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- A Calais, la statue du Président Charles De Gaulle et son épouse, a été taguée en couleur rouge sang avec l’inscription « Nik la France ».
Le samedi 23 janvier, à Calais, une manifestation en faveur de « meilleures conditions d’accueil pour les réfugiés » s’est terminée avec la prise d’assaut d’un ferry britannique dans le port et le taggage de la statue du Général de Gaulle et son épouse. Alors que les conditions de vie des migrants sont au-delà du précaire, l’organisation informelle à forte dominante britannique « No Borders » a été prise en flagrant délit de fomenter un climat de guerre civile.
Sangatte
Pour comprendre, il faut remonter quelques années en arrière. En 1999, lorsque des réfugiés en provenance du Kosovo et des Balkans s’installent à Sangatte proche de l’entrée du tunnel sous la Manche, le gouvernement français y réquisitionne un hangar de 27 000 m2 et charge la Croix Rouge d’encadrer leur accueil. Rapidement surpeuplé et sujet à de vives tensions, le centre de Sangatte, à la demande des Britanniques, sera fermé en 2002 par le ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy.
Le piège du traité du Touquet
En 2003, lors du 25e sommet franco-britannique, Paris (le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy) et Londres (son homologue David Blunkett), signent le fameux « traité du Touquet » qui créera des bureaux de contrôle d’immigration communs dans les principaux ports maritimes des deux pays (Calais, Boulogne-sur-mer et Dunkerque en France et Douvres du côté britannique).
Seulement, par des accords bilatéraux qui suivent, et en échange d’équipements et d’un financement britannique, la France accepte le rôle de vigile au service de l’Empire britannique ! Ce qui fait dire à certains que la frontière britannique, jadis à Douvres, s’est déplacé en France et se trouve désormais à Calais ! Ces accords ont « conduit à faire de la France le "bras policier" de la politique migratoire britannique », dénonce pour sa part la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH).
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Solidarité & Progrès exige l’annulation immédiate du Traité du Touquet.
Pour sortir par le haut de la crise des réfugiés, voir le programme de Jacques Cheminade : « Immigration et co-développement comme un tout, un pari sur l’avenir ».
La « jungle de Calais »
Dans un premier temps, la fermeture de Sengatte stabilise la situation migratoire. Cependant, ces dernières années, leur nombre a explosé dans toute la région. Aujourd’hui, selon la préfecture, 6000 réfugiés d’Afghanistan, du Darfour, d’Irak, d’Iran, d’Érythrée et de Syrie, survivent dans des campements de fortune autour de la zone portuaire de Calais dans un site surnommé « la jungle de Calais ».
Et chaque nuit quelques centaines tentent (et généralement échouent) de traverser la Manche. Tous espèrent se rendre au Royaume Uni où ils ont parfois de la famille et où aucun papier légal n’empêche leur embauche.
Pour « gérer » ce vaste bidonville où l’eau et les toilettes se font rares et où la gale fait des ravages, le gouvernement français a souvent alterné entre une politique de « pourrissement » permettant par la suite de justifier qu’on rase les campements insalubres, des mesures de sécurité visant à protéger les installations portuaires et des mesures d’accueil plus vivables pour les réfugiés.
Médecins du Monde, Médecins sans frontières, ainsi que plusieurs médecins, psychiatres et dentistes britanniques se sont installés bénévolement dans la jungle pour y apporter des soins. Et lentement, elle se dote de commerces, de bars, de salons de coiffure, de lieux de loisirs, de culte et d’écoles. Les pistes boueuses se dotent de noms de rue alors que petites épiceries y vendent brosses à dents, chargeurs pour portable, gel douche, boissons et nourriture. Et deux comédiens anglais, Joe Robertson et Joe Murphy, y ont ouvert en septembre 2015 un théâtre couvert (ironiquement appelé le Good Chance Theatre).
L’empire britannique sans frontières
Née a la fin des années 90, le No Border Network, un groupe d’origine allemande mais à forte dominante britannique, a installé depuis 2009 une antenne permanente dans la Jungle de Calais. Très actifs pour défendre à leur manière les réfugiés de Calais, ses activistes irritent et inquiètent les associations d’aide traditionnelles. Sans dirigeant ni adresse, le groupe se déclare « anti-capitaliste ». Ses membres prônent un engagement radical et montent des actions symboliques à la limite de la légalité et à grand spectacle permettant « d’alerter l’opinion ».
Lors d’innombrables camps d’entraînements, le réseau forme aussi bien les militants que les réfugiés aux mêmes techniques « d’action directe » et de « résistance non-violente » qu’on a vues régulièrement à l’œuvre lors des « révolutions de couleurs » financées par le milliardaire américain George Soros pour faire la guerre à la Russie et la Chine. Pour échapper au contrôle des forces de l’ordre, les militants de No Border circulent sans papier et refusent les tests ADN pour échapper à toute identification. Une autre arme dans leur arsenal est le « copwatch », une surveillance intense de l’activité policière à l’égard des migrants.
