Des êtres humains acculés, soumis à la faim, à la soif et aux épidémies, quotidiennement bombardés sans épargner femmes ni enfants, leurs hôpitaux et leurs biens culturels détruits, humanitaires et journalistes assassinés. Cela s’appelle un ghetto soumis à un génocide. Ne pas le reconnaître, ne rien faire pour l’arrêter et en traiter les causes, c’est perdre une part d’humanité. Dans le monde et au sein de nous-mêmes.
Notre président de la République, tout en reconnaissant maintenant que ce que font l’armée et le gouvernement israélien est honteux, laisse aux historiens la responsabilité de l’appeler par son nom. Aujourd’hui, un ministre israélien a déclaré que tout Gaza est un centre de terrorisme et doit donc être effacé de la terre. Les autres procèdent au nettoyage ethnique.
Chaque jour, on se demande ce qui peut arriver de pire. L’armée israélienne découpe Gaza en trois zones, en contrôlant le déplacement des habitants. Le massacre continue partout. Depuis le 2 mars, ce que certains appellent l’État hébreu et d’autres l’entité sioniste, avait bloqué toute entrée d’aide humanitaire dans l’enclave palestinienne. Aujourd’hui, le gouvernement israélien organise un goutte à goutte, véritable torture par l’espérance, en laissant passer quelques camions de nourriture pour bébé et, suivant un accord avec les Emirats arabes unis, un « soutien » qui répondrait aux besoins d’environ 15 000 personnes, moins de 1 % des survivants. Il est prévu que des agences, constituées pour l’occasion et sous contrôle du gouvernement israélien, fassent parvenir un peu plus d’aide, juste assez pour organiser le mouroir. « Ce plan est une manière d’instrumentaliser l’aide, en la transformant en outil au service des objectifs militaires des forces israéliennes », nous dit Pascal Croissard, coordinateur des urgences MSF à Khan Younis.
Nous en sommes là. Ne pas agir revient à collaborer. Emmanuel Macron, Keir Starmer et le canado-britannique Mark Carney assurent qu’ils prendront des mesures concrètes si Israël poursuit son offensive à Gaza, un génocide avec des « si ». La Commission européenne demande à vérifier si Israël respecte les obligations de son accord d’association. « S’il est établi qu’une violation est manifeste, c’est effectivement la possibilité d’une suspension éventuelle », se contorsionne Jean-Noël Barrot. Trump, lui, visite les trois monarchies pétrolières pour y « faire affaire ».
Pour rester vivants.
Face à cette abomination, qui s’étend jusqu’en Cisjordanie, nous devons non seulement exprimer une sainte colère pour rester vivants, mais saisir toute occasion d’arrêter la tragédie. Si Trump veut réellement « lâcher » Netanyahou, il ne doit plus lui fournir d’armes. La France, elle, doit dire haut et fort que le gouvernement israélien trahit les principes du judaïsme. C’est ce qu’ont fait, à leur façon, Delphine Horvilleur, Johann Sfar, Anne Sinclair et Alain Finkielkraut chez nous, et surtout ceux qui manifestent courageusement à Tel Aviv avec les portraits des enfants palestiniens assassinés. Trop tard ? Je ne suis pas pour rejeter les ouvriers de la onzième heure. J’espère aussi que les peuples d’Asie du Sud-Ouest (je déteste la péjorative « rue arabe ») manifesteront davantage pour défendre la justice. Une proposition immédiate : arrêter toute livraison d’armes et manne de dollars à Israël, et confier la gestion de l’aide humanitaire à l’Autorité palestinienne. Bien entendu, la reconnaissance de l’État palestinien à la Conférence de New York, qui se tiendra finalement du 17 au 20 juin, doit être le signe que la France s’efforce encore d’exister.
Il faut en même temps traiter les causes : les conditions d’un plan de développement mutuel, basé sur la mise en œuvre d’une politique de l’eau et de l’électricité au bénéfice de tous. C’est le Plan Oasis de l’Institut Schiller. Nous nous battons pour qu’il soit mis à l’ordre du jour pour fonder la paix.
A plus long terme, la forme juridique que prendra la vie en commun des citoyens de tous les peuples de la région dépendra de leur libre choix et non des impérialismes extérieurs qui, depuis longtemps, y sévissent en divisant pour régner.


