réponse immune liée à l’administration du vaccin a pour effet d’éviter ou d’atténuer la maladie naturelle ou ses conséquences délétères lors d’un contact ultérieur avec l’agent infectieux.

Types

Pour la mise au point des vaccins, les scientifiques ont élaboré plusieurs approches basées sur les informations relatives aux infections que le vaccin permettra de prévenir, comme la manière dont les germes infectent les cellules et celle dont le système immunitaire y réagit. Les options vaccinales intègrent également des critères spécifiques aux populations, en fonction du groupe d’âge, des modes alimentaires ou de la région géographique où ils se trouvent.

A. Vaccins « vivants », dits de 1ère génération.

Il s’agit d’agents infectieux vivants dont la virulence est diluée par culture. Ces vaccins contiennent une version du virus ou de la bactérie vivante, qui a été affaiblie de façon à ne plus provoquer de maladie grave chez les personnes dotées d’un système immunitaire sain. Comme les vaccins vivants atténués sont ce qui se rapproche le plus d’une infection naturelle, les informations qu’ils transmettent au système immunitaire sont optimales. Parmi les exemples de vaccins vivants atténués, on peut citer le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) et celui contre la varicelle. Alors que d’autres types de vaccins restent recommandés, pour les vaccins vivants (ROR, BCG, varicelle, zona, fièvre jaune) les états d’immunodépression (par exemple suite à une chimiothérapie) ou de déficit immunitaire (HIV, etc.) contre-indiquent leur administration.

Ajoutons qu’il est désormais possible de créer de nouvelles souches de micro-organismes, rendues totalement inoffensives par voie génétique et servant de vaccins vivants recombinants. Il s’agit d’inactiver précisément, ou d’éliminer (quand ils sont connus) les gènes responsables de leur pouvoir pathogène ou gènes de virulence. Les bactéries ou virus ainsi atténués ne sont finalement pas très différents des vaccins vivants classiquement atténués : on obtient des micro-organismes inoffensifs, mais identiques, en apparence, aux souches naturelles pour le système immunitaire. Leur coût de production est moindre, ce qui est loin d’être négligeable quand on sait que les pays en développement sont les premiers touchés par les maladies infectieuses. Ils sont également plus intéressants du point de vue de la sécurité : le risque de réversion vers la virulence, possible avec les vaccins classiques, étant supprimé. A l’Institut Pasteur, un vaccin de ce type administrable par voie orale a été mis au point contre la shigellose et fait actuellement l’objet d’essais chez l’homme. Un vaccin atténué par voie génétique a également été élaboré contre la Fièvre de la vallée du Rift. De nombreux laboratoires se concentrent par ailleurs sur la recherche des gènes de virulence de plusieurs pathogènes en vue de mettre au point des vaccins atténués par voie génétique.

B. Vaccins « tués », dits de 2e génération

  • Les vaccins inactivés sont obtenus en inactivant, ou en tuant, un agent infectieux entier qu’on rend inapte à la multiplication du fait d’un traitement physique ou chimique. Le vaccin inactivé contre l’hépatite A et la polio en sont des exemples.
  • Les vaccins sous-unités mobilisent seulement certaines parties du virus ou de la bactérie tués. Il s’agit d’antigènes spécifiques de l’agent infectieux obtenus après traitement ou après fabrication de novo. Actuellement, les techniques issues de l’ingénierie génétique tendent à considérablement simplifier leur préparation. Ces vaccins produisent des réponses immunitaires différentes de celles des vaccins vivants atténués. Souvent, des doses multiples sont nécessaires pour développer et/ou maintenir l’immunité.
  • On dispose déjà de vaccins sous-unités contre l’Haemophilus influenzae b (HIB), la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, le pneumocoque et le méningocoque et un vaccin sous-unité, mis au point à l’Institut Pasteur au milieu des années 80, est aujourd’hui commercialisé : c’est un vaccin contre l’hépatite B. Plusieurs candidats vaccins de ce type sont actuellement expérimentés par les chercheurs pasteuriens, dans le domaine du paludisme, par exemple.

