
Les lois de l’univers finissent toujours par corriger ceux qui croient pouvoir les violer. Ainsi, ce qui devait arriver aux banques, arrive.
Refusant hystériquement d’acter (avec une réforme type Glass-Steagall) la faillite systémique des méga-spéculateurs, aux commandes du système financier mondial depuis 1986, nos élites les ont renflouées sans limites, d’abord en pillant l’argent et les budgets des États, ensuite en créant des océans de capital fictif, l’ensemble versé dans un trou sans fond, véritable tonneau des Danaïdes.
Ainsi, la course à la dette et aux sacrifices pour les honorer, ne sert plus l’économie réelle et l’humanité qui en dépend, mais une fiction monétaire et une caste de parasites financiers. Et aujourd’hui, c’est la panique.
En témoigne la faillite fin 2015 de quatre banques régionales en Italie qui a brutalement démontré que l’Union bancaire (supposé nous protéger d’un « nouveau Lehman Brothers »), avant même sa mise en œuvre, est un mécanisme non seulement moralement inique mais largement inopérant.
Le MRU
C’est également de constat de La Tribune (27 décembre), pour qui « le nouveau mécanisme de sauvetage des banques pose question ».

Pour l’instant, en ce qui concerne l’Union bancaire :
- Le premier pilier, le Mécanisme de supervision unique (MSU), piloté par la BCE, est déjà opérationnel ;
- Le deuxième pilier, celui du Mécanisme de résolution unique de crises bancaires (MRU), est entré en application dès le 1 janvier 2016 dans les pays membres de la zone euro ;
- Le troisième pilier, celui du Fonds européen de garantie des dépôts bancaires (FEGD), n’en est qu’au stade de projet.
Pour rappel, le MRU repose sur le principe du « renflouement interne » (bail-in), par opposition au « renflouement externe » (bail-out) en vigueur durant la crise de 2008, qui faisait appel à l’argent public.
Concrètement, avec le MRU, une banque européenne au bord de la faillite, devra d’abord faire appel à ses actionnaires pour essayer de survivre, ainsi qu’à ses créanciers obligataires et à ses déposants détenant plus de 100 000 euros dans ses livres, avant de se tourner éventuellement vers le fonds de résolution unique (FRU), abondé par le secteur bancaire européen.
Le bail-in en Italie
Parfait sur le papier, cette construction a lamentablement échoué en Italie. En premier lieu, le gouvernement italien, au lieu d’acter la faillite des quatre banques régionales, les a mises sous perfusion et les grandes banques italiennes ont été contraintes de prêter 3,6 milliards d’euros pour sauver les petites.
Au même temps, l’État italien est tombé sur leurs actionnaires et détenteurs d’obligations. Or, comme le précise La Tribune, on découvre que parmi ces créanciers obligataires ne figurent « pas que des millionnaires » mais aussi des milliers de petits épargnants, « comme Luigi d’Angelo, ce retraité italien retrouvé pendu chez lui le 28 novembre, après avoir vu ses économies englouties à hauteur de 110 000 euros dans le sauvetage express des banques italiennes régionales ».
En suivant à moitié les consignes du MRU, le gouvernement italien a « rincé » 133 000 actionnaires et 10 500 porteurs d’obligations subordonnées, « pour beaucoup des petits épargnants qui sont, au passage, des contribuables… » L’affaire a provoqué un tel tollé, que le gouvernement italien a dû créer un fonds de solidarité de 100 millions d’euros par calmer les victimes, une action immédiatement condamnée par Bruxelles pour qui il est hors question de mobiliser de l’argent public dans ce but. Pour la Commission européenne, ce ne sont pas les directeurs d’agences qui ont pigeonné leurs clients, mais c’est la simple méconnaissance des produits financiers qui a conduit les retraités italiens à leur malchance ! Fatalità !
L’échec
Pour le quotidien allemand Handelsblatt du 28 décembre, les déboires italiens et d’autres pays du sud de l’Europe,
ont fait émerger une vérité déplaisante aux yeux des dirigeants et ministres des Finances de la zone euro : l’Union monétaire n’a pas pleinement réhabilité son secteur financier, en dépit du fait que la crise a commencé il y a huit ans et que des nouvelles mesures ont été mises en place.
« Les dangers ne se cantonnent pas à l’Europe du Sud », poursuit le journal. « Le secteur bancaire allemand travaille également avec de nombreuses petites banques [allemandes] qui dépendent de clients qui se battent comme des beaux diables pour faire du profit à un moment où les taux ont atteint un bas historique. Rien qu’en 2015, les banques allemandes, pour réduire leurs coûts de fonctionnement, ont fermé 1000 agences… »
Il est vrai qu’avec l’intensification des usages numériques, et notamment sur mobile, la fréquentation des agences baisse inexorablement. En France, la Société générale fermera 20 % de son réseau d’ici à 2020.
D’après l’Autorité bancaire européenne (EBA), les banques européennes pourraient ramener le pourcentage de prêts irrécouvrables de 7 à 6,4 % avant janvier 2016. Sur le papier, cette proportion est déjà deux fois plus élevée qu’aux États-Unis. Cependant, ce chiffre n’est qu’une moyenne, et la réalité de certains pays est nettement pire.
La dette italienne
D’après le FMI, en Italie, les crédits à risques représentent 18 % du total et rien que les quatre banques régionales qui ont sombré, avaient 10 milliards d’euros de dettes irrécouvrables. L’Italie n’a pas les moyens de faire face à une grave crise bancaire. La dette publique y dépasse les 2200 milliards d’euros, soit 133 % du PIB, plus que le double des 60 % stipulés par les critères de convergence du Traité de Maastricht. On estime à 200 à 300 milliards d’euros la dette non-performante italienne.

