Visiblement inquiète d’une colère populaire qui gronde, la Commission européenne a fini par infliger le 4 décembre des amendes à six établissements financiers pour avoir manipulé les taux interbancaires en euros (Euribor) et en yens (Libor et Tibor).
Pour mémoire, 47 banques européennes de la zone euro, 4 banques européennes hors zone euro et 6 banques hors UE, ayant toutes une excellente réputation de solvabilité, proposent chaque jour à la Fédération des banques européennes (FBE) une évaluation individuelle des 15 taux Euribor (Euro Interbank Offered Rate). De la même façon, hors de la zone euro, le taux Libor (London Interbank Offered Rate) est fixé chaque jour à Londres par la British Bankers Association (BBA), un groupement représentant les 200 banques opérant depuis la City.
Ainsi, ces deux taux servent de référence dans le monde entier pour fixer la valeur de toutes sortes de produits financiers dérivés, pour calculer les taux des livrets bancaires, les taux des comptes à terme et les taux pour les prêts ou emprunts à taux variables. Le Libor seul sert de référence à un marché totalisant 350 000 milliards de dollars, soit six fois le PIB mondial.
Alors que n’importe quel petit voleur écope facilement de la prison ferme, les banques ayant volé en bande organisée, tout en gardant leurs licences bancaires, s’en tirent avec de simples amendes : 775 millions d’euros pour Deutsche Bank, 446 millions pour la Société Générale, 391 millions pour Royal Bank of Scotland (RBS), 80 millions pour JP Morgan, 70 millions pour Citigroup et 247 000 pour le courtier RP Martin.
Dans ce cas-ci, la Commission « européenne » a adopté l’approche américaine du « plaider coupable ». Car les banques Barclays (pour l’entente sur l’Euribor) et UBS (pour le Libor Yen), qui ont « balancé leurs copains », ont bénéficié de la « clémence » européenne qui protège les repentis et leur permet d’échapper à l’amende (2,5 milliards d’euros pour UBS et 690 millions d’euros pour Barclays) !
Alors que la Commission annonce en fanfare qu’il s’agit d’une amende record de 1,7 milliard d’euros, elle efface 3,2 milliards d’euros d’amendes (quasiment l’équivalent du coût initial du canal Seine-Nord) au profit de délinquants financiers avérés !
Car, comme le précise Les Echos, c’est « grâce aux tuyaux » de la Barclays et de l’UBS que les fonctionnaires européens ont pu mettre au jour une vaste stratégie de manipulation entre 2005 et 2008 pour l’Euribor et entre 2007 et 2010 pour le Libor Yen.
Comment cela marchait-il ?
Chaque jour, pour fixer le cours du Libor, la British Bankers Association à Londres demande à ses principales banques affiliées à quel taux elles empruntent sur le marché interbancaire, la réponse étant « sur parole ».
Or, les e-mails des conversations saisies par la Commission établissent, comme le précise Les Echos, que
les traders des banques incriminées s’entendaient pour fausser l’évolution de ces taux, à la hausse comme à la baisse, de façon à maximiser leurs profits sur les produits dérivés.
Pour cela, ils s’entendaient avec les services de leurs établissements respectifs qui participaient aux panels sur lesquels reposent les taux respectifs. La méthode : des échanges courts par e-mail ou par tchat sur les consoles de Bloomberg, où les traders, animés par un esprit de corps sans faille, échangeaient leurs besoins ou proposaient de rendre service au copain de la banque d’en face.
« Un Euribor à 1 mois très bas si tu peux. » « J’ai vraiment besoin d’un Libor à 3 mois plus élevé en décembre. » « Je te retourne la faveur quand je peux. »
Mais les amendes infligées par la Commission « ne mettent pas fin à cette histoire », a insisté le commissaire européen chargé de la Concurrence, Joaquin Almunia, car la Commission enquête également sur de possibles manipulations du franc suisse et « n’exclut pas d’autres enquêtes du même ordre ». Elle affirme aussi disposer d’informations sur des manipulations d’un autre marché énorme, le marché des changes.
Emprunts toxiques, Article 60 du PLF 2014
En France, Deutsche Bank et Royal Bank of Scotland, avec Dexia, sont surtout connues comme des banques ayant vendu des milliers « d’emprunts toxiques » aux collectivités locales. Or, et c’est là que la chose devient intéressante, lorsque ces banques vendaient des emprunts « structurés », les taux d’intérêt servant de référence à la profession étaient dans la plupart des cas… l’Euribor et le Libor.
La faillite de Détroit a brutalement mis en lumière le piège tendu par les banques aux collectivités, dont voici l’enchaînement : 1) La banque propose un emprunt dont le taux est variable ; 2) Pour protéger le client, la banque lui propose un produit financier taillé sur mesure, le swap, présenté comme une assurance contre une hausse trop brutale des taux ; 3) Concrètement, si le taux monte, la banque est tenue de payer le surcoût résultant de la hausse des taux ; 4) Inversement, si le taux baisse, c’est le client qui paye. Détroit remercie vivement la Société Générale et l’UBS d’avoir participé à sa ruine !
Or Bruxelles vient de condamner les banques pour entente illicite en vue de manipulation des taux. Ce qui veut dire que tous les « emprunts toxiques » fondés sur des taux manipulés nécessiteront un réexamen approfondi. Combien les collectivités ont-elles payées en trop ? Déjà, plusieurs villes américaines s’estimant victimes de la manipulation des taux, notamment Baltimore, dans le Maryland, ont lancé des poursuites judiciaires contre les banques. Pour Détroit, également prise au piège des swaps, il est hélas trop tard.
La bonne nouvelle, c’est que l’amende de Bruxelles rend implicitement caduc l’Article 60 du projet de loi de finances 2014 en France, qui vise, par une « validation législative », à désarmer juridiquement les collectivités territoriales face à la grande délinquance financière.
Signez notre pétition contre l’Article 60 !
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# petite souris
• 09/12/2013 - 22:03
c’est cela le mariage pour tous !
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et les peuples sont les cocus de la farce ?
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farce du chapon de Noël of course !
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