C. Vaccins de 3e génération

  • Les vaccins « vectorisés ». Après les années 60-70, des avancées biotechnologiques majeures permettent de développer un nouveau type de vaccin, les vaccins vectorisés. Contrairement aux vaccins vivants atténués ou aux vaccins inactivés, ceux-là ne contiennent pas l’agent infectieux capable de transmettre la maladie. A la place, ils utilisent un vecteur inoffensif contenant un ou plusieurs gènes de l’agent infectieux codant les antigènes capables d’être reconnus par le système immunitaire. Plus précisément, les gènes codants pour ces molécules étrangères sont introduits dans les micro-organismes « vecteurs », qui les exprimeront ensuite à leur surface, ou les sécréteront dans le milieu extérieur. Ces vaccins vivants recombinants sont des vaccins mixtes qui permettent de vacciner à la fois contre le vecteur et contre le virus ou la bactérie dont ils présentent les antigènes au système immunitaire. On peut imaginer à terme faire porter par des vecteurs des antigènes provenant de plusieurs agents pathogènes différents et obtenir ainsi des vaccins multivalents.
  • Plusieurs candidats-vaccins de ce type ont été construits à l’Institut Pasteur. Sont notamment à l’étude dans cet objectif : le BCG, ainsi qu’un vaccin recombinant VIH-rougeole, constitué d’un virus de la rougeole atténué et portant des antigènes du virus du sida. Des antigènes tumoraux véhiculés par des vecteurs viraux, notamment le virus de la grippe, sont également expérimentés dans la recherche de vaccins anti-cancers. Le vaccin contre l’hépatite B, par exemple, est produit de cette façon. D’autres vaccins de ce type sont actuellement à l’essai, notamment contre le paludisme.
  • Les vaccins à ADN et à ARN sont en cours de développement depuis plusieurs décennies. Bien qu’ils soient déjà utilisés pour les saumons et les chiens, aucun vaccin de ce type n’a été validé pour l’homme. Au lieu d’injecter un virus vivant dilué ou une partie non active de celui-ci, le concept consiste à introduire une petite partie du code génétique d’un virus, capable de « coder » les antigènes spécifiques produits par l’organisme lorsqu’il est attaqué. Injecté dans le corps et absorbé par les cellules, les processus métaboliques normaux synthétisent des protéines spécifiques (antigènes) basées sur le code génétique du plasmide (ADN ou ARN) qu’elles ont absorbé.

    La perspective de ce type de vaccins présente des avantages majeurs, notamment la production d’une forte réponse immunitaire. En outre (bien que cela ne soit pas encore le cas pour les vaccins anti-Covid) les vaccins à ADN/ARN, une fois qu’ils sauront disponible sous forme de poudre, n’auront plus besoin de la chaîne du froid pour être conservés, ce qui facilitera énormément leur disponibilité dans les pays en voie de développement.

    Encore plus que les vaccins classiques, les vaccins à ADN/ARN sont devenus la cible des théoriciens du complot. Une certaine « divinisation » d’une nature idéale fantasmée fait en sorte que très souvent, lorsqu’on entend parler de génétique, on pense immédiatement aux « bébés éprouvettes » et autres monstres de Frankenstein résultant d’office de l’ingérence humaine dans la mécanique infiniment petite du vivant.

    Comme toujours, une technologie, en soi, n’est ni bonne ni mauvaise, tout dépendra du degré de culture et de civilisation de ceux qui s’en serviront. La question éthique se pose une fois de plus avec force depuis 2012, lorsqu’une technique du nom barbare de « Crispr-Cas9 » est venue révolutionner « l’édition génétique ». Désormais utilisé dans des milliers de laboratoires de recherche, cet outil permet de modifier précisément, rapidement et à moindre coût une partie du génome, comme on corrigerait une faute de frappe dans un texte. Si cela sert déjà, par exemple, pour éliminer un gène muté porteur d’une maladie ou rendre une plante plus résistante, cet outil, qui comporte des risques qu’on commence à maîtriser, n’a fait qu’ouvrir un vaste chantier de recherche. Il est évident que toute modification du génome humain se transmettrait de génération en génération.