En plus, d’après un expert consulté par Handelsblatt, 30 % du montant des créances des PME ne seront pas honorés. Cependant, ce qui inquiète le plus, c’est la forte proportion d’obligations d’État qui figure dans le bilan des banques italiennes. Si leur valeur chute, les banques italiennes piétinent et inversement, si une banque tombe, la dette publique explosera.
La chasse aux « banques zombies »

Selon Handelsblatt, le ministre des Finances allemand Wolfgang Schäuble et son sous-fifre à Bruxelles, le Président de l’Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem, estiment que la coupe est pleine : la zone euro doit liquider au plus vite ses « banques zombies » qu’elles soient italiennes, grecs, portugaises, espagnoles, allemandes ou autres. Le terme « banque zombie » est apparu en 1987 pour désigner des institutions bancaires dont la valeur nette est nulle mais qui survivent uniquement grâce aux perfusions d’aides publics. Pour les grandes banques universelles, qui font leur beurre avec la spéculation, les petites banques de détail sont des entités peu ou pas rentables.
Depuis ce 1er janvier 2016, les Pays-Bas prennent la présidence du Conseil européen des ministres des Finances, et Schäuble et Dijsselbloem, deux fanatiques de l’ordolibéralisme et du déficit zéro, comptent profiter de cette période pour « sauver le système » en purgeant la zone euro des banques zombies.
Car, comme le note Handelsblatt : « Si la zone euro continue à remettre au lendemain les décisions difficiles, cela pourrait devenir cher pour ses citoyens. La promesse que les contribuables ne paieront plus jamais pour les faillites bancaires s’avère sans doute creuse ». Qui paierait ? La réponse est en petites caractères dans les notes de bas de page de la directive européenne : le sauvetage d’une banque avec l’argent des États n’est autorisé que si des troubles graves dans un État membre menaceraient la stabilité des autres membres de la zone euro.
Le problème, pour Schäuble et Dijsselbloem, c’est que dans une Union bancaire pleinement intégrée, ce sont les contribuables des pays riches (Allemagne, Pays-Bas et France), qui paieront pour les autres… « C’est pour cela que nous devons nous débarrasser au plus vite des banques zombies », s’exclame un diplomate européen cité par le journal.
Dans une note au gouvernement allemand, Schäuble rappelle l’urgence de réduire le volume excessif de titres de dette souveraine dans le bilan des banques européennes. En Espagne, les obligations souveraines représentent 43 % du bilan des banques. Si leur valeur chute, les banques tombent. Inversement, si une banque tombe, sa chute contamine les titres souverains.
Une série de mesures qui, sans une réorganisation du type Glass-Steagall, donnera le coup de grâce à de nombreuses banques petites et moyennes en Allemagne et en Europe sans pour autant sauver les grandes.
A force de confiscation de dépôts et des retraits soudain de liquidités qu’ils provoqueront, c’est le système lui-même qui se fait kamikaze.
Que faire ?
En France, S&P tient à la disposition des élus une proposition de loi pour couper les banques en deux (Glass-Steagall Act). En attendant, en faisant voter une résolution par votre conseil municipal, départemental ou régional, vous pouvez contribuer à la faire adopter à temps ! 40 communes l’ont déjà voté (dont 2 communautés de communes), 2 départements et 1 région. Et chez vous ?
# petite souris
• 04/01/2016 - 21:09
les entreprises doivent être des multinationales ou rien
les banques doivent être méga ou rien
monsieur Schäuble, ayez le courage logique et moral de continuer votre raisonnement , alors dites que l’Allemagne n’est plus un pays puisqu’il n’est pas mégasupergrand et démissionnez votre parole n’a donc plus ni de sens ni de valeur !
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