Sans Glass-Steagall, le mal repoussera comme une mauvaises herbe

mercredi 19 juillet 2017

A l’heure où des nouvelles bulles spéculatives menacent de déclencher un krach systémique sans précédent, les empires financiers opérant à partir de Wall Street et de la City font tout leur possible pour semer la division et la guerre.

La réorientation de politique internationale amorcé par Trump et Macron, en direction d’une détente et d’une coopération avec la Russie et la Chine, représente une première salve contre l’ordre unipolaire actuel. Cependant, tant que Trump et Macron ne prendront pas de mesures claires pour libérer nos pays de l’emprise de cette finance folle, par la séparation des banques de dépôts et des banques d’affaires, ils seront incapables de rétablir à l’intérieur une situation stable et prospère sans laquelle la détente initiée au niveau international ne pourra être durable.

Trump avait évoqué lors de sa campagne qu’il examinera le besoin d’un « Glass-Steagall du XXIe siècle » et il en a reparlé il y a deux mois. Depuis, hélas, rien n’a été fait. Il s’est enflammé également pour son plan de reconstruction des infrastructures américaines, faisant des discours inspirés sur les grandes époques des bâtisseurs, de Hamilton à Lincoln : dans ce domaine aussi rien n’a réellement été lancé. En faisant la paix, y compris avec les intérêts de Wall Street, il se réduit à une approche managériale, comme le fait Macron (qui lui n’a rien promis contre la finance spéculative), vouée à l’échec.

Les néo-conservateurs toujours à l’offensive

Dans un contexte de regain de tension entre la Russie et les États-Unis autour des diplomates expulsés par Obama en décembre, les néo-conservateurs lancent aux États-Unis une nouvelle organisation, « Alliance for Securing Democracy », se voulant « bipartisane et transatlantique », avec pour objectif de réhabiliter les amoureux de la guerre ayant servi sous les administrations Bush et Obama. On y retrouve ainsi la Démocrate Laura Rosenberger, ancienne conseillère en politique étrangère d’Hillary Clinton, et le Républicain Jamie Fly, proche de Bill Kristol du Project for a New American Century (centre idéologique des néo-conservateurs depuis les années 90), avec qui il a co-publié un appel à bombarder l’Iran en 2012. Le plan de mission dévoilé lors du lancement de cette Alliance annonce la couleur : « Comprendre les événements survenus aux États-Unis en 2016 et leurs conséquences. Mais cela ne suffit pas... la Russie continue ses efforts à travers l’Europe, et nous devons également préparer les dirigeants là-bas à répliquer aux tactiques de Poutine... »

Par ailleurs, le Center for Strategic and International Studies (CSIS) a tenu à Washington sa conférence annuelle sur la mer de Chine méridionale, avec l’intention évidente de forcer l’administration Trump à adopter une posture guerrière en Asie Pacifique, vis-à-vis de la Chine. L’ancien conseiller du vice-président Joe Biden, Ely Ratner, a ainsi déclaré : « Le but est de stopper la tentative de prise de contrôle de la Chine dans cette région. Ce débat malvenu sur le ’piège de Thucydide’ [l’un des arguments de ceux qui prônent l’appaisement avec la Chine et la Russie] donne à la Chine le sentiment qu’elle peut agir en toute impunité. (…) Nous devons stopper cet élan chinois. (…) Nous devons user des moyens de dissuasion, car la coopération ne fonctionne pas... Nous devons prendre des risques, car il n’y a pas de dissuasion sans prise de risques... Les dommages infligés à la Chine pour sa présence en mer de Chine méridionale ne sont pas suffisant. Si la Chine persiste dans son intention de militariser la mer de Chine, alors nous la militariserons dans nos propres termes. »

L’intervention hystérique de Ratner a été contrebalancée par celle de notre collègue Bill Jones, représentant le magazine EIR (fondé par l’économiste américain Lyndon LaRouche), qui a montré qu’une telle posture belligérante ne résoudrait jamais rien, qu’elle ne pouvait que créer davantage de nervosité, y compris parmi les alliés asiatiques des États-Unis comme le Japon, qui envisage de plus en plus de coopérer avec la Chine dans les Nouvelles Routes de la soie (NRS). Bill Jones a expliqué que la vraie raison de cette paranoïa sur la Chine est justement l’influence grandissante de la Chine dans le monde, à travers ce projet des NRS, le plus grand programme d’ingénierie jamais lancé dans l’histoire. De nombreux participants sont ensuite venu remercier Bill Jones pour son intervention, ce qui remarquablement inhabituel dans ce genre de milieu.

Notre mobilisation est cruciale

Le cessez-le-feu en Syrie convenu le 7 juillet entre Poutine et Trump est en vigueur depuis 10 jours et a créé les conditions dans lesquelles la fin de la guerre et la reconstruction de la Syrie est possible. L’ancien diplomate canadien Patrick Armstrong, a estimé auprès de Sputnik que les déclarations de Macron lors de sa rencontre avec Trump à Paris donnaient le signal d’un changement décisif dans la politique occidentale vis-à-vis de la Syrie : « Paris était jusqu’à maintenant l’un des centres appelant au départ de Bashar. Mais Macron semble avoir rejeté cette idée. » Le fait que le président français ait appelé à ce que le P5 (les cinq membres du Conseil de sécurité de l’ONU) joue un rôle dans le processus de paix pour la Syrie est également un tournant dans la politique occidentale. « Le consensus occidental était que la question syrienne devait être résolu de l’extérieur, c’est-à-dire par les puissances occidentales, sans la Russie, ni la Chine, et certainement pas avec le gouvernement syrien. »

Ces changements très positifs doivent absolument être consolidés par une réorganisation du système financier et monétaire, à commencer par le Glass-Steagall. D’ailleurs, si on veut pouvoir traiter d’égal à égal avec les Chinois dans le cadre des NRS, il nous faut commencer par se libérer de cette occupation financière et se doter des outils – banque nationale, crédit public – nous permettant d’investir dans de tels projets. La mobilisation citoyenne que nous avons lancé cet été pour forcer au Parlement le débat sur notre projet de loi de « moralisation de la vie bancaire » va droit au cœur de cette question, et va prendre à parti nos députés sur la contradiction de Macron entre sa politique extérieure et sa politique intérieure.

COMMENTAIRES

pastor mercedes - le 19 juillet 2017

Vous êtes toujours FORMIDABLES, et Vos articles Super Intéressants et nécessaires. Merci.