    Soulignons que ce n’est pas le cas des vaccins à ADN/ARN, qui n’apportent qu’un ajout temporaire dans un petit nombre de cellules et ne modifient donc pas du tout l’ADN de la personne. Les vaccins à ADN n’entrent tout simplement pas dans le génome, ils imitent simplement ce qui se passe lorsque nous sommes infectés par un virus. Le virus insère son ADN dans nos cellules pour lui permettre de se répliquer et de se propager. Et le vaccin doit le faire aussi, mais de manière contrôlée.

Procédures de validation

Avant qu’un vaccin puisse réellement être administré au plus grand nombre, une fois inventé, il doit d’abord passer par une série de phases de développement et de validations qui peuvent prendre plusieurs années :

  1. Lors des essais précliniques, les scientifiques inoculent le vaccin à des animaux tels que des souris ou des singes pour voir s’il provoque une réponse immunitaire ;
  2. Lors d’un essai dit essai clinique de sécurité (Phase I), on étudie les réactions d’un très petit nombre de volontaires en bonne santé recevant le vaccin. Les médecins surveillent tout effet secondaire. Si aucune réaction grave ne se produit, le vaccin passe à l’étape suivante.
  3. Dans un essai clinique élargi (Phase II), un plus grand nombre de sujets, généralement plusieurs centaines, jeunes et vieux, reçoivent le vaccin. Parallèlement, un nombre identique de sujets, appelé « groupe témoin », participe à l’étude en recevant un placebo et non le vaccin. Les deux groupes sont exposés au même niveau de risque de contracter la maladie cible. Les chercheurs observent les vaccinés pendant deux ans ou plus pour voir s’ils contractent la maladie à un taux inférieur à celui du groupe de contrôle. Les chercheurs surveillent également la réponse immunitaire en mesurant les niveaux d’anticorps dans le sang des participants.
  4. Pour un essai clinique d’efficacité (Phase III), un nombre conséquent de sujets, souvent des milliers, exposés à des contaminations, reçoivent le vaccin et sont suivis comme décrit dans la phase 2, pendant trois à cinq ans. La phase 3 comprend également un groupe de contrôle. Les scientifiques attendent de voir combien d’entre eux développent la maladie, par rapport aux volontaires qui ont reçu un placebo.
  5. Enfin, l’approbation réglementaire. Les régulateurs nationaux de chaque pays, en coopération avec d’autres pays et l’OMS ou de façon indépendante, examinent les résultats des essais et décident d’approuver ou non un candidat vaccin.

Covid-19 : un vaccin sera-t-il possible ?

Albert Gonzalez Farran/UNAMID, CC BY-NC-ND 2.0

Depuis que la Chine a partagé le séquençage du génome du nouveau coronavirus, il y a environ six mois, une course est engagée pour trouver un vaccin. Divers sites font le point quotidiennement sur les derniers développements.

Début juillet, selon le site web de l’Alliance mondiale pour la vaccination et l’immunisation (GAVI), sur les 155 vaccins candidats sur lesquels les chercheurs travaillent, 23 avaient entamé les premiers essais cliniques sur l’homme, dont plusieurs en Phase II, et deux en Phase III (Chine et Royaume-Uni).

Pour sa part, début août, l’OMS annonçait que 28 candidats-vaccins sont au stade des essais cliniques (testés chez l’être humain) à travers le monde et 140 au stade de l’évaluation préclinique. Parmi les 28, 6 avaient atteint fin juillet la phase III de leur développement.

Cependant, la question de savoir si un vaccin pour se protéger contre le Covid-19 pourra voir le jour reste entièrement ouverte.

