Le rédacteur-adjoint du Telegraph de Londres, Jeremy Warner, a pris sa plume pour demander le 7 juillet que l’on fasse marcher la « pompe à phynances » à une cadence encore plus élevée, dans un contexte où n’est « pas encore tout-à-fait dans une situation à la Kreditanstalt, l’effondrement bancaire autrichien de 1931 qui avait marqué le début de la Grande dépression »... mais on n’est pas loin !
Warner fait remarquer que l’avertissement sur résultats [1] de l’Austrian Erste Bank de la semaine dernière vient s’ajouter à l’insolvabilité plus tôt cette année d’une autre banque autrichienne, Hypo Alpe-Adria, la première banque européenne qui sera renflouée selon le principe du bail-in (aux dépens des épargnants) selon la nouvelle législation européenne.
Tout en reconnaissant que les « stress tests en cours » sur les banques européennes manquent de sérieux (« ridiculously mild » selon ses termes), Warner prétend qu’à ce point-ci ces derniers soubresauts bancaires « ne devraient probablement pas déclencher une répétition de la crise systémique globale ».
Comment prévenir le pire ? Très simple : pour Warner il suffit d’accélérer les injections de liquidités en faisant marcher la planche à billets. En premier lieur, il s’agit donc de s’assurer que le patron de la BCE mette rapidement en application sa promesse du 3 juillet de faire appel aux opérations de refinancement à plus long termes ciblées (TLTRO) [2]
Une première tranche de 400 milliards d’euros de TLTRO devrait être mise bientôt en circulation, et une deuxième tranche de 600 milliards en mars 2015, pour un total de 1000 milliards d’euros en moins d’un an. Comparés aux 85 milliards de dollars mensuels d’assouplissement non quantitatifs de la Réserve fédérale américaine, le rythme adopté par la BCE est un tiers plus rapide.
Ces liquidités ne sont pas destinées à être utilisées dans l’économie réelle, et encore moins à financer de grands projets d’infrastructures dont l’Europe a tant besoin, mais permettront à continuer à maquiller les bilans et de sauver les bulles spéculatives.
Et dire qu’Angela Merkel se permettait hier, lors d’une visite de trois jours en Chine, de sermonner ses hôtes contre « la croissance financée à crédit », affirmant qu’il « est préférable que de voir l’économie mondiale croître moins vite que d’être obligé à devoir compter sur des mesures d’endettement insouciantes » !
Quand à Jeremy Warner, comme la plupart des shootés de l’argent facile, il termine son article en disant que les injections de liquidités annoncées par Draghi restent totalement insuffisantes...
[1] Le profit warning ou avertissement sur résultats sont les termes utilisés pour désigner l’avertissement émis par une entreprise pour alerter les actionnaires sur de mauvais résultats. Cela signifie que les prévisions et les objectifs préalablement fixés ont de grandes chances de ne pas être atteints et que le cours du titre associé à la société en question va inexorablement baisser. Le cours de bourse d’une entreprise dépend des prévisions de son chiffre d’affaire et du rendement éventuellement élevé qu’elle peut apporter. Les actionnaires risquent donc de ne pas retirer les profits escomptés de leur investissement.
[2] Les opérations de refinancement à plus long terme ont lieu chaque dernier mercredi du mois et portent habituellement sur des échéances de 3 ou 6 mois. Le montant minimum est de 10 000 euro avec des tranches supplémentaires de 10 000. Elles se font par cession temporaire de titres détenus par les banques, qui peuvent soit les mettre en pension auprès de la BCE ou les offrir comme garanties contre des prêts de la BCE. Ces opérations sont, contrairement aux opérations principales de refinancement, plus accommodantes pour les banques, mais elles sont surtout moins transparentes en ce qui concerne la véritable politique monétaire de la BCE, cachant en réalité une politique hyperinflationniste.
Un message, un commentaire ?