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- Le 5 août, le président égyptien à lancé les travaux pour le creusement d’un nouveau canal de Suez.
- Crédit : english.ahram.org
L’Egypte cherche définitivement à rejoindre la dynamique des BRICS. Après avoir boudé le sommet africain d’Obama du 4 août, où le président américain n’avait de toute façon prévu aucun moment pour s’entretenir directement avec les chefs d’Etats africains, le président Abdel Fattah Al-Sissi s’est rendu le 12 août à Sotchi en Russie pour y conclure des accords majeurs de coopération avec Poutine. Le chef de l’État égyptien a également envoyé une lettre de soutien à l’Argentine dans son combat contre les fonds vautours et le Fonds monétaire international (FMI), dont les exigences avaient provoqué des émeutes de la faim en Égypte en 2008 et 2011.
Mais avant son déplacement en Russie, Al-Sissi, visiblement désireux de marcher dans les pas du grand président égyptien Abdel Gamal Nasser, a lancé, le 5 août, le chantier « pharaonique » pour la construction d’un nouveau canal de Suez.
C’est exactement ce pour quoi l’économiste américain Lyndon LaRouche s’est battu lorsqu’il proposa dès 1975 la modernisation du canal de Suez comme élément majeur d’un plan d’ensemble plus vaste pour toute la région, connu sous le nom de « Plan Oasis ».
Un nouveau canal de Suez
Long de 162 km, le canal de Suez actuel célèbre cette année son 145e anniversaire. Les droits de passage rapportent annuellement au Trésor égyptien environ 5 milliards de dollars. Avec le nouveau canal, l’on estime qu’ils pourraient grimper à 13 milliards de dollars d’ici à 2023.
Lors d’une conférence de presse, le vice-amiral Mohab Mamesh, qui préside l’Autorité du canal de Suez, a précisé qu’il s’agit de creuser 35 km de canal totalement nouveau, de remettre à niveau et d’élargir 37 km du canal existant, d’aménager quelque 76 000 km2 en zone d’activités et de compléter le tout d’un réseau de tunnels automobiles et ferroviaires. Le trafic sera presque doublé et passera de 49 à 97 navires quotidiens. D’après les prévisions, le projet permettra aux navires d’attendre trois heures au lieu de onze actuellement pour emprunter le canal.
Les travaux prendront au moins quatre ans pour un coût total d’environ 4 milliards de dollars (2,9 milliards d’euros). Une soixantaine de sociétés civiles ont été sélectionnées pour réaliser le projet sous la supervision de l’armée et du génie militaire.
Le Projet Toschka et le canal de la paix
Le vrai problème de l’Egypte, c’est que 95% de la population vie sur seulement 5% du territoire, en occurrence autour du delta du Nil. Pour relever ce défi, le président égyptien a promis de parachever le projet Toschka (voir carte ci-dessous), un vaste projet hydrologique qui vise à réduire la densité de population dans la vallée du Nil en conquérant des espaces désertiques par d’audacieux projets d’irrigation et de développement de pôles de peuplement.
Avec le projet Toschka, il s’agit plus précisément à détourner 5 milliards de m3 d’eau par an à partir du lac Nasser, par un canal à creuser (canal Cheikh Zayed), vers les oasis situées dans le Désert occidental (oasis de Kharga, Dakhla et finalement Farafra). Le canal suivra une série de dépressions et devrait permettre l’irrigation d’environ 420 000 hectares de terres désertiques. La société saoudienne KADCO, dirigée par le Prince Al-Waleed, a acheté 350 000 ares de terre dans la « zone de développement de la Nouvelle Vallée ». 50 % de cet espace sera consacré à la culture du blé et du coton bien que l’essentiel des revenus proviendront de l’exportation de pamplemousse (30 %) et de citron (20 %). Au total, le projet Toschka et le canal de la paix dans le Sinai permettraient de porter à terme la superficie cultivée du pays, selon certaines prévisions, de 6 % à près de 20 %.
Mobilisation nationale
D’après La voix de la Russie : « Outre le creusement d’un nouveau canal de Suez, l’Égypte va le border de vastes zones industrielles. Ce dont s’occupera la Russie. Les zones abriteront des chantiers navals, des usines de construction de conteneurs et d’assemblage de voitures. »
Semblable à l’esprit de mobilisation qu’avait connu l’Égypte il y a un demi-siècle lors du chantier du barrage d’Assouan construit sous Nasser, toute la société égyptienne est sur la brèche. A peine annoncé, la presse égyptienne déborde d’images de l’armée de bulldozers géants et de gros camions accompagnant les 7500 ouvriers à pied d’œuvre. Lors de son discours inaugural, le chef de l’État a proposé d’accélérer le tempo : « peu importe ce qu’il faudra faire, ce projet doit être achevé dans un an, c’est ce qu’attendent les Égyptiens. » Dans un pays où 13 à 20 % de la population est au chômage, ce chantier est une aubaine. « Le projet devrait fournir un million d’emplois et fera de l’Égypte un centre industriel, logistique et marchand », a promis Mohab Mamesh.
À l’image de Nasser qui annonçait le 26 juillet 1956 son intention de créer un « bloc national inséparable » autour du canal de Suez, l’actuel chef de l’État égyptien exige que le nouveau canal soit la propriété des Égyptiens seuls.
« Nous voulons que tous les Égyptiens détiennent des actions dans ce projet », a lancé le président. Il a demandé une participation de 100 livres égyptiennes (environ 10 euros) pour ceux qui vivent en Égypte et de 100 dollars (75 euros) pour les Égyptiens résidant à l’étranger. Avec 80 millions d’habitants, le tour semble jouable.
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