Le 3 août, le directeur général de l’OMS, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, a averti qu’il n’y aurait peut-être jamais de « solution miracle » sous la forme d’un vaccin :

https://www.leparisien.fr/societe/covid-19-peut-etre-jamais-de-solution-miracle-avertit-l-oms-03-08-2020-8362959.php

Nous en apprenons tous les jours sur ce virus, et je suis heureux que le monde ait progressé dans l’identification de traitements pouvant aider les personnes atteintes des formes les plus graves de Covid-19 à se rétablir. (…) Un certain nombre de vaccins sont actuellement en phase III des essais cliniques, et nous espérons tous disposer d’un certain nombre de vaccins efficaces qui peuvent aider à prévenir l’infection, a-t-il poursuivi. Cependant, il n’y a pas de solution miracle pour le moment, et il se pourrait qu’il n’y en ait jamais.

 

Au lieu de cela, a-t-il souligné, la pandémie devra être gérée par « les bases de la santé publique et du contrôle des maladies. » Tranchant avec l’interminable débat sur les masques, ces bases de la santé publique, dont on parle beaucoup moins, sont avant tout : tester, isoler et traiter autant que possible.

Plusieurs indices conduisent les scientifiques à rester sceptiques sur l’invention rapide d’un vaccin. Bien que plusieurs scientifiques et laboratoires, dont l’Institut Pasteur, aient observé l’apparition de puissants anticorps chez l’homme au cours des premiers essais cliniques, de nouvelles études, qui restent à confirmer, tendent à indiquer qu’ils seraient en nombre insuffisant et que leur durée de vie pourrait être inférieure à quelques mois. Dans ce cas, il serait beaucoup plus compliqué pour un vaccin de protéger la population. Plusieurs injections de vaccin, à intervalles réguliers, pourraient donc être nécessaires. Les scientifiques espèrent qu’un vaccin réduirait au moins un peu la létalité globale du virus, sans qu’il puisse pour autant en réduire la propagation.

D’ailleurs, selon certains rapports, le vaccin candidat de l’université d’Oxford, dont on entend beaucoup parler, n’empêche pas les singes à qui on a injecté le candidat vaccin, de contracter le virus, mais semble prévenir la pneumonie, cause majeure de décès chez les patients. Ainsi, si l’on ne progresse pas plus vite, on pourra se retrouver avec un vaccin, ou plusieurs vaccins, qui ne seront que très partiellement efficaces.

Le 22 mai, le quotidien anglais The Guardian, dans un article intitulé Pourquoi on n’aurait peut-être jamais de vaccin, citait le médecin britannique Jonathan Van-Tam, selon lequel personne ne veut entendre une vérité qui dérange, celle qui nous dit que « nous ne pouvons pas être sûrs d’obtenir un vaccin ».

Pour sa part, John Rountree, associé gérant de Novasecta, a déclaré à CNBC que « nous sommes loin » d’avoir un vaccin efficace. Comparant le paysage du développement des vaccins à la course à l’espace du XXe siècle, M. Rountree avertit que de gros investissements gouvernementaux n’ouvriraient pas miraculeusement la voie à un vaccin efficace. « Les politiciens peuvent fixer des délais très serrés, ce qui se prête à l’envoi d’un homme sur la Lune », a-t-il déclaré. Mais « en fin de compte, il s’agit de biologie, ce qui est un problème bien plus difficile que le défi technique que représente l’envoi d’un homme sur la Lune. Et la biologie ne suit pas de calendrier ».

D’autres scientifiques soulignent que plus de 30 ans après que les scientifiques ont isolé le VIH, le virus responsable du sida, nous n’avons toujours aucun vaccin. Le virus de la dengue a été identifié en 1943, mais le premier vaccin n’a été approuvé que l’année dernière, avec des résultats mitigés. Le vaccin mis au point le plus rapidement est celui contre les oreillons. Il a fallu quatre ans…

Des scientifiques ont déjà travaillé sur des vaccins contre les coronavirus, ils ne partent donc pas de zéro. Deux coronavirus ont déjà provoqué des épidémies mortelles, à savoir le SARS et le MERS, et la recherche sur les vaccins a progressé pour les deux. Mais aucun n’a été homologué, en partie parce que le SARS a fait long feu et que le MERS est un virus régional du Moyen-Orient. Les découvertes faites dans le cadre de ces efforts serviront pour aujourd’hui, mais il reste encore beaucoup à apprendre sur le virus.

