Les hésitations de Donald Trump concernant la possible implication des États-Unis dans ce conflit qui pourrait rapidement dégénérer en guerre mondiale, montrent que le président américain est soumis à des pressions internes contradictoires, dans lesquelles Londres joue le rôle d’instigateur, comme pour l’Ukraine, dans le sens de l’escalade.
Le comportement ambigu de Trump
Selon certaines informations, le Premier ministre israélien Netanyahu réclame l’implication directe des États-Unis, car selon lui, seule la puissance de feu américaine permettra de détruire les installations souterraines d’enrichissement nucléaire iraniennes. Malgré les affirmations de l’administration Trump selon lesquelles les premières attaques israéliennes ont été menées sans l’aval des États-Unis, le ministre iranien des Affaires étrangères insiste sur le fait que les États-Unis étaient effectivement impliqués – au minimum en acceptant l’attaque et en fournissant des armes à Israël – et a appelé Washington à condamner publiquement les frappes israéliennes.
Dans une interview accordée à ABC le dimanche 15 juin, Trump a déclaré que les États-Unis n’étaient pas impliqués dans la guerre d’Israël contre l’Iran, mais a admis qu’ils « pourraient s’impliquer ». Par ailleurs, il s’est dit ouvert à ce que Vladimir Poutine joue le rôle de médiateur dans le conflit.
Le président américain se présente en négociateur prêt à assurer la paix et propose le commerce avec les États-Unis comme un facteur clé pour y parvenir (ce qui paraît bien dérisoire dans le contexte du conflit actuel), tout en exigeant de l’Iran qu’il cesse tout enrichissement d’uranium – exigence déclarée inacceptable par Téhéran – alors que ses conditions ne portaient jusqu’alors que sur la production d’armes nucléaires – ce que Téhéran avait accepté.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que ces contradictions entre les propositions diplomatiques et les avertissements belliqueux de la présidence américaine ne reflètent pas une stratégie cohérente.
La main britannique
Il faut dire que les réseaux britanniques sont pleinement mobilisés, depuis le début du second mandant de Trump, pour entraîner les États-Unis dans une nouvelle guerre au Moyen-Orient. Dans notre chronique du 3 avril, intitulée « Londres attire Trump dans le piège iranien », nous mettions en évidence l’implication de Sir Richard Dearlove, l’ancien chef du MI6, qui appelait de ses vœux une opération israélo-américaine visant à renverser le gouvernement iranien et à bombarder ses installations nucléaires.
En 2003, Dearlove avait été au cœur de la fabrication du dossier de renseignement mensonger qui avait permis de justifier la guerre meurtrière en Irak. En 2016, il a également joué un rôle central dans l’affaire du « Russiagate », montée de toutes pièces dans le but de couler ou de prendre le contrôle de la première administration de Donald Trump.
S’exprimant le 15 juin sur la radio britanniqueGB News, Dearlove a insisté sur le fait que l’Occident doit soutenir la guerre d’Israël contre l’Iran, dont le « but ultime », a-t-il déclaré sans détour, est un changement de régime : « Soyons francs, la disparition du régime iranien serait fortement dans notre intérêt national. »
Le même jour, sur la radio LBC, il a prédit une victoire militaire israélienne à terme, qualifiant le changement de régime d’« issue possible et crédible ». Il a affirmé que, bien qu’étant loin d’être un ami du président américain, même si ce dernier semble indécis, il a clairement exprimé son soutien à Israël, et que si des mandataires iraniens attaquent une base américaine, les Israéliens se réjouiront de l’intervention américaine.
Dans quelle mesure Sir Richard Dearlove est-il réellement impliqué dans la préparation de cette guerre et dans le piège tendu aux États-Unis ? Comme nous le rapportions le 4 avril, dans une interview accordée le 21 mars au Jewish Chronicle britannique, il avait fait allusion à son propre rôle dans l’orientation des opérations israéliennes. « L’alliance iranienne visant à déstabiliser le Moyen-Orient et à s’étendre à des zones plus éloignées a été très, très sérieusement perturbée et démantelée », avait-il affirmé, qualifiant l’opération israélienne des bippeurs piégés contre les dirigeants du Hezbollah de « réalisation remarquable et très intelligemment conçue ».
Le Jewish Chronicle ajoutait : « Dearlove a également révélé que, peu après avoir pris sa retraite du MI6, il avait été invité en Israël dans le cadre de discussions sur la sécurité, suite à la guerre du Liban de 2006. Il a insisté, le sourire aux lèvres, sur le fait qu’il ne pouvait ‘pas entrer dans les détails’ des raisons de sa présence, mais a affirmé que les Israéliens avaient ‘vraiment pris leurs responsabilités’ après cette guerre pour faire face à la menace posée par le Hezbollah. »
Lors de son interview du 15 juin à LBC, Dearlove a fait deux autres déclarations révélatrices. Premièrement, en évoquant les raisons pour lesquelles il pense qu’Israël sortira victorieux de ses multiples conflits, il a cité le succès peu médiatisé de l’État hébreu dans la « destruction » des capacités militaires syriennes, faisant allusion au démantèlement des forces armées syriennes par le nouveau régime. Ce succès, combiné à l’opération des bippeurs piégés contre le Hezbollah, à l’« élimination du Hamas » par Israël à Gaza, et maintenant à cette « remarquable démonstration de puissance militaire et d’opérations de renseignement » contre l’Iran, justifie sa confiance.
Deuxièmement, interpellé par l’animateur suite aux nombreux commentaires de Britanniques en colère inondant le studio à propos de son rôle dans le désastre criminel du changement de régime en Irak, Dearlove a déclaré sans vergogne que l’opération en Irak, avec ses millions de morts et la déstabilisation de l’Asie du Sud-Ouest, était nécessaire. Il n’a pas précisé pour qui…