Un enregistrement audio publié le 6 février, juste avant l’arrivée de la secrétaire d’État-adjointe américaine Victoria Nuland [1] à Kiev le vendredi 7 février, jour d’ouverture des jeux d’hiver de Sotchi, révèle comment celle-ci a tenté, en coordination avec l’ambassadeur américain en Ukraine Geoffrey Pyatt, d’imposer au gouvernement ukrainien les candidats de l’opposition de leur choix.
Tout comme Catherine Ashton et le sénateur John McCain, Mme Nuland n’hésite pas à se rendre régulièrement en Ukraine pour y distribuer des petits pains et des gâteaux aux manifestants de l’opposition.
Dans sa conversation téléphonique avec l’ambassadeur américain, Nuland s’exprime au passage en termes très peu diplomatiques sur l’incapacité de l’Union européenne, pourtant une puissance alliée des Etats-Unis, à s’imposer : "Fuck the EU" ! (que l’UE aille se faire foutre !), des propos pour lesquels elle a dû présenter des excuses.
Nuland informe Pyatt qu’elle a évoqué son plan avec le sous-secrétaire des Nations unies pour les Affaires politiques Jeffrey Feltman, un ancien du département d’État américain, qui devait nommer un représentant de l’ONU pour promouvoir l’accord envisagé par elle. Le vice-président américain Joe Biden devait également être mobilisé pour promouvoir son choix.
L’intervention de Nuland a lieu peu après la proposition formulée le 25 janvier par le gouvernement ukrainien offrant des postes ministériels à deux figures de l’opposition : le boxeur Vitali Klitschko de l’Alliance démocratique ukrainienne pour la réforme (UDAR) (mis de l’avant par les Britanniques et les Européens) et Arseni Iatseniouk du Front pour le changement, qui est en alliance avec Ioulia Tymochenko, emprisonnée depuis 2011.
Nuland prétend que si l’on permettait à Klitschko de devenir vice-Premier ministre, comme le lui avait proposé le président ukrainien Ianoukovitch, les choses se passeraient mal avec Iatseniouk, son choix préféré comme chef du nouveau gouvernement :
Je ne pense pas que Klitsch [le surnom qu’elle donne à Klitschko] devrait entrer au gouvernement. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée. (…) Je pense que Yats [surnom de Iatseniouk] est le gars qui a l’expérience en économie, l’expérience de gouvernement (...) Ce dont on a besoin, c’est que Kiltsch et Tiahnybok [Oleh Tiahnybok est le chef du parti néo-nazi Svoboda] soient à l’extérieur ; Iatseniouk a besoin de leur parler quatre fois par semaine, tu sais. Je pense que si Klitsch entre au gouvernement, il sera au même niveau opérationnel que Iatseniouk, ça ne marchera tout simplement pas.
L’ambassadeur Pyatt demande ensuite : « Voulez-vous qu’on arrange un appel téléphonique avec lui ? » A quoi répond Nuland : « J’avais compris que Yats allait offrir dans ce contexte une conversation 3+1 ou 2+1 avec toi. C’est bien cela que tu avais compris ?
Voici donc les trois soi-disant chefs des trois soi-disant partis de l’opposition « ukrainienne » en train de coordonner directement leur coup d’Etat via des appels-conférence avec la représentante personnelle de Barack Obama et l’ambassadeur américain en Ukraine !
Juste avant que n’éclate au grand jour ces manœuvres impériales, Sergeï Glaziev, le conseiller du président russe Vladimir Poutine pour les affaires eurasiatiques, révélait dans le journal russe Kommersant que les Etats-Unis financent et entraînent l’opposition armée en Ukraine et que ceci contrevient à l’accord de 1994 entre la Russie et les Etats-Unis sur le respect de la souveraineté ukrainienne.
Nous devons rappeler le Mémorandum de Budapest de 1994 sur les garanties en matière de sécurité, adopté dans le cadre de l’adhésion de l’Ukraine au Traité de non prolifération nucléaire. Toutes les parties se sont engagées à protéger l’intégrité territoriale de l’Ukraine. En vertu de cet accord, la Russie et les Etats-Unis sont les garants de la souveraineté de l’Ukraine ainsi que de son intégrité territoriale et, à franchement parler, sont obligés d’intervenir [de manière conjointe, ndlr] lorsque ce type de conflit émerge. Ce que les Américains sont cependant en train de faire, de manière unilatérale et en s’ingérant cruellement dans les affaires intérieures de l’Ukraine, est une violation claire de ce traité. L’accord vise des garanties collectives et une action collective.
Glaziev ajoute que selon ses informations, « des sources américaines dépensent quelque 20 millions de dollars par semaine pour financer l’opposition et les insurgés. »
Quant aux propos de l’ambassadeur américain en Ukraine Jeffrey Pyatt, qui se dit à « 100 % certain » que l’Ukraine signerait l’Accord d’Association avec l’UE, Glaziev fait remarquer qu’il est assez étrange de constater qu’un ambassadeur d’un pays étranger puisse « déclarer avec certitude que l’Ukraine va signer l’accord, comme s’il pouvait, mieux que les dirigeants ukrainiens, décider de la question. Mais les dirigeants ukrainiens ont décidé de ne pas signer cet accord contre nature car ce document est une feuille de route vers la catastrophe. »
L’économiste et homme d’État américain Lyndon LaRouche a conclu que les manigances de Nuland, en tant que représentante personnelle du président Obama en Ukraine, visent à fomenter un coup d’État fasciste et peuvent conduire à un affrontement thermonucléaire entre les superpuissances.
Ceci constitue une raison supplémentaire pour la destitution, selon les procédures prévues à cet effet, du président américain dans les plus brefs délais.
[1] Victoria Nuland a été la conseillère principale de politique étrangère de Dick Cheney. Elle est également l’épouse du néo-conservateur Robert Kagan, instigateur du projet impérial pour un Nouveau siècle américain. Pour Kagan, l’UE est impuissante car sous l’emprise de Vénus, déesse de la paix, mais fort contente que les Etats-Unis fassent le sale boulot de Mars (dieu de la guerre). Ambassadrice-adjointe à l’OTAN, Mme Nuland avait exigé, au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, l’application de l’article 5 de la Charte atlantique obligeant les États membres de l’OTAN à partir en guerre avec George Bush junior contre le terrorisme mondial. C’est dans ce but qu’elle a plaidé auprès de Nicolas Sarkozy pour accélérer le retour de la France dans l’OTAN.
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