Pour l’année Beethoven qui vient de s’achever, nous avons décidé de lancer une offensive culturelle visant à « rendre au peuple » Beethoven et son souffle créateur. Cette offensive s’est concentré sur deux projets :
- la publication du dossier Penser comme Beethoven, rebelle humaniste ,
- et l’organisation d’une visioconférence le 16 décembre, jour de la naissance du compositeur, impliquant musiciens professionnels, amateurs, musicologues, compositeurs et citoyens engagés.
Le dossier Penser comme Beethoven, rebelle humaniste
On a tous soif de liberté, de justice, de vérité. Surtout en ce moment ! Parfois on doute. A écouter la cinquième, le Fidelio ou l’appassionata de Beethoven, c’est comme si le courage d’y croire et de vouloir nous battre nous revenait.
Mais comment une simple musique peut-elle produire un tel effet ?
Pourquoi même les stars de rock ont puisé dans les grands airs classiques ?
La réponse se trouve en partie dans notre dossier : Penser comme Beethoven, rebelle humaniste.
Nous l’avons composé pour vous, alors qu’en 2020 nous célébrions le 250e anniversaire de la naissance de Beethoven. Mais aussi alors que nous entrons dans l’une des périodes les plus tragiques de notre histoire - celles-là même qui nécessitent que nous allions puiser, ensemble, dans la part la plus forte et la plus belle de nous-mêmes.
Alors si vous voulez commencer l’année en beauté, rendez-vous dans notre boutique pour commander notre dossier... et faire plus intime connaissance avec l’un des génies les plus révolutionnaires de notre histoire.
La visioconférence Beethoven : le souffle créateur pour révolutionner notre temps
Pour permettre aux non-initiés de saisir la différence fondamentale entre la musique commerciale actuelle et le domaine dans lequel Beethoven nous entraîne, Johanna Clerc (apprentie cheffe de chœur) a invité les internautes à se demander ce qui les pousse habituellement à écouter de la musique. Finalement, n’utilisons-nous pas souvent la musique comme une sorte de drogue douce, pour créer une ambiance propice à la détente, à la rêverie, ou bien, à l’action, à la danse, voire à la transe ? Malheureusement, la plupart des gens ne savent pas qu’il existe un autre univers – dans leur esprit – où la musique n’est pas un instrument pour se mettre dans tel ou tel état émotionnel, mais un langage à part entière capable d’exprimer l’indicible.
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- Visioconférence de Solidarité & progrès le 16 décembre 2020, sur le thème "Beethoven : le souffle créateur pour révolutionner notre temps"
Et c’est là que Beethoven entre en jeu. Rien n’est plus éloigné d’une musique d’ambiance que sa musique. Comme Bruno Abrial et Odile Mojon (tous deux co-auteurs de notre dossier Penser comme Beethoven, rebelle humaniste) l’ont exposé, Beethoven vivait dans une période révolutionnaire pendant laquelle les classes supérieures, qui avaient des oreilles mais n’écoutaient pas, trichaient avec leurs principes et étaient incapables de répondre aux défis de leur époque. Toute ressemblance avec des personnes actuellement au pouvoir dans nos « démocraties » n’étant absolument pas fortuite. Pour faire face à ce ramollissement des caractères, Beethoven donnera au peuple et à la postérité un art prométhéen et révolutionnaire. Ceux qui s’autorisent à penser dans les milieux autorisés vous dirons que c’est un lieu commun. Mais c’est un lieu commun dont on ne comprend plus la signification réelle…
Comme l’a démontré Georges Beriachvili, pianiste et musicologue, la musique de Beethoven ne parle pas de la révolution, de Prométhée et de son feu créateur : elle est elle-même la révolution et le feu créateur. La musique de Beethoven est habitée par la vie elle-même, et non par la fuite de celle-ci. Chez Beethoven, la matière musicale est toujours assez simple, comme le montre le premier mouvement de la 5ème Symphonie, mais cette matière est amenée à s’accroître et à se développer de manière très complexe. Beethoven ne recherchait pas la beauté du son, il concevait sa musique comme une idée se créant d’elle-même, luttant pour son existence et poursuivant inflexiblement son objectif.
Michèle Ariste (professeure de musique et pianiste) et Jan Tamzejian (compositeur et pianiste) présentèrent à travers des exemples comment cette approche « prométhéenne » se manifeste chez Beethoven. Mme Ariste donna des clés d’écoute et de compréhension de l’Ouverture d’Egmont, œuvre que la pièce de théâtre éponyme de Goethe inspira au compositeur. M. Tamzejian montra, entre autres, comment Beethoven inspire son travail de compositeur aujourd’hui, et comment cet héritage peut directement alimenter les luttes citoyennes pour la dignité. Les internautes purent ainsi écouter deux compositions de M. Tamzejian : une adaptation, sur un chant de Beethoven, de « On est là ! », la rengaine emblématique des Gilets Jaunes, et un « Bashrav » (Prélude) pour oud, percussion et quintette à cordes, une œuvre mariant « deux formes classiques : l’une classique occidentale et l’autre traditionnelle orientale ».
L’audience de notre visioconférence n’était pas en reste, car elle posait la question légitime de comment transmettre la compréhension de Beethoven à tous. Or, une résistance est déjà en place : dans le monde associatif basé sur des initiatives privées, la musique de Beethoven est timidement transmise à une population de plus en plus vieillissante. Mais les institutions officielles sont largement démissionnaires. Aujourd’hui, les musiciens, les compositeurs et les militants associatifs ne peuvent pas compter sur un État qui préfère promouvoir une culture officielle « démocratique » plutôt qu’accompagner sa population avec une culture de la vie et la découverte, par peur des « mauvaises idées » que ça pourrait lui donner.
Il existe pourtant actuellement des interprètes et des compositeurs talentueux, comme la jeune prodige britannique Alma Deutscher. Mais ils ne sont connus que d’une minorité de mélomanes, coincés dans la niche écologique d’une culture que les classes dirigeantes ne comprennent même pas elles-mêmes. Beethoven lui-même était loin d’être majoritaire à son époque, le romantisme et l’individualisme morbide triomphant dans l’histoire de l’art, sous le regard plutôt bienveillant de la bourgeoisie naissante et de l’aristocratie désargentée.
Nos intervenants, Jacques Cheminade en tête, ont rappelé que ce sont ces mêmes milieux oligarchiques qui ont étouffé dans l’œuf l’héritage de Beethoven dans la population, par peur que de nouveaux Prométhées en sortent pour « donner le feu aux hommes ». Car c’est bien cela que nos oligarchies diverses, variées, mais toutes rattachées à l’Empire de la City de Londres et de Wall Street, craignent. Que ce feu prométhéen devienne incontrôlable et brûle leur château de cartes de préjugés, d’idées reçues, de monétarisme financier et de malthusianisme légèrement verdâtre. Aujourd’hui, c’est entre vos mains que nous espérons voir ce feu créateur, à mesure que vous découvrirez et ferez découvrir ce génie universel qui n’a pas fini d’enflammer les cœurs et les esprits !
Les discours de la visioconférence :
- Beethoven, concrètement ! par Odile Mojon.
- Une vie et une œuvre révolutionnaire, par Bruno Abrial.
- La musique qui rend libre, par Odile Mojon.
- La dimension prométhéenne de l’art de Beethoven, par Georges Bériachvili, pianiste et musicologue
A LIRE, EN SUPPLÉMENT :
La musique, c’est la dynamique de la vie, par Christine Bierre, à partir du troisième entretien de Wilhelm Furtwängler avec Walter Abendroth.
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