La première des principales préoccupations est que les coronavirus ne tendent pas à déclencher une immunité de longue durée. C’est ce que soulignait le Pr Didier Raoult dès le début de la pandémie. Environ un quart des rhumes courants sont causés par des coronavirus humains, mais la réponse immunitaire s’estompe si rapidement que les gens peuvent être réinfectés l’année suivante.

Des chercheurs de l’université d’Oxford ont récemment analysé le sang de patients ayant le Covid-19 et ont constaté que le niveau d’anticorps avait fortement augmenté au cours du premier mois d’infection, avant de recommencer à baisser. À la mi-mai, des scientifiques de l’université Rockefeller de New York ont également découvert que la plupart des personnes qui s’étaient remises de Covid-19 sans avoir été hospitalisées produisaient peu d’anticorps contre le virus.

« C’est ce qui est particulièrement difficile », déclare Stanley Perlman, chercheur émérite sur les coronavirus à l’université de l’Iowa. « Si l’infection naturelle ne vous donne pas autant d’immunité, sauf lorsqu’il s’agit d’une infection grave, que fera le vaccin ? Il pourrait être meilleur, mais nous ne le savons pas. » Si le vaccin ne protège que pendant un an, le virus risque d’être avec nous pendant pas mal de temps...

La stabilité génétique du virus est également importante. Certains virus, comme celui de la grippe, mutent si rapidement que les concepteurs de vaccins doivent mettre au point de nouvelles formulations chaque année. L’évolution rapide du VIH est l’une des principales raisons pour lesquelles nous n’avons pas de vaccin contre la maladie.

« Si nous sommes obligés de choisir un vaccin qui ne donne qu’un an de protection, alors nous sommes condamnés à voir le Covid-19 devenir endémique, une infection qui est toujours présente », affirme Larry Brilliant, PDG de Pandefense Advisory, qui a travaillé sur le programme d’éradication de la variole de l’OMS.

L’une des propositions de GAVI, l’Alliance pour les vaccins, est d’en renforcer la disponibilité dans le monde entier grâce à un « engagement de marché anticipé ». Et M. Brilliant pense qu’un accord mondial entre les gouvernements doit être conclu dès maintenant. « Nous devrions exiger, dès maintenant, une conférence mondiale sur ce que nous allons faire lorsque nous aurons un vaccin, ou si nous n’en avons pas », dit-il.

La deuxième préoccupation vient du fait que plusieurs vaccins candidats, développés aussi bien aux Etats-Unis qu’en Europe ou en Chine, sont des vaccins à ADN/ARN, une approche vaccinale qui jusqu’ici, par principe de précaution, n’a jamais été validée pour les humains.

Enfin, le fait que les fabricants de vaccins lancent dès maintenant la production massive de vaccins dont ni l’efficacité ni l’innocuité n’ont été démontrées, le tout pour gagner du temps et surtout pour être en avance sur leurs concurrents, comporte bien des risques. Bien entendu, aveuglés par les vastes gains financiers ou un prestige sur la scène internationale, pour eux la tentation est forte de manipuler les faits et les chiffres.

Seul un nouvel esprit de collaboration entre les gouvernements responsables peut prévenir les abus potentiels et créer les conditions adéquates pour rendre traitements et vaccins disponibles pour tous à des prix raisonnables, y compris pour les plus pauvres.

Où en sommes-nous ?

A cette question posée par le site Medical Press le 14 juillet, Rick Malley, médecin en chef de la division des maladies infectieuses de l’hôpital pour enfants de Boston, répond :

« Nous avons la chance d’avoir une longueur d’avance pour le Covid-19. A peine quelques semaines après son apparition en Chine, le génome du virus SRAS-CoV-2 a été séquencé et l’information rendue publique au monde entier. Grâce aux recherches antérieures sur le SRAS, nous connaissons sa protéine SPIKE et le récepteur qu’elle cible dans le corps humain.