Les militants de No Border sont libertaires, zaddistes, marginaux, écolos ou encore trotskystes. Venus essentiellement d’Angleterre, de Belgique, d’Italie, d’Allemagne et de France, ils restent une centaine (ils étaient 300 en 2009 et faisaient peur à tout le monde) à se relayer pour faire bouillir la cocotte-minute calaisienne. Les migrants, ils ne leur apportent pas seulement de la nourriture et leur ouvrent des squats, mais ils vivent avec eux ce qui leur permet de nouer des rapports de confiance. Vomissant autant toute forme d’Etat organisé que les néolibéraux les plus débridés, ils vomissent encore plus l’activité politique classique ou journalistique. Au lieu de « faire du prosélytisme comme des militants », disent-ils « nous œuvrons dans le concret ».
En août et de nouveau en octobre 2015, plusieurs milliers de migrants franchissent les barrières d’Eurotunnel et s’engagent à pied dans le tunnel sous la Manche long de 50 km. A la tête de la troupe, selon AFP, des militants de No Border. Ces derniers affirment qu’ils n’ont rien fait d’autre que d’accompagner des réfugiés tout en leur fournissant quelques outils coupant leur permettant de ne pas s’abîmer les mains lors du franchissent des barrières de sécurité… En novembre 2015, après trois nuits d’escarmouches entre les forces de l’ordre et les réfugiés, la police accuse No Border de manipuler les réfugiés.
D’une provocation à l’autre
Depuis les attentats de novembre et la vague de migration qui bouscule toute l’Europe, certaines forces semblent vouloir doubler les provocations. En fomentant la haine des uns contre les autres, ils espèrent réduire l’homme à l’état de bêtes faciles à domestiquer. Comme en Suède ou en Allemagne, où des extrémistes de droite ou identitaires se livrent directement à des actes de violence contre les centres de réfugiés, le même type d’opération apparaît chez nous. Déjà, en octobre 2013, la maire de Calais, Natacha Bouchart, a invité sur Facebook les Calaisiens à dénoncer les squats de migrants dans la ville. Un mois plus tard, Kevin Rèche, nationaliste revendiqué de 20 ans, fonde Sauvons Calais, un collectif de lutte contre les No Borders et l’immigration. Résultat. En 2014, la présidente d’une association d’aide aux migrants a failli être enlevée dans la rue. Elle a écrit : « Mes agresseurs étaient clairs : "Salope, pute à migrants !", ou encore "Va baiser tes négros !". » Plus récemment, deux jours avant la marche de Calais du 23 janvier, trois Syriens sont violemment pris à partie par six hommes masqués et habillés en noir.
Le samedi, ce qui avait démarré comme une marche pacifique de 2000 personnes en faveur de meilleures conditions d’hébergement pour les réfugiés, se termine (devant les caméras) en affrontements avec les habitants, dont un a fini par brandir ce qui ressemble à un fusil. Pour conclure, 150 personnes défoncent la porte du port et une cinquantaine monte à bord du ferry « The Spirit of Britain », avant de se faire déloger par la police. 9 migrants et deux activistes de No Border sont arrêtés.
C’est dans cet environnement que la statue du Président Charles De Gaulle et son épouse a été taguée en couleur rouge sang avec l’inscription « Nik la France ». Et @calaisolidarity, le compte twitter de No Border exhibe la photo en précisant qu’il s’agissait d’un « meurtrier de masse réactionnaire, colonisateur et tortureur en chef d’Algériens. Et réfugié au Royaume Uni durant la deuxième guerre mondiale ». Quelques hommes politiques français se sont indignés de cette action sans pour autant en exposer la véritable cause. Et pour le citoyen lambda, qui n’a pas le temps d’approfondir le sujet, en apparence, ce sont les réfugiés qui ont salopé la statue de De Gaulle, l’image même de leur pays !
Le même jour, le journal The Daily Mail, avec une certaine fierté non-dissimulée, titrait que Des anarchistes britanniques ont provoqué de la violence à Calais et défiguré la statue de De Gaulle lors de l’invasion du port des ferries par 500 migrants. Le journal, of course, condamne l’action des trublions. Cependant, en dessous de l’article, le quotidien présente un généreux encadré annonçant les manifestations prévues le 6 février dans 14 pays européens du groupe islamophobe PEGIDA (Patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident). Comme nous l’avons documenté ailleurs, PEGIDA est directement financé par les néoconservateurs anglo-américains pour qui l’heure est venue, après le Moyen-Orient, de plonger l’Europe dans un « choc des civilisations ». A noter le fait que PEGIDA UK est actuellement présidé par Tommy Robinson, le fondateur et ex-dirigeant de la English Defense League (EDL), avec le hollandais Geert Wilders, une des stars de la mouvance identitaire européenne.
En Allemagne, c’est une filiale de la EDL, la German Defense League (GDL) qui a créé le groupe Hooligans contre le salafisme dont les actions ont poussé l’Allemagne dans un scénario de guerre civile utilisant le principe de gang/contre-gang. C’est ainsi qu’on a pu voir défiler Tommy Robinson avec les Hooligans à la tête de la manifestation de PEGIDA de Cologne, en défense des femmes violentées lors de la Saint Sylvestre…
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