« Cela a permis à de nombreuses équipes de concevoir des vaccins et de les tester très tôt sur des animaux. Les scientifiques ont multiplié les approches, notamment des vaccins à base de virus vivants atténués, des virus inactivés, des fragments de protéines CoV-2 du SRAS (en particulier la protéine SPIKE), et de l’ADN ou de l’ARN pour ces protéines. Les approches du vaccin à ADN/ARN sont les plus avancées car elles peuvent être produites rapidement et rencontrent moins d’obstacles réglementaires avant de pouvoir être testées chez l’homme. Aucun vaccin basé sur l’une ou l’autre de ces plateformes n’a encore été homologué pour l’usage humain, mais plusieurs sont en cours d’essais cliniques pour d’autres maladies.

« Au moins trois vaccins sont en train de passer rapidement au stade des essais cliniques, avec des preuves qu’ils stimulent le système immunitaire à combattre le virus. L’un d’eux, décrit dans The Lancet, de CanSino Biologics en Chine, utilise un adénovirus génétiquement modifié pour délivrer l’ADN qui code la protéine de pointe du SRAS-CoV-2 dans les cellules humaines. Un autre, de Moderna (Cambridge, MA), contourne l’étape de l’ADN et délivre de l’ARN messager que les cellules peuvent directement lire pour fabriquer la protéine de pointe. Un troisième vaccin, développé par l’université d’Oxford en collaboration avec AstraZeneca, utilise un vecteur adénoviral différent, et est actuellement en phase 2/3 d’essais cliniques.

« Bien qu’il soit urgent de trouver un moyen de sortir de cette pandémie, les considérations de sécurité doivent rester une priorité absolue. Comme pour la plupart des vaccins, un vaccin Covid-19 serait administré à des personnes pour la plupart en bonne santé, dont le risque de complications graves dues au virus n’est pas très élevé. Par conséquent, les effets secondaires graves du vaccin lui-même doivent être d’une très grande rareté pour que le vaccin soit acceptable pour la majorité de la population.

« Et l’acceptation générale d’un vaccin Covid-19 n’est pas une évidence : une étude et des sondages récents suggèrent qu’entre un quart et la moitié de la population américaine ne serait pas prête à le recevoir. Certaines personnes peuvent légitimement craindre que si un vaccin est développé trop rapidement, on n’aura pas le temps de le tester correctement. Se tromper sur la sécurité d’un vaccin Covid-19 pourrait nous faire reculer de plusieurs années, voire plusieurs décennies. »

Une lumière au bout du tunnel

Dans une série d’études publiées en fin de semaine dernière et expliquées dans un long article du New York Times publié dimanche 16 août, il apparaît que les anticorps des personnes contaminées, associés à leurs lymphocytes B et T, produiraient une réponse immunitaire globale capable de reconnaître et de maintenir à distance le SARS-CoV-2 pendant au moins plusieurs mois, voire plusieurs années.

Impliquant une autre partie de notre système immunitaire, l’organisme des personnes qui ont rencontré le coronavirus semble prendre le soin de conserver tout un bataillon de lymphocytes B dédiés spécifiquement au SARS-CoV-2 et qui, eux, ont une durée de vie bien plus longue.

Ce n’est qu’une fois ces études confirmées que la possibilité de créer un vaccin efficace deviendra une réalité.


[1La vérité sur les vaccins, Editions Michel Lafon, 2018. Le professeur, pour qui le rapport bénéfice/risque reste la meilleure boussole, estime que « Personne ne peut raisonnablement douter des vertus de la vaccination ». Il y dénonce une politique de vaccination massive et indifférenciée. Ce qui compte, pour lui, c’est de savoir vacciner à bon escient, c’est-à-dire de traiter la bonne personne, au bon moment, au bon endroit avec le vaccin qui convient. Pour cela, il compte plus sur les médecins que sur l